Le secrétaire général de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) a annoncé lors d’un briefing de presse en Belgique qu’il se féliciterait d’une augmentation des investissements dans la défense de la part des pays européens, mais que cela devait se faire par le biais de l’OTAN. Il a ajouté que «des doublons seraient inefficaces».
«C’est important d’éviter les doublons et je presse l’Europe de s’assurer que tout ce qu’elle entreprend se fait en conformité avec l’Alliance», a-t-il poursuivi.
L’idée de la création d’une armée de l’UE pour s’opposer à la menace russe était une idée personnelle du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker. «Cette armée nous aiderait à mieux coordonner nos politiques étrangère et de défense et à assumer collectivement les responsabilités de l’Europe dans le monde», a déclaré le président de la Commission européenne dans une interview publiée dans le journal allemand Welt am Sonntag.
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Le commandant suprême de l’OTAN, l’américain Philip Breedlove, a déclaré qu’il «ne s’inquiétait pas» des commentaires de Juncker, de même qu’il a souligné la nécessité «d’investir intelligemment» et «d’éviter les doublons».
Il a déclaré : «Je crois que nous devons célébrer la très bonne coopération que nous avons déjà avec l’UE», soulignant le travail accompli par les deux parties dans la lutte contre la piraterie dans la Corne de l'Afrique et le maintien de la paix au Kosovo, a ajouté l’agence de presse allemande Deutsche Presse-Agentur (DPA).
Les officiels russes semblaient perplexes devant le plan proposé par l’UE. Le député Leonid Slutsky a déclaré que l’UE était paranoïaque à l’égard de la Russie.
«La version européenne de la paranoïa : déclarer la création d’une armée unifiée pour contrebalancer la Russie qui ne planifie d’entamer la guerre avec personne», a-t-il twitté.
L’Allemagne fut le premier pays à soutenir l’idée de Jean-Claude Juncker. La représentante du gouvernement allemand, Christiane Wirtz, a déclaré que la chancelière Angela Merkel était ouverte au projet d’une armée commune de l’Union européenne, mais elle a souligné que ce plan ne pouvait pas être réalisé immédiatement.
Reste que même les partisans d’une armée européenne sont conscients que son financement posera des problèmes. C’est d’autant plus évident si l’on considère les problèmes que rencontre l’OTAN pour atteindre ses propres objectifs de financement.
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L’Alliance a cherché à faire augmenter les dépenses liées à la défense des pays de son propre bloc et ainsi fait pression sur ses membres pour qu’ils allouent au moins 2% de leur PIB à la défense. En septembre, deux membres de l’OTAN seulement ont pu atteindre cet objectif ; les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Pourtant, selon un groupe de réflexion, la Grande-Bretagne, un des plus grands partisans de l’Alliance atlantique, risque d’avoir des problèmes pour atteindre cet objectif après les élections générales du mois de mai prochain.
Une étude, conduite par European Leadership Network (ELN), prévoit que le budget de la défense de la Grande-Bretagne pour les années 2015-16 retombera probablement à 1,88% du PIB, soit son niveau le plus bas depuis la chute du mur de Berlin. Selon le site web officiel de l’OTAN, son budget militaire pour 2014 s’élevait à 1,4 milliards d’euros.
L’ancien vice-président du parlement belge, Lode Vanoost, a déclaré que cette décision permettrait d’envoyer un signal à Washington. «En fait, cette idée a des précédents historiques. Juste après la Seconde Guerre mondiale, au début de la Guerre Froide, on a voulu créer la Communauté européenne de défense, qui a échoué en 1954 et c’est ainsi qu’est née l'Union de l'Europe occidentale. Cette idée n’est donc pas neuve du tout».
«Aujourd’hui, le contexte est bien sûr différent. Les forces conservatrices en Europe veulent se définir comme une entité séparée des Etats-Unis. Cette idée est dans l’air. Elle ne se définit pas seulement en opposition à la Russie, mais aussi en opposition aux Etats-Unis. Les forces conservatrices n’aiment pas l’idée d’une Amérique qui domine l’Europe», a-t-il déclaré à RT.
Alexander Neu, un député allemand du Bundestag appartenant au parti Die Linke [La gauche], a affirmé qu’une armée européenne était nécessaire pour relâcher l’emprise de l’OTAN sur le continent.
«L’OTAN est un outil de l’influence américaine en Allemagne et dans l’UE. C’est un instrument qui permet aux Etats-Unis de mettre en œuvre leur programme en Europe. Une armée commune de l’UE remettrait en question la position dominante des Etats-Unis au sein de l’OTAN», a déclaré le député allemand.