«Il faut que ça cesse», a martelé le Premier ministre canadien Justin Trudeau à propos du mouvement de protestation qui dure depuis une dizaine de jours à Ottawa, où sont toujours présent les manifestants opposés aux restrictions sanitaires. Lors d'un débat organisé en urgence le 7 février à la Chambre des communes, il a estimé que les manifestants du «convoi de la liberté» essayent de «bloquer notre économie, notre démocratie», tandis que la ville d'Ottawa a déclaré l'état d'urgence et cherche à mettre fin au mouvement.
Des manifestants se sont confiés à RT America, pour expliquer leurs motivations et contester les accusations de représenter «un grave danger et une menace pour la sécurité» des habitants, portées à leur encontre par les autorités, dont le maire de la ville Jim Watson. Selon l'un des routiers, Mike Johnson, il s'agit de réclamer le droit, pour des citoyens adultes, de «prendre leurs propres décisions, les meilleures pour leur foyer, les meilleures pour leur corps, les meilleures pour leurs enfants».
Pour un autre manifestant, Kevin Sargent, la manifestation était, pour «la première fois en deux ans», l'occasion d'entrevoir «un avenir réel pour mes enfants». Un autre chauffeur, Chad Fennel, a déclaré que la manifestation était «l'une des expériences les plus positives» de sa vie, et affirmé qu'une partie des forces de l'ordre montraient de la sympathie envers le mouvement. «Ils sont là pacifiquement, avec leurs familles», a souligné l'un des routiers, Kyle Murberry. Selon le journaliste de RT America sur place, la mobilisation ressemble davantage à un «carnaval d'hiver familial» qu'à une zone assiégée, évoquant «des châteaux gonflables, de la danse, des jeux et des buffets» organisés par les manifestants. Des scènes plus festives et bruyantes ont été filmées par d'autres journalistes.
La police d'Ottawa a tenté, en vain jusqu'à présent, de faire cesser la manifestation, en dressant des contraventions à des camionneurs, en suspendant des permis de conduire et en interdisant d'apporter tout soutien matériel (essence, etc.) aux manifestants. Sur le plan judiciaire, la Cour supérieure de l'Ontario, saisie par des habitants de la capitale canadienne, a elle ordonné aux protestataires de cesser de faire usage de leurs klaxons.
Deux visions de la mobilisation s'opposent : là où Diane Deans, membre du conseil municipal d'Ottawa, a qualifié la manifestation d'«insurrection à l'échelle nationale», les routiers et leurs soutiens mettent en avant une action pacifique et populaire. Selon le député indépendant Randy Hillier interrogé par RT America, l'image véhiculée par les autorités d'un mouvement violent est «un mensonge» qui ne viserait qu'à justifier la répression du mouvement, voire «un coup d'Etat contre notre Constitution».
Les autorités d'Ottawa continuent à rechercher des solutions pour mettre fin à la manifestation et évacuer les poids-lourds du centre-ville. Radio Canada rapporte qu'elles ont contacté des entreprises de remorquage, mais «qu'aucune [...] ne veut déplacer les camions des manifestants stationnés illégalement dans les rues du centre-ville d’Ottawa». Le maire de la ville demande désormais la désignation d'un médiateur fédéral afin d'«écouter les doléances des camionneurs». Inédit, ce mouvement des routiers canadiens fait des émules, qu'il s'agisse de la Nouvelle-Zélande ou de l'Europe, où des appels circulent pour organiser des manifestations similaires mi-février.