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Afflux de migrants : situation explosive à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie

Les autorités polonaises, soutenues par la Lituanie, ont dénoncé un nouvel afflux de migrants qui se dirigeaient ce 8 novembre depuis la Biélorussie vers leurs frontières. Le Premier ministre polonais a convoqué une réunion d'urgence.

L'escalade des tensions frontalières se poursuit entre la Pologne et la Biélorussie. Le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki a convoqué une réunion d'urgence qui doit se tenir à la mi-journée, a déclaré à la presse ce 8 novembre le porte-parole du gouvernement, alors que les autorités locales ont affirmé que la Biélorussie se préparait à faire passer des migrants en situation irrégulière à travers sa frontière avec la Pologne.

Le porte-parole de l'Agence de sécurité intérieure polonaise a publié dans la matinée une vidéo sur Twitter montrant, selon sa description, «un important groupe de migrants» qui «se dirige vers la frontière de la République de Pologne». «La plus grande tentative à ce jour d'entrer par la force sur le territoire polonais a commencé», a-t-il ajouté.

Le ministère de la Défense nationale a par la suite diffusé une autre vidéo montrant le cortège de migrants «dans les environs de Kuźnica», un village polonais frontalier de la Biélorussie.

Plus tard dans l'après-midi, les autorités polonaises ont diffusé des images du groupe de migrants tentant d'abattre les barbelés pour passer la frontière.

La Lituanie envoie l'armée

La ministre de l'Intérieur lituanienne Agne Bilotaite a également réagi ce 8 novembre, annonçant que des gardes-frontières et des soldats étaient redéployés à la frontière polono-biélorusse, en soutien à Varsovie, «en raison des mouvements massifs de migrants illégaux». «D'autres services (police, sécurité publique) se tiennent également prêts à tous les scénarios possibles. Nous restons en contact avec les officiers polonais, partageons des informations et coopérons avec eux. Il s'agit d'une attaque contre toute l'Union européenne, et nous devons y résister par solidarité», a-t-elle ajouté.

L'UE accable la Biélorussie, Minsk dénonce les sanctions de Bruxelles

La Lituanie, la Lettonie et la Pologne ont récemment signalé une augmentation du nombre de migrants illégaux présents aux frontières avec la Biélorussie, accusant Minsk de créer une crise migratoire. Cette accusation est également portée par l'UE, selon qui le président biélorusse Alexandre Loukachenko entretiendrait une pression migratoire en représailles aux sanctions imposées par Bruxelles. C'est également le point de vue de l'OTAN, qui a jugé ce 8 novembre «inacceptable» la manière dont Minsk «utilise» les migrants, qui seraient notamment originaires d'Irak ou de Syrie.

Pourtant, un autre son de cloche se fait entendre du côté du chef d'Etat biélorusse qui assure qu'en raison des sanctions occidentales, le pays n'a «ni l'argent ni la force» de restreindre l'afflux de personnes.

«Un lourd fardeau pèse sur les autorités biélorusses», a pour sa part remarqué le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov en conférence de presse ce 8 novembre. «Nous ne doutons pas que les services des migrations biélorusses prennent les mesures nécessaires pour maintenir la situation sous contrôle juridique», a-t-il ajouté sans cacher sa «préoccupation» que la crise ne déborde sur le territoire russe.

Selon les dernières données, plus de 30 000 personnes ont tenté de se rendre illégalement de la Biélorussie vers la Pologne depuis le début de l'année. Face à la situation, le président polonais Andrzej Duda a instauré l'état d'urgence à la frontière, impliquant des milliers de soldats et policiers pour sa protection. Le parlement a également validé le projet de construction d'un mur de plus de 100 kilomètres, pour un coût de 353 millions d'euros. Une clôture à lames rasoirs a été édifiée en attendant par des soldats polonais.

Les gardes-frontières biélorusses ont dénoncé de leur côté à plusieurs reprises l'expulsion de réfugiés par la Lituanie, la Pologne et la Lettonie vers leur territoire. 

La frontière polonaise n'est pas seulement une ligne sur une carte

Des ONG dont Amnesty International ont accusé le pouvoir polonais de violer le droit d'asile international en repoussant les migrants en Biélorussie, au lieu d'accéder à leurs demandes de protection. La Pologne a déclaré que ces actions étaient légales, le Premier ministre Mateusz Morawiecki rappelant sur Facebook ce 8 novembre que «la frontière polonaise n'est pas seulement une ligne sur une carte», et qu'elle «est sacrée» car «le sang polonais a été versé pour elle».

Avant la réunion d'urgence convoquée ce 8 novembre par l'exécutif polonais, la tension était monté d'un cran supplémentaire le 4 novembre, quand la Biélorussie avait convoqué le chargé d'affaires polonais à Minsk au lendemain d'une mesure similaire de la part de Varsovie. La Pologne avait convoqué le chargé d'affaires biélorusse pour dénoncer une «provocation» après l'incursion, selon Varsovie, d'individus armés et en uniforme en territoire polonais depuis la Biélorussie.

La réaction de cette dernière à travers une mesure identique avait pour but d'exprimer sa «ferme protestation» : «La Biélorussie n'a jamais provoqué d'incident frontalier et rejette donc catégoriquement» ces allégations, avait dit le ministère dans un communiqué, estimant que «la détérioration de la situation à la frontière» était «inadmissible».