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75 ans pour dévoiler les documents de Pfizer ? La justice somme le régulateur américain d'accélérer

Le régulateur américain en matière de produits alimentaires et médicamenteux a été sommé par un tribunal texan d'accélérer la cadence de publication des données qu'il a recueillies pour approuver le vaccin de Pfizer aux Etats-Unis.

En dépit du peu d'écho médiatique qu'elle a pour l'heure suscité au sein du paysage médiatique traditionnel, l'information marque une nouvelle étape dans le bras de fer juridique qui oppose, aux Etats-Unis, l'association Public Health and Medical Professionals for Transparency à l'Agence fédérale des produits alimentaires et médicamenteux (plus connue sous l'acronyme «FDA»). Le 6 janvier, la FDA s'est ainsi vue sommée par la justice d'augmenter la cadence de publication des documents sur lesquels elle s'est basée pour approuver, en août dernier, le vaccin contre le Covid-19 du géant pharmaceutique Pfizer.

La FDA devra produire les documents restants à un rythme de 55 000 pages tous les 30 jours, la première production devant avoir lieu au plus tard le 1er mars 2022

En vertu du Freedom of Information Act (FOIA), une loi américaine obligeant les agences fédérales à transmettre leurs documents à quiconque en fait la demande au nom du droit à l'information, l'association Public Health and Medical Professionals for Transparency avait demandé au régulateur américain de publier au plus vite les documents ayant mené à l'approbation par elle du vaccin de Pfizer aux Etats-Unis. Mais la FDA assurait jusqu'alors ne pas être en mesure de publier plus de 500 pages par mois... ce qui aurait repoussé à 2096 l'année où serait enfin accessible l'intégralité des données réclamées. Une cadence qui ne satisfait pas aux besoins de la justice.

«La FDA devra produire les documents restants à un rythme de 55 000 pages tous les 30 jours, la première production devant avoir lieu au plus tard le 1er mars 2022», peut-on en effet lire dans un document émanant du juge texan d'une Cour de district des Etats-Unis qui, en septembre 2021, avait été saisie sur le dossier. Le tribunal avait déjà enjoint au régulateur américain de publier, d'ici le 31 janvier 2022, «plus de 12 000 pages» concernant l'approbation du vaccin de Pfizer dans le pays.

«Un calendrier considérablement accéléré qui devrait aboutir à la publication de toutes les informations dans un délai d'environ huit mois [soit] à peu près 75 ans et quatre mois plus vite que ce que la FDA a dit qu'il lui faudrait pour répondre [à une telle requête]», relève l'agence Reuters.

Pour justifier son rythme de 500 pages par mois, la FDA avançait un manque d'effectifs combiné à la nécessité d'effectuer un «examen ligne par ligne, mot par mot» avant de produire les documents.

[Un rythme] si lent que les documents ne seront pas entièrement produits avant que presque tous les scientifiques, les avocats et la plupart des Américains qui ont reçu le produit de Pfizer soient morts de vieillesse

Cette position avait eu le don d'irriter les plaignants, dont l'avocat Aaron Siri avait fait remarquer qu'il avait fallu seulement 108 jours à la FDA pour étudier les documents afin d'homologuer le vaccin... et qu'il était donc pour le moins surprenant qu'elle ait besoin de dizaines d'années pour fournir au public les informations le concernant.

L'avocat avait ainsi évoqué un rythme «si lent que les documents ne seront pas entièrement produits avant que presque tous les scientifiques, les avocats et la plupart des Américains qui ont reçu le produit de Pfizer soient morts de vieillesse».

La justice demande à la FDA de limiter le caviardage des documents

Dans son dernier ordre, le tribunal texan demande en outre à ce que le caviardage qui consiste à rendre confidentiel certains passages des données révélées ne soit réalisé qu'en cas de stricte nécessité. «La FDA devra [...] expurge[r] seulement les parties pour lesquelles un privilège, une exemption ou une exclusion est revendiqué», peut-on lire dans le document juridique en question, accessible sur le site du cabinet d'avocats de Siri & Glimstad, qui défendent ce groupe de professionnels de la santé en quête de transparence.

Parmi les premiers documents publiés pour l'heure par la FDA, figurent notamment des données récoltées par la société d'Albert Bourla durant les trois premiers mois suivant la distribution de son vaccin dans le monde. Il s'agit principalement de signalements de potentiels effets indésirables du vaccin de Pfizer effectués par plusieurs pays, en majorité les Etats-Unis.