RT France : Dans votre appel à l'union des droites via votre plate-forme collaborative Les Amoureux de la France, vous terminez votre lettre avec cette phrase «le pays avant les partis». Les structures partisanes sont-elles devenues démodées et obsolètes selon vous ?
Nicolas Dupont-Aignan (N. D.-A.) : Je dis simplement que les partis ont beaucoup vieilli en France et qu'Emmanuel Macron a su rassembler les européistes et les mondialistes, Jean-Luc Mélenchon a su rassembler la gauche radicale. Ainsi, si de l'autre côté de l'échiquier, à droite et chez les patriotes et les républicains, on reste dans le chacun pour soi, nous n'y arriverons jamais. Actuellement, Laurent Wauquiez ne veut pas parler à Marine Le Pen, Marine Le Pen repart dans sa dynamique, Florent Philippot s'en va du FN. En réalité, je pense qu'il y a plus de choses qui nous rassemblent que de choses qui nous séparent. Voilà pourquoi je dis que le pays nous importe davantage que les partis.
RT France : Lancer «Les Amoureux de la France» quelques semaines avant l'élection de la présidence des Républicains était-il un choix innocent ?
N. D.-A. : C'est un appel du pied à tous les électeurs français. L'idée est de leur dire qu'il faut tirer les leçons de la défaite de 2017 et qu'il est temps de bâtir un nouveau programme qui soit commun. Laurent Wauquiez ne gagnera pas seul, Marine Le Pen ne gagnera pas seule et moi non plus. Je souhaite donc simplement qu'on travaille ensemble. Le projet n'est pas de pousser à l'union pour l'union, mais de mettre en commun un programme, un projet concret, quelque chose qui marche ! Il faut retourner à la base et c'est tout l'enjeu de cette plate-forme collaborative que nous avons lancé avec Jean-Frédéric Poisson. C'est-à-dire un site internet où chacun peut répondre à des questions – il y en a 300. Chacun peut y aller et découvrira qu'il peut proposer son programme idéal. Nous verrons ensuite quels sont les points de convergence entre tous les Français qui partagent nos valeurs et nos convictions.
RT France : Sur votre plate-forme au bout de 24 heures vous avez reçu plus de 350 000 réponses. Cela vous conforte-t-il dans votre démarche ?
N. D.-A. : Oui, c'est un succès. Vous imaginez en 24 heures, c'est assez extraordinaire. C'est la preuve qu'il y a une attente et que nos électeurs approuvent notre démarche. Nos électeurs, qu'ils votent pour Les Républicains, pour le Front national ou pour Debout la France, ont dans le fond beaucoup de choses en commun. Nous ne voulons pas nier les différences qui existent entre ces électeurs ou remettre en cause les partis politiques, nous proposons juste de tous travailler ensemble. Il me semble que cette vision plaît aux électeurs, qu'ils se disent qu'il y a enfin un homme politique qui s'intéresse plus à l'intérêt général qu'à sa boutique partisane.
RT France : Vous avez toujours été un défenseur du souverainisme économique, or la plupart de vos alliés des Amoureux de la France sont des libéraux assumés. L'union des droites vaut-elle le fait de renier certaines de vos convictions sur le plan européen et économique ?
N. D.-A. : Je ne m'allie avec personne. Je veux que les gens travaillent ensemble et élaborent un programme commun. J'ai mes convictions, je n'en change pas. Debout la France garde ses convictions également. En revanche, je veux qu'on gagne et pour gagner il faut faire des compromis. Sur une majorité de sujets, nous sommes d'accord. Par exemple, sur la question du contrôle des frontières, 80% des Français souhaitent sa remise en place. Là-dessus, je n'ai pas le sentiment d'abandonner mes convictions.
En revanche, il y a peut-être des points où il faudra faire des pas l'un vers l'autre. On peut défendre notre nation tout en faisant des compromis. Faire des compromis n'est pas de la compromission. L'idée est de créer une coalition. Tous les gouvernements en ont. A force de refuser toute coalition, on arrive à la défaite. Or, je veux en finir avec les défaites sans pour autant abandonner nos convictions profondes et nos valeurs.
RT France : Vous expliquez vouloir dans un premier temps élaborer un programme participatif et commun, mais quelle sera l'étape suivante ? La constitution d'un groupe à l'Assemblée nationale ou au Sénat ?
N. D.-A. : L'étape d'après sera d'organiser des réunions en province et d'aller sur le terrain. On commencera cela en novembre, dans différentes villes de France. Après cela, il y aura peut-être des gens qui voudront se regrouper, travailler ensemble, préparer des échéances. On verra. Ce qui compte pour moi aujourd'hui reste de créer un électrochoc et de dire qu'il faut en finir avec le chacun pour soi, sinon on laissera la vie politique française à Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon.
RT France : Emmanuel Macron ne fait-il finalement pas une faveur à la droite en l'obligeant à se repositionner idéologiquement ?
N. D.-A. : Emmanuel Macron réunit dans son gouvernement des gens qui faisaient jusqu'à présent semblant de s'opposer mais qui menaient la même politique de folie en faveur de l'Union européenne et du mondialisme. C'est une chance pour nous, car ils feront naufrage ensemble. Il faut savoir maintenant si on veut que l'alternative soit celle de Jean-Luc Mélenchon ou si on veut en bâtir une autre. A mon sens, l'alternative de Jean-Luc Mélenchon n'est pas sérieuse, notamment sur le plan fiscal et migratoire. Ce que je souhaite, c'est proposer une alternative patriotique et simple à la politique d'Emmanuel Macron.