Le président russe Vladimir Poutine tiendra le 16 avril sa 13e séance de questions-réponses avec la population. Cette session télévisée est un peu similaire au discours sur l'état de l'Union aux Etats-Unis en terme d’objectif, mais porte en même temps un degré d’interaction. Elle se tient presque chaque année depuis 2001.
Le show se concentre sur les affaires intérieures, le président fait état des réussites accomplies par le gouvernement et reconnait les problèmes. Cependant, ses commentaires concernent aussi la position internationale de la Russie, la vie privé du président ou même des questions philosophiques.
En 2013, Vladimir Poutine a battu son record de durée - 4 heures 47 minutes. Au cours de la séance, le président a utilisé un humour parfois à la limite du vulgaire, mais souvent en jouant avec les mots.
La chaîne RT a répertorié les 10 moments les plus remarquables des sessions précédentes.
Jouer le rôle du Père Noël
Les questions que les russes posent au président sont en fait locales ou intimes ou bien elles émergent de tels problèmes, ce qui fait partie du show. En même temps il a l’occasion de jouer le rôle d’un personnage de conte qui exauce les vœux des enfants qui le questionnent.
Le premier épisode de ce genre a eu lieu en 2012 quand une petite fille venant de la ville russe d’extrême orient de Birobidjan a demandé au président pourquoi les autorités de sa ville ont construit sur la place principale un arbre artificiel dans au lieu d’en faire venir un vrai.
«A vrai dire, je ne sais pas comment cela s’est-il produit. C’est bizarre, surtout dans votre région», a indiqué Poutine en ajoutant que le gouverneur de la région qui célébrait son anniversaire ce jour-là devra présenter un arbre de Noël véritable à toute la ville.
L’accès de la femme à Internet
Lors d’un marathon annuel de questions-réponses, Vladimir Poutine est entré dans les détails de sa vie privée, un sujet qu’il évite habituellement et se donne beaucoup de mal à essayer de cacher au public. La question était si ses filles utilisaient souvent Internet ? Il a répondu que oui, en indiquant qu’elles devaient éviter de trop le faire.
«Ma femme arrange tout ça de façon assez optimale et effective. Elle invente un mot de passe et jusqu’à ce qu’elle le tape, personne ne peut accéder à Internet à la maison», a-t-il expliqué. Poutine a ajouté que sa désormais ex-femme Ludmila n’a jamais révélé le mot de passe, pas même à lui.
Des lapsus freudiens
En tant qu’orateur expérimenté qu’il est, il fait parfois d’énormes gaffes. Par exemple, en 2010, il s’est prononcé contre les débats entre candidats au cours de la campagne électorale en Ukraine, en disant que certains politiciens pourraient recourir à des «slogans antirusses et sionistes». Le Kremlin a expliqué plus tard qu’il s’agissait plutôt de l’antisémitisme que du Sionisme.
Mais l’année la plus productive pour la session annuelle de questions-réponses fut 2006. Lors de la séance Poutine a indiqué que «personne n’a besoin de la Russie» au lieu de dire «personne n’a les dettes de la Russie» et a promis de «continuer à maintenir l’écart de rémunération entre les riches et les pauvres» au lieu de promettre de le restreindre. De plus, il a affirmé par erreur que la Géorgie a volontairement proposé de rejoindre la «Fédération de Russie», quand le pays s’appelait alors l’«Empire russe», du temps où la Géorgie a demandé de devenir une partie constitutionnelle de l’Empire à la fin du XIXe siècle.
Pas de chasse aux traîtres
Le comportement habituel de Poutine et sa réputation de politicien calculateur portent à croire qu’il ne laisse jamais l’émotion influencer ses actes. Le président, lui-même, a dit qu’il fallait mettre ses émotions de côté pour remplir les fonctions d’homme public.
Cependant, il s’est déjà laissé submerger par les émotions, comme par exemple en 2010. A cette époque, les États-Unis venaient de révéler l’existence et d’expulser 10 espions russes, les médias concentrant leur attention sur la jeune et belle espionne Anna Chapman. Le réseau d’espionnage a été démantelé par un autre agent russe de renseignement qui a fait détection. Poutine, en tant qu’ancien agent de renseignement, a salué ces femmes et ces hommes.
«Nos agents de renseignement ont sacrifié leur vie pour servir la Mère Patrie. Ils ont dû apprendre une langue étrangère, être séparés de leurs familles, sans avoir la possibilité de rentrer chez eux et enterrer leurs proches. Pensez-y une minute», a déclaré le président russe.
«Et voilà cet animal les a trahi. Comment va-t- il vivre avec cela toute sa vie, comment regardera-t-il ses enfants dans les yeux, ce porc ?», a-t-il souligné. «Peu importe combien d’argent il a reçu pour ça, il s’étouffera avec».
Cependant, la Russie ne se conduira pas de façon soviétique et n’enverra pas d’assassins à ses trousses. La punition sous forme d’exil pour elle ou lui sera suffisante.
Parler chiffons avec Snowden
Pour d’autres occasions, le passé de Poutine dans le KGB a été source de plaisanterie. L’année dernière il a parlé chiffons avec le lanceur d’alerte Edward Snowden, qui a reçu l’asile en Russie après avoir révélé au monde un système de surveillance global mis en place par le gouvernement américain et ses alliés. Snowden a posé une question en téléconférence.
«Monsieur Snowden, vous êtes un ancien agent, J’ai moi-même travaillé dans le renseignement. Donc parlons de façon professionnelle», Poutine a commencé ainsi à répondre sur le thème de collecte de données privées.
Le président a assuré que la Russie n’a pas mis en place (ni ne souhaite le faire) un système d’espionnage des communications des citoyens à grande échelle.
L’ours russe de la Taïga
Parfois, pour décrire les questions politiques, Vladimir Poutine a recours à la métaphore. L’année dernière il a comparé la Russie avec un ours qui vit dans la forêt sibérienne, la Taïga. Cet ours qui garde son terre mais qui n’en veux pas plus.
«Dès qu'on arrive à enchaîner l'ours», a-t-il souligné en faisant référence à quelque pays étranger qui cherche à affaiblir la Russie, «Ils lui enlèveront les griffes et les dents. C'est-à-dire la force de dissuasion nucléaire en termes actuels».
«Dès que cela arrive, personne n’aura plus besoin de l’ours. Ils l’étoufferont et commenceront à mettre leurs mains sur la Taïga. Nous avons entendu ces communiqués des responsables occidentaux disant que l’appartenance de la Sibérie à la Russie n’est pas juste», a-t-il poursuivi.
Un peu plus tard, il a commenté une question sur l’Alaska, qui faisait partie de l’Empire russe avant d’être vendu aux Etats-Unis.
«Faïna Ivanovna, ma chère, pourquoi avez-vous besoin de l'Alaska ?», a-t-il répondu à la question de la femme âgée. «Nous sommes dans un pays nordique : 70% de notre territoire se situe au nord et à l'extrême-nord. En Alaska, il fait froid aussi. Alors, ne nous emballons pas.
Jeunes flambeurs en Lamborghini
Les commentaires sarcastiques représentent quelque part une marque de fabrique pour Poutine et sa séance-marathon de questions-réponses lui donne beaucoup d’opportunité d’exprimer ses mots d’esprit. En 2009, il a réprimandé les nouveaux russes en parlant d’un scandale qui impliquait des jeunes hommes russes avec des voitures de sport, des cascades imprudentes sur les chemins de Suisse, pour terminer par la collision avec la voiture d’un vieil allemand.
«A l’époque soviétique, certaines personnes montraient leur richesse en ayant des dents en or, préférablement l’incisive. Les Lamborghinis et les autres breloques de ce genre sont comme les dents en or. Ces gens qui se vantent de leur richesse, quand des millions de russes vivent modestement, ne se différencient pas de ceux avec les dents en or», a-t-il dit.
Qui veut le poste de Poutine
En 2009, un auditeur s’est proposé de prendre le poste de Poutine qui était Premier ministre de la Russie ce temps-là. L’homme a dit que cela permettra à Poutine d’abandonner la politique et de se reposer.
«Vous serez mort avant que ça n’arrive», fut la réponse à cette invitation à prendre sa retraite.
«Mais si quelqu’un ressent le besoin de travailler, nous pouvons considérer la question et lui proposer un poste à la hauteur de son potentiel»
Le sénateur McCain est devenu fou au Vietnam
De temps en temps Vladimir Poutine devenait dur dans sa critique. Il a accusé quelques membres de l’opposition russe d’avoir faim de pouvoir et d’argent, et a insinué qu’un ex-magnat pétrolier envoyait des gens à la mort et a même dit en 2011 que le sénateur américain John McCain est «devenu fou» pendant sa captivité lors de la guerre au Vietnam.
«Monsieur McCain a été emprisonné au Vietnam et a été mis pas juste en prison mais dans un trou! Il y est resté pendant plusieurs années. Toute personne deviendrait folle après avoir vécu ça !», a commenté Vladimir Poutine après que McCain a dit que le président russe risquait de connaitre le sort du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi.
Kadhafi a été brutalement exécuté par les rebelles soutenus par les Etats-Unis après que la campagne aérienne de l’OTAN a détruit son armée et l’a contraint à fuir.
«C’est un fait connu que monsieur McCain luttait au Vietnam. Je pense qu’il avait assez de sang civil sur les mains. Ne peut-il pas vivre sans des scènes horribles comme l’exécution de Kadhafi ?», lui a lancé Poutine.
Un journaliste ivre questionnant Poutine
Probablement l’épisode le plus étrange de la 12ème session des réponses s’est produit l’année dernière quand un journaliste provincial a demandé le soutien de Poutine à un producteur local de boissons non alcoolisées. Le journaliste avait un défaut de prononciation c’est pourquoi un grand nombre de commentateurs a conclu qu’il était ivre.
Une inondation de commentaires sarcastiques s’est déversée quand une publicité de cette boisson a été trouvée sur YouTube. La pub était «osée» : elle présentait des filles topless et des flots de boisson s’écoulant d’un acteur masculin dans une pose quasi pornographique.
Les railleries des réseaux sociaux sur «le journaliste ivre» qui promouvait «une boisson explicite» se sont tues après que son employeur, un journal local, a révélé que l’homme a survécu à deux accidents vasculaires l’année dernière, ce qui explique ses problèmes d’élocution.
La boisson a depuis apparu sur la scène internationale, des projets de lancement en Allemagne et dans d’autres pays européens ont été annoncés cette année.