J’ai eu l’immense tristesse de faire part au grand public ce 28 février du décès de Vincent Brousseau.
Quelques jours plus tard, j’ai toujours autant de mal à réaliser qu’il est déjà parti. Il était encore jeune et avec tant de choses à apporter à la France. C’est une pièce maîtresse du camp souverainiste qui nous fera défaut au moment de sortir de l’euro.
Pour ceux qui ne le connaissaient pas, Vincent était un expert incontesté de l’euro avec près de 15 années passées à la Banque centrale européenne.
Vincent était quelqu’un de brillant. Après le bac, il est entré dans une classe préparatoire aux grandes écoles scientifiques et a été reçu au concours de l’École normale supérieure de Saint-Cloud. Il a ensuite soutenu un doctorat de troisième cycle en mathématiques à l’université Paris IX-Dauphine en 1985, puis un doctorat d’économie à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) en 1990.
Il a débuté sa vie professionnelle comme « trader » dans une grande banque de la place parisienne, spécialisé dans de complexes produits de taux d’intérêt à haute teneur en mathématiques, puis est passé par un marché à terme aujourd’hui disparu, le MATIF (Marché à terme des instruments financiers).
Il a rejoint la Banque centrale européenne en 1998. Il était alors, naturellement, pro-Union européenne et pensait sincèrement que cette idée pouvait marcher et était inéluctable. L’euro était un moyen d’y parvenir.
Par une ironie du sort, c’est au contraire cette expérience à la BCE qui lui a fait comprendre que tant l’UE que l’euro ne pourraient jamais fonctionner. Une sorte de preuve par les faits. Il a commencé à douter après le référendum de 2005 puis il a vécu de plus en plus mal la contradiction entre ce qu’il pensait et les décisions prises par l’institution dont il était le salarié, et dont il estimait que non seulement elles conduisaient l’Europe à la ruine, mais encore qu’elles menaient notre pays, insidieusement mais inéluctablement, à sa disparition en tant qu’État-nation. C’est en 2010 qu’il a commencé à s’engager en sous-main en faveur du Frexit.
Il a par ailleurs été celui qui, à la Direction économique, a été le premier à attirer l’attention sur le désormais célèbre problème des « déséquilibres Target ». Il a aussi été l’un des premiers à signaler, en 2009, la manipulation des indices Libor/Euribor dans une publication (hors BCE) qui, sur le moment, passa inaperçue.
Grand patriote, il avait démissionné de son poste au département de la politique monétaire de la BCE en 2014 pour se lancer dans le combat du Frexit. Je l’ai dès lors côtoyé sans interruption jusqu’à cette tragédie.
C’était quelqu’un qui se battait pour des idées et non pour sa personne ni par ambition personnelle. Il a toujours fait ce qui lui semblait le plus juste.
Il était le responsable des questions monétaires chez Génération Frexit. Il était l’un des membres fondateurs de ce jeune mouvement né en juillet 2020 et membre du Bureau exécutif.
Il était surtout une personne très attachante avec un immense humour. Je ne connais pas une personne l’ayant connu qui ne partage cette opinion.
Il était aussi quelqu’un de très généreux. Certains auront une dette éternelle envers lui. Ils se reconnaîtront.
C’est un homme extraordinaire qui nous quitte.
Qu’il repose en paix. Nous ne l’oublierons jamais. Le plus bel hommage que l’on puisse faire à Vincent est de remporter le combat pour la France.
Charles Henri-Gallois