Un appel au secours. Les Taliban souhaitent des relations pacifiées avec le reste du monde, a fait savoir le 27 novembre le Premier ministre afghan dans son premier discours à la nation, demandant aux ONG internationales d'aider l'Afghanistan à échapper à la catastrophe humanitaire cet hiver. Mohammad Hassan Akhund s'est exprimé dans un message audio de près d'une demi-heure diffusé dans la soirée sur la télévision publique RTA, quelques jours avant la reprise de négociations entre son gouvernement et des représentants américains à Doha, au Qatar. Il n'est toujours pas apparu en public depuis qu'il a été nommé chef du gouvernement le 7 septembre, tout comme le chef suprême du mouvement, le mollah Hibatullah Akhundzada, invisible depuis la reprise du pouvoir par les islamistes à la mi-août.
«Nous ne voulons pas interférer dans les affaires internes des pays étrangers, leur créer des problèmes, de l'insécurité chez eux», «et personne ne peut prouver que nous l'avons fait ces 20 dernières années», a déclaré dans son message le mollah Akhund, dont le mouvement a effectivement toujours concentré son «djihad» sur l'Afghanistan. «Nous voulons également de bonnes relations économiques avec eux», a ajouté le Premier ministre taliban, critiqué ces derniers temps sur les réseaux sociaux locaux pour son silence prolongé, alors que le pays est confronté à une grave crise économique et que l'ONU craint une «crise humanitaire majeure» à l'abord de l'hiver.
Une économie en chute libre
L'engagement des Taliban de ne pas attaquer de pays étrangers répond notamment à l'une des principales demandes des Américains : qu'ils luttent fermement contre le terrorisme et n'hébergent plus de groupes susceptibles d'attaquer l'Amérique, comme ce fut le cas avec Al-Qaïda en 2001.
Les Taliban sont revenus au pouvoir à la mi-août à la faveur du retrait militaire des Occidentaux et de l'effondrement du gouvernement afghan soutenu par ces derniers, après 20 ans de guerre sanglante. Ils avaient été chassés du pouvoir à la fin 2001 par une coalition militaire internationale menée par les Etats-Unis qui les avait punis d'avoir hébergé des leaders d'Al-Qaïda, auteurs des attentats du 11 Septembre quelques mois plus tôt.
Washington a depuis gelé les avoirs de la banque centrale afghane, et la Banque mondiale et le Fonds monétaire international ont suspendu leurs aides à Kaboul. L'économie afghane, déjà l'une des plus démunies du monde, minée par 40 ans de guerre, en plus de récentes sécheresses, et jusque-là portée à bout de bras par l'aide internationale, est en chute libre.
Aider notre nation épuisée
A Doha, les Taliban réclameront à nouveau la levée de ces sanctions, et la reprise de l'aide internationale. «Nous nous noyons sous les problèmes en essayant d'avoir assez de force pour extirper notre peuple de la misère» et «demandons aux ONG internationales de ne pas retenir leur aide» pour «aider notre nation épuisée», a expliqué le mollah Akhund. Faute d'aide bilatérale massive – aucun pays étranger n'ayant encore reconnu les Taliban car jusqu'ici associé par les Occidentaux au terrorisme –, le circuit des ONG est actuellement l'un des plus pratiques pour acheminer de l'aide en Afghanistan.
Les Américains veulent également que les Taliban diversifient leur gouvernement et respectent mieux les droits des minorités et ceux des femmes et des filles, en partie privées d'éducation et d'emploi depuis leur retour au pouvoir. Le mollah Akhund a annoncé espérer que davantage de filles puissent retourner à l'école, tout en affichant sans fard sa préférence pour une «éducation islamique» plutôt que «moderne».