RT France : 6000 réfugiés sont arrivés en Italie la semaine dernière. C’est deux fois plus que la semaine précédente. Est-ce la conséquence de la fermeture de la frontière avec la Macédoine ?
Dario Citati (D.C.) : Bien évidemment oui, parce que vous savez que la Macédoine est le dernier d’une série de pays qui ont fermé leurs frontières, comme par exemple la Slovénie, la Serbie, la Croatie. Les migrants cherchent à rejoindre l’Europe à la suite de cette fermeture de la «route des Balkans», parce que c’est justement l’itinéraire des Balkans qui vient d’être fermé, qui augmente la possibilité de rejoindre l’Europe à travers l’Italie. Depuis le début de l’année environ 9 350 migrants ont déjà rejoint l’Italie, un chiffre supérieur de manière significative par rapport à la même période l’année dernière. Donc bien évidemment, l’Italie ouvrant ses frontières ne fait que constituer un appel pour ainsi dire aux migrants à entrer en Europe.
Depuis des années l’Italie est seule
RT France : Les autorités de l’Union européenne aident-elles suffisamment l’Italie pour lutter contre le trafic des migrants ?
D.C. : On peut dire que non, parce que depuis des années l’Italie est seule. Avant l’accord avec la Turquie on aurait du mal à voir en quoi aurait consisté une aide de l’Union européenne à l’Italie, qui a abordé la question de l’immigration toute seule.
RT France : L’Italie arrive-t-elle actuellement à lutter contre l’immigration clandestine ou a-t-elle besoin d’aide extérieure ?
D.C. : Elle aurait besoin d’aide extérieure. Il y a quelques heures on a eu connaissance d’une lettre ouverte de Matteo Renzi à l’Union européenne, au président Donald Tusk. Le contenu de cette lettre vient d’être exposé et la proposition consiste en la création d’une sorte de garde européenne, pas vraiment une armée européenne mais une structure intégrée pour contrôler justement le flux des migrants. Le problème ne relève pas que de l’accueil des migrants, c’est le contrôle des flux migratoires qui est au cœur de la question.
RT France : L’agence Frontex ne remplit-elle pas ces fonctions ?
D.C. : Jusqu’à présent non, parce que Frontex ne s’occupe que de secourir les migrants la plupart du temps. La direction à suivre selon désormais une partie considérable des politiciens européens et peut-être de l’opinion publique elle-même, c’est d’arrêter, de limiter en tout cas, le flux d’immigration parce que cela dépasse les possibilités, les chances de l’Europe elle-même d’accueillir tous ces gens.
RT France : Le nombre de réfugiés va-t-il augmenter avec l’arrivée de l’été ?
D.C. : Evidemment, cela va augmenter parce que l’été favorise la possibilité des voyages. Ça a toujours été comme ça et donc l’été prochain ne va pas constituer une exception dans ce sens-là.
Il faudrait une politique étrangère européenne dont on ne voit pas les bases
RT France : Les accords avec la Turquie vont-ils être efficaces pour empêcher ce flux de réfugiés ?
D.C. : Il est tôt pour l’affirmer parce que ces accords viennent d’être signés et commencent ces jours-ci à être appliqués. Ce qui est sûr c’est que ces accords ont reçu bien des critiques de la part des organisations humanitaires, mais il faut dire qu’il s’agit d’une mesure d’urgence pour régler le flux migratoire, ce qui, je le répète, est la question la plus importante pour contrôler ce phénomène.
RT France : Faut-il s’attendre à une aggravation de la crise des réfugiés ?
D.C. : Malheureusement oui. Le vrai problème c’est la façon dont l’Europe a abordé la question. Il y a des maisons mal bâties qui de temps en temps s’écroulent et on va voir comment la police est capable de sauver les gens qui vivent dans ces bâtiments-là. Evidemment, dans ces cas-là, la police peut parfois sauver les gens, mais parfois les gens vont mourir. C’est une métaphore parfaite pour expliquer comment le problème est géré en Europe. Bien évidemment, la solution du problème serait de ne plus vivre dans des bâtiments vétustes. Hors de cette métaphore, la solution du problème serait de ne pas autoriser un départ en masse de migrants, à travers justement un contrôle des territoires d’où ces gens-là partent. Mais, pour faire cela, il faudrait une politique étrangère européenne dont on ne voit pas les bases.