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Immigration : la Hongrie à nouveau condamnée par l'UE pour sa loi «Stop Soros»

La CJUE a rendu un arrêt le 16 novembre qui condamne Budapest pour sa législation qui fait du soutien aux demandeurs d'asile une infraction pénale. La Hongrie a néanmoins déclaré se réserver le droit de lutter contre des ONG favorisant l'immigration.

Dans un arrêt rendu le 16 novembre, la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) a estimé que la Hongrie enfreignait le droit européen en criminalisant l'aide apportée aux demandeurs d'asile. Pour Bruxelles, Budapest a procédé à des refoulements arbitraires aux frontières depuis 2018. 

«En réprimant pénalement toute personne qui fournit une aide à l'introduction d'une demande d'asile, la Hongrie a manqué aux obligations qui lui incombent», écrit le tribunal basé au Luxembourg dans un communiqué.

La Commission européenne avait introduit un recours en manquement auprès de la plus haute juridiction de l'UE après l'adoption en 2018 d'une législation – dénommée «Stop Soros» par les autorités de Budapest – faisant du soutien aux demandeurs d'asile une infraction pénale. Son nom se référait à celui du milliardaire américain d'origine hongroise George Soros, bête noire du Premier ministre national-conservateur Viktor Orban qui l'accuse d'orchestrer par le biais de ses ONG une «immigration de masse» vers l'UE.

La loi institue une peine allant jusqu'à un an de prison pour quiconque porte assistance à une personne entrée illégalement en Hongrie depuis un pays n'appartenant pas à l'espace Schengen si la vie de l'intéressé n'est pas immédiatement en danger. Par ailleurs, le même paquet législatif limitait drastiquement la possibilité d'obtenir l'asile dans ce pays membre de l'Union depuis 2004.

Pour l'institution judicaire européenne, Budapest a également violé le droit de l'Union européenne «en rejetant comme irrecevable une demande au motif que le demandeur est arrivé par un Etat dans lequel il n'est pas exposé à des persécutions». L'instance a rejeté les arguments de la Hongrie qui borde une partie de la frontière extérieure de l'espace de libre circulation Schengen. Budapest affirme lutter contre l'immigration illégale, les demandeurs d'asile ayant traversé des pays sûrs, comme la Serbie, dans lesquels ils auraient pu demander une protection.

La CJUE appelle la Hongrie à «se conformer à l'arrêt dans les meilleurs délais». Dans un communiqué, le gouvernement hongrois dit «prendre acte» du jugement. 

La Hongrie prévoit de prendre d'autres mesures contres les ONG financées par l'étranger

«Toutefois, nous nous réservons le droit de prendre des mesures contre les activités des ONG financées par l'étranger, y compris celles qui sont financées par George Soros, qui cherchent à promouvoir la migration [et font pression sur la Commission]», a prévenu le porte-parole du gouvernement Zoltan Kovacs.

Le Comité hongrois d'Helsinki (HHC), association de défense des droits des réfugiés, s'est félicité de cette décision, tout en ajoutant qu'il ne s'était pas laissé «intimider par la menace». «Depuis que la loi a été adoptée, le HHC a aidé 1 800 demandeurs d'asile. Désormais, nous pouvons à nouveau servir nos clients sans la menace de la prison», a déclaré à l'AFP la coprésidente du HHC, Marta Pardavi, espérant que le gouvernement «ne sabotera pas l'application» de l'arrêt. 

Cette décision est la dernière en date d'une série d'arrêts contre le non respect par la Hongrie des directives européennes en matière de droit d'asile. Après s'être généralement conformé aux décisions, le pays a contesté récemment la primauté du droit européen et s'est lancé dans un bras de fer juridique avec Bruxelles. En effet, la Cour constitutionnelle de Budapest examine actuellement un autre arrêt de la CJUE sur l'asile, rendu en décembre 2020, pour savoir s'il est conforme au droit national, ce qui a poussé la Commission européenne à lancer une procédure pour «non-respect». La Hongrie encourt des sanctions financières.