Ainsi que l'a rapporté l'AFP le 18 mai, la cour d'appel de Paris a confirmé la mise en examen de l'entreprise Lafarge, mise en cause pour avoir financé des groupes armés en Syrie dont l'organisation djihadiste Daesh.
Dans le cadre d'une information judiciaire ouverte en juin 2017 et objet de nombreux rebondissements procéduraux, le groupe Lafarge, désormais filiale d'Holcim, est soupçonné d'avoir versé en 2013 et 2014, via une filiale, plusieurs millions d'euros à des groupes terroristes, dont l'organisation Daesh, ainsi qu'à des intermédiaires, afin de maintenir l'activité d'une cimenterie en Syrie à Jalabiya alors que le pays sombrait dans la guerre.
Le groupe avait investi 680 millions d'euros dans la construction de ce site, achevé en 2010.
La cour d'appel a suivi sur ce point les réquisitions du parquet général qui estimait que l'entreprise avait «financé, via des filiales, les activités de Daesh à hauteur de plusieurs millions de dollars, en connaissance précise des agissements».
«Mise en danger de la vie d'autrui»
Contre cette fois l'avis du parquet général, la cour d'appel a prononcé le maintien de la mise en examen de Lafarge pour «mise en danger de la vie d'autrui», c'est-à-dire des ex-salariés syriens qui ont été amenés à continuer leur activité dans la cimenterie de Jalabiya alors que la région était en proie à la guerre civile.
Le groupe avait obtenu de la cour d'appel de Paris en novembre 2019 l'annulation de sa mise en examen en 2018 pour «complicité de crimes contre l'humanité».
Mais en septembre 2021, la Cour de cassation, plus haute juridiction judiciaire française, avait cassé cette décision de la cour d'appel, ainsi que le maintien de la mise en examen du groupe pour «mise en danger de la vie d'autrui».
Elle avait renvoyé ces deux questions devant la chambre de l'instruction, dans une composition différente. Les avocats de Lafarge, Me Christophe Ingrain, Rémi Lorrain et Paul Mallet, n'ont pas souhaité commenter.
Les parties civiles ont salué une décision «emblématique» ainsi qu'une «étape importante» dans cette information judiciaire ouverte en juin 2017.
Pour rappel, selon une note de la DGSE remontant à 2014 et révélée par Libération à l'été 2021, l’Etat français aurait eu connaissance d’un accord passé entre le cimentier et Daesh.