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Reconnaissance de Donetsk et Lougansk : l'OTAN condamne, Washington et l'UE préparent des sanctions

Jugeant que la reconnaissance par la Russie des républiques de Donetsk et Lougansk constituait une violation de l'intégrité territoriale de l'Ukraine, l'UE et Washington ont annoncé des sanctions. Une issue anticipée par Moscou.

Dans la foulée de l'annonce par la Russie de reconnaître les républiques autoproclamées de Donetsk et Lougansk, les chancelleries occidentales ont dénoncé ce qu'elles considèrent être une «violation du droit international» et annoncé des sanctions à venir.

«La reconnaissance des deux territoires séparatistes en Ukraine est une violation flagrante du droit international, de l'intégrité territoriale de l'Ukraine et des accords de Minsk. L'UE et ses partenaires réagiront avec unité, fermeté et détermination en solidarité avec l'Ukraine», ont ainsi déclaré dans deux tweets le président du Conseil européen, Charles Michel, et la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen.

Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a pour sa part annoncé son intention de soumettre aux ministres des Affaires étrangères de l'UE des mesures prévues dans le paquet de sanctions préparé en cas d'agression militaire de l'Ukraine par la Russie.

«S'il y a annexion, il y aura des sanctions et s'il y a reconnaissance, je mettrai les sanctions sur la table et les ministres décideront. Nous avons un paquet. Il y a différentes mesures et le degré de leur mise en œuvre dépend du niveau d'agression», a précisé Josep Borrell.

A ce titre, le président français Emmanuel Macron a demandé des «sanctions européennes ciblées», dénonçant «une violation unilatérale des engagements internationaux de la Russie et une atteinte à la souveraineté de l'Ukraine», dans un communiqué de l'Elysée.

Côté américain, la Maison Blanche a annoncé des sanctions contre les Républiques autoproclamées de Donetsk et Lougansk, avertissant que d'autres mesures étaient prêtes si nécessaire. Le président Biden va «publier un décret qui interdira tout nouvel investissement, échange ou financement par des personnes américaines à destination, en provenance ou dans les régions [de Donetsk et Lougansk]», a ainsi indiqué sa porte-parole, Jen Psaki.

Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a estimé que la décision russe méritait une réponse «ferme» et «rapide». Il a également fait savoir dans un communiqué que «pour des raisons de sécurité, le personnel du département d'Etat actuellement à Lviv passera la nuit en Pologne».

Les services du Premier ministre britannique, Boris Johnson, ont annoncé qu'un réunion de crise sur le sujet devrait se tenir dans la matinée du 22 février afin de décider d'un «important paquet de sanctions». «Le Premier ministre a également indiqué qu'il envisagerait d'envoyer davantage de soutien défensif à l'Ukraine», a également fait savoir Downing Street dans un communiqué.

La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a regretté dans un communiqué que, selon elle, Vladimir Poutine «reni[ait] tous ses engagements» vis-à-vis de la communauté internationale. «Nous mettons expressément en garde contre toute nouvelle escalade militaire de la part de la Russie», a-t-elle ajouté, expliquant que la décision russe était, d'après elle, une «violation flagrante du droit international».

Le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, a estimé que la décision russe «équiva[lait] à un rejet du dialogue et à une violation flagrante du droit international».

Le ministre lituanien des Affaires étrangères, Gabrielius Landsbergis, a regretté la décision russe, qui, d'après lui «prouve un mépris total du droit international et des chartes de l'ONU». «Je reste convaincu qu'une telle escalade doit être sanctionnée», a-t-il ajouté.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan, cité par l'agence Anadolu, a déclaré : «Nous considérons cette décision comme inacceptable. Nous appelons les parties concernées à faire preuve de bon sens et à se conformer au droit international.»

Le secrétaire général de l'OTAN Jens Stoltenberg a quant à lui condamné la décision russe dans un communiqué. «Les Alliés demandent instamment à la Russie, dans les termes les plus forts, de choisir la voie de la diplomatie, de renoncer immédiatement à son renforcement militaire massif en Ukraine et autour de l'Ukraine, et de retirer ses forces conformément à ses obligations et engagements internationaux», a-t-il déclaré.

Le Premier ministre australien, Scott Morrison, s'est prononcé en faveur de l'adoption de «sanctions fortes et sévères à l'encontre de la Russie».

Le Premier ministre japonais, Fumio Kishida, a «fermement condamné cette série d'actions russes». «Si une invasion se produit, nous coordonnerons une réponse forte, y compris des sanctions, en concertation avec le G7 et la communauté internationale», a-t-il ajouté.

La Syrie soutient la décision russe, la Chine, l'Inde et l'Iran appellent à la «retenue»

De son côté, le ministre syrien des Affaires étrangères, Fayçal al-Meqdad, cité par l'agence Sana, a assuré que la Syrie soutenait la décision du président russe et était prête à collaborer avec les Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk.

L'ambassadeur indien à l'ONU a appelé «toutes les parties à la retenue». «La priorité immédiate est la désescalade des tensions [...] Nous sommes convaincus que cette question ne peut être résolue que par le dialogue diplomatique», a-t-il ajouté.

La Chine a elle également appelé, lors d'une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU, toutes «les parties concernées» à la «retenue» et à «éviter toute action susceptible d'alimenter les tensions».

Même son de cloche chez le ministre iranien des Affaires étrangères Saïd Khatibzadeh. «La République islamique d'Iran appelle toutes les parties à faire preuve de retenue et à éviter toute action susceptible d'aggraver les tensions», a-t-il déclaré dans un communiqué. «Malheureusement, les interventions et les actions provocatrices de l'OTAN et principalement des Etats-Unis ont compliqué la situation dans la région», a-t-il ajouté.

Décision «nécessaire», selon Poutine

Face à ces réactions, l'ambassadeur russe à l'ONU Vassili Nebenzia, a expliqué que la Russie restait ouverte «à la diplomatie». «Pour autant, nous n'avons pas l'intention de permettre un bain de sang dans le Donbass», a-t-il ajouté, s'exprimant lors de la réunion du Conseil de sécurité de l'ONU.

Pour le président russe, cette décision était devenue «nécessaire» en raison de la volonté de Kiev de faire perdurer le conflit dans l'est de l'Ukraine, de ne pas vouloir respecter les accords de Minsk et à cause de l'absence de réponse des Etats-Unis sur les points essentiels soulevés par Moscou en décembre dernier, à savoir sur la non expansion de l'OTAN vers l'est, le non déploiement d'armes offensives à proximité des frontières de la Russie et le retour des relations Russie-OTAN sur les bases de l'acte fondateur signé en 1997.

Le chef d'Etat s'est dit prêt à faire face aux éventuelles sanctions des Occidentaux que cette décision engendrera. Selon lui, les sanctions ne sont par ailleurs pas une réponse à la situation mais davantage une stratégie plus globale des Occidentaux : «Ils trouveront toujours des prétextes, indépendamment de la situation. Le but, le seul, c'est contenir le développement de la Russie.»

Le 20 février en conférence de presse, le chef d'Etat russe avait à ce propos déjà expliqué que Moscou ne modifierait pas sa politique par crainte de sanctions, expliquant qu'elles ne sauraient être un moyen de dissuasion tant Moscou avait appris à les gérer depuis des années.