L’administration Biden a annoncé le lancement d’une enquête sur les «voitures intelligentes» chinoises, s’engageant à protéger l’industrie automobile américaine. Fidèle à son habitude, la Maison Blanche a qualifié ces voitures de «menace pour la sécurité nationale» et a affirmé, sans aucun fondement, qu’elles pouvaient transmettre des données à la Chine.
Naturellement, tout observateur expérimenté et honnête devrait savoir que la rhétorique des «menaces pour la sécurité nationale» est toujours utilisée pour justifier, souvent sans preuve, l’inscription d’un produit ou d’un service chinois sur liste noire et son exclusion du marché américain. La société Huawei, parmi d’autres entreprises chinoises, a fait l’objet de ce type de traitement.
Cette rhétorique frôle souvent l’hystérie, et Rick Scott, sénateur représentant la Floride, en est un exemple récent : il a déclaré que l’ail exporté par la Chine constituait une menace pour la sécurité nationale. Il s’agit peut-être d’un cas isolé, mais lorsqu’il s’agit de technologie, tout ce qui vient de Chine est généralement accusé d’espionnage, avec la paranoïa au centre du consensus politique pour justifier des mesures aussi sévères.
Empêcher Pékin de progresser dans la chaîne de valeur mondiale
La politique étrangère de l’administration Biden consiste en réalité à tenter de bloquer les avancées technologiques et industrielles de la Chine afin d’empêcher Pékin de progresser dans la chaîne de valeur mondiale et d’éroder la domination américaine dans des secteurs clés, et par conséquent, de saper l’hégémonie des États-Unis.
Les efforts de la Maison Blanche ont surtout porté sur le démantèlement de l’industrie chinoise des semi-conducteurs, en mettant en place un nombre toujours croissant de mesures de contrôle sur les exportations pour tenter de priver les entreprises chinoises de l’accès aux semi-conducteurs avancés et aux équipements de leur fabrication. Jake Sullivan, conseiller américain à la sécurité nationale, a baptisé cette stratégie de «small yard, high fence» («petite cour, haute clôture»).
Les États-Unis sont connus pour leur protectionnisme à l’égard de leur industrie automobile sur tous les fronts, avec une approche sévère tant à l’égard de leurs amis que de leurs adversaires. Ces dernières années, une impulsion politique a été donnée pour faire progresser l’industrie des énergies renouvelables, ce qui a entraîné une hausse de la demande de voitures électriques, de batteries, de panneaux solaires et d’autres produits partout dans le monde.
La Chine s’est retrouvée au premier rang des producteurs et exportateurs de produits liés aux énergies renouvelables sur la planète, dépassant largement le Japon pour devenir le premier exportateur mondial d’automobiles. La demande de voitures électriques chinoises est en plein essor.
La Chine a également réussi à exploiter des vides juridiques en fabriquant ses voitures au Mexique
Même si les voitures fabriquées en Chine sont déjà soumises à des droits de douane de 25 % aux États-Unis, les prix compétitifs et moins élevés de ces modèles ne sont guère dissuasifs et leur nombre ne cesse d’augmenter. De plus, la Chine a également réussi à exploiter des vides juridiques en fabriquant ses voitures au Mexique, ce qui leur donne le droit d’entrer dans le cadre de l’accord de libre-échange nord-américain (ALENA) et de bénéficier ainsi de droits de douane encore moins élevés. Cette situation soumet l’administration Biden à une pression politique et, à l’approche des élections, elle sera naturellement encline à faire preuve de fermeté à l’égard de la Chine dans les mois à venir.
En effet, il sera confronté à un adversaire politique qui appelle à adopter une attitude plus rigoureuse envers la Chine et qui a déjà, lors de sa précédente présidence, fait évoluer la politique économique américaine en faveur du protectionnisme. En d’autres termes, Biden sera soumis à des pressions politiques qui l’obligeront d’adhérer du bout des lèvres aux idées de Trump dans le domaine économique pour contrebalancer Trump lui-même. Pour obtenir les votes des travailleurs américains, il doit montrer qu’il lutte pour les emplois américains, c’est pourquoi le ciblage des véhicules électriques chinois sera à l’ordre de jour. On pourrait ajouter que les États clés dans l’industrie automobile tel que le Michigan, peuvent lui faire gagner ou perdre les élections, ce qui a coûté l’élection de 2016, à Hillary Clinton, par exemple.
Hystérie antichinoise à la Maison Blanche
Bien entendu, c’est pour cette raison que la Maison Blanche se plonge également dans une hystérie antichinoise, notamment en affirmant que Pékin contrôlera à distance des voitures électriques et intelligentes pour bloquer les routes et systèmes américains, entre autres choses. La politique américaine se caractérise par le recours aux diffamations, à la peur et à l’hystérie afin d’obtenir l’approbation des politiques, particulièrement dans l’environnement polarisé d’aujourd’hui.
Ainsi, même si les relations sino-américaines ont été calmes aux plus hauts niveaux dans les premiers mois de 2024, on peut s’attendre à ce que cette année devienne turbulente et imprévisible, comme c’était le cas en 2020, sans même prendre en compte la situation encore plus chaotique de la pandémie de Covid-19. Quoi qu’il en soit, au niveau macro, les États-Unis ne veulent pas non plus que la Chine domine les industries globales ou, comme l’a dit Biden, « les technologies du futur ». Ainsi, même si les États-Unis accusent un énorme retard sur la Chine dans la fabrication de véhicules électriques, ils peuvent toutefois prendre des mesures visant à protéger leurs propres marchés.