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Royaume-Uni : le retrait d'une plaque liée à l'esclavage dénoncé comme de la «désinformation»

Avec son souhait d'obtenir le retrait d'un plaque dans sa chapelle célébrant un donateur lié à l'esclavage, un collège de l'université de Cambridge a été accusé de «désinformation». Un juge nommé par l'Eglise d'Angleterre doit trancher l'affaire.

Un collège de l'université anglaise de Cambridge a été accusé ce 3 février de faire le jeu de la «désinformation» en voulant obtenir le retrait d'une plaque en marbre rendant hommage à un donateur lié à la traite des esclaves.

Le Jesus College souhaite retirer la plaque fixée sur un mur de sa chapelle, rendant hommage à Tobias Rustat, impliqué financièrement dans la traite des esclaves au XVIIe siècle et qui fut l'un des plus importants donateurs de cette faculté. Il veut déplacer cette plaque, sur laquelle figure un portrait de Rustat, pour l'exposer dans un autre bâtiment avec des précisions historiques. Comme la plaque se trouve dans un édifice religieux, il revient à un juge nommé par l'Eglise d'Angleterre de trancher. Des débats devant un tribunal ecclésiastique ont commencé le 2 février et sont prévus pour durer deux ou trois jours.

Pour Justin Gau, un avocat représentant 65 anciens élèves de la faculté qui s'opposent à cette démarche, comme des descendants de Rustat, ceux qui exigent le retrait de la plaque ont tout faux. «Ils ont tous été mal informés sur la vie de Rustat», a-t-il lancé lors des débats, ce 3 février. Il a souligné que son énorme fortune ne provenait pratiquement pas de ses investissements dans la traite des esclaves. Tobias Rustat avait donné environ 3 230 livres sterling (environ 500 000 livres sterling au cours actuel soit 600 000 euros) au Jesus College, principalement pour financer des bourses d'études pour les orphelins. 

«La question de savoir si le Collège a bénéficié de l'esclavage semble non prouvée ou improbable», a estimé Andrew Sutton, un ancien étudiant devenu comptable, qui a examiné les informations financières relatives à Rustat. «Je crains que le nuage de la désinformation ne plane toujours sur cet endroit», a-t-il ajouté devant le tribunal. 

A l'opposé, Sonita Alleyne, qui dirige le Collège et fut la première femme noire nommée à la tête d'une faculté des prestigieuses universités d'Oxford et Cambridge, souhaite que la chapelle deviennent un lieu ne prêtant pas à contestation. «Ce que nous voulons faire, c'est avoir une chapelle qui ne soit pas très, très problématique pour un certain nombre de personnes», a-t-elle expliqué. Cette affaire illustre la récente introspection du Royaume-Uni sur son passé colonial, dans la foulée du mouvement Black Lives Matter, qui a vu augmenter les appels pour retirer les statues et les monuments de personnages historiques liés à l'esclavage et accusés de racisme.