Ce 19 mars, l'armée russe a déclaré avoir tiré des missiles hypersoniques en Ukraine. Leur recours en combat est une première, en pleine course mondiale pour se doter de ces armes qualifiées d'«invincibles» par Vladimir Poutine.
Le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konachenkov, s'est exprimé sur la situation en ces termes : «Le 18 mars, un grand entrepôt souterrain de missiles et de munitions de l'aviation ukrainienne a été détruit à l'aide du système aérien de missiles aérobalistiques hypersoniques Kinjal dans le village de Déliatine, dans la région d'Ivano-Frankovsk [dans l'ouest de l'Ukraine].» Le porte-parole a également précisé que, dans la nuit du 18 au 19 mars, «les avions russes opérationnels, tactiques, militaires et sans équipage ont frappé 69 installations militaires en Ukraine». La Russie n'avait jusque-là jamais fait état de l'emploi de ce missile balistique, que ce soit en Ukraine ou en Syrie. Cette arme dénommée Kinjal («dague», en russe) a cependant été déployée de nombreuses fois lors d'exercices depuis le premier test réussi en 2018.
Un fleuron de l'armée russe dix fois plus rapide que la vitesse du son
Ce type de missiles défie selon Moscou les systèmes de défense anti-aérienne, car sa vitesse – jusqu'à Mach 10, soit 12 000km/h – et sa manœuvrabilité le rendent difficile voire impossible à intercepter, même si certains experts militaires occidentaux ont estimé que la Russie pouvait exagérer les capacités de cette arme air-sol.
La cible frappée ce jour – un entrepôt souterrain – semble tout indiquée pour les Kinjal, selon Vassili Kachine. «De telles infrastructures sont difficiles à détruire avec des missiles classiques. Le missile hypersonique a lui une capacité de pénétration et une puissance destructrice plus importantes du fait de sa très haute vitesse», précise-t-il.
Pour l'expert militaire russe Pavel Felgenhauer cité par l'AFP, le recours au Kinjal ne donne pas un avantage stratégique à la Russie en Ukraine, en revanche l'effet psychologique est certain, Moscou déployant là l'un de des fleurons de son industrie de l'armement.
Des armes mises au point pour être «invincibles»
Ces missiles Kinjal et les missiles de croisière Zircon – tirés depuis des navires de surface et des sous-marins – appartiennent à une famille de nouvelles armes développées par la Russie et que Vladimir Poutine qualifie d'«invincibles».
Le joyau de l'armée russe est le planeur hypersonique Avangard. Pouvant emporter une charge nucléaire, il vole jusqu'à 33 000 km/h et change de façon imprévisible de cap ou d'altitude, le rendant quasiment impossible à intercepter.
Testés avec succès en 2018, les Kinjal ont atteint, lors des essais, toutes leurs cibles à une distance pouvant atteindre 1 000 à 2 000 km, selon le ministère russe de la Défense. Mais cette portée est démultipliée car ils peuvent être emportés par l'aviation, notamment des MiG-31. La Russie est le premier pays au monde à avoir développé des armements hypersoniques. Leur mise en service a conduit d'autres pays à accélérer leurs programmes hypersoniques, entraînant une course aux armements dans ce domaine.
La Corée du Nord a affirmé en développer et en avoir testé, tout comme la Chine. Cette dernière a pris de court les Occidentaux avec l'essai d'un planeur hypersonique, capable de se déplacer à une vitesse supérieure à Mach 5 – soit plus de 6 000 km/h – qui a fait le tour de la Terre en orbite avant de descendre vers sa cible.