Plusieurs policiers kosovars et des civils serbes ont été blessés le 13 octobre dans le nord du Kosovo. Les heurts font suite à des opérations anti-contrebande menées par la police kosovare dans une région à majorité serbe. Selon un communiqué des forces de l'ordre repris par Reuters, dix de ses officiers ont été blessés. Selon le directeur de l'hôpital de Mitrovica (nord) cité par l'AFP, un civil serbe a été grièvement blessé par balle et hospitalisé tandis que d'autres civils serbes ont été blessés par des jets de pierre.
Ces incidents représentent un nouvel accès de fièvre dans les relations tendues entre Belgrade et le Kosovo, qui a proclamé unilatéralement son indépendance de la Serbie en 2008, et est reconnu comme Etat par les Etats-Unis et la plupart des pays occidentaux, sauf par la Serbie, la Russie, la Chine, l’Inde ou encore l’Espagne.
La plupart des personnes arrêtées sont des Albanais, la plupart des personnes recherchées sont des Albanais
Au nord de Mitrovica, des protestataires serbes ont lancé des pierres contre la police et incendié deux véhicules. La police kosovare a répliqué par des tirs de gaz lacrymogène et de grenades assourdissantes.
Le calme est revenu après le retrait des forces kosovares, qui ont annoncé l'arrestation de huit personnes et la saisie «de biens pour des centaines de milliers d'euros» entrés illégalement dans la province du Kosovo sans versement de taxes.
L'opération de police «dirigée contre aucune nationalité» en particulier, réagit Pristina
Le ministre kosovar de l'Intérieur, Xhelal Svecla, a expliqué que l'opération de police n'était «dirigée contre aucune nationalité» en particulier. «La plupart des personnes arrêtées sont des Albanais, la plupart des personnes recherchées sont des Albanais», a-t-il ajouté lors d'une conférence de presse organisée à Pristina.
Le Premier ministre du Kosovo Albin Kurti s'est, quant à lui, insurgé contre «certains médias serbes qui protègent le crime, la corruption et la contrebande, et veulent les politiser et les ethniciser». «Les groupes criminels ne seront pas tolérés et seront combattus. Nous lutterons et empêcherons la contrebande», a-t-il renchéri sur Facebook.
Dans un communiqué repris par l'AFP, le premier ministre serbe Ana Brnabić a lui «appelé la communauté internationale, l'OTAN et la KFOR [la force de l'OTAN chargée de la sécurité au Kosovo ] à réagir d’urgence» car la situation à Mitrovica est «plus que dramatique». Toujours selon l'AFP, le président serbe Aleksandar Vucic s'est rendu dans la ville de Raska près du Kosovo pour rencontrer des représentants serbes de la province et les assurer de son soutien. «Nous prions l'OTAN de faire son travail, nous prions les Albanais de ne pas tenter de mettre les Serbes au pas par la violence car nous serions obligés de protéger les vies de nos enfants au Kosovo», a-t-il déclaré.
L'UE appelle Belgrade et Pristina à discuter dans le «cadre du dialogue facilité par l'UE»
Le haut représentant de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell, a affirmé que Bruxelles était «en contact avec Belgrade et Pristina», ajoutant que «toutes les questions en suspens doivent être traitées dans le cadre du dialogue facilité par l'UE». «Les violents incidents dans le nord du Kosovo doivent prendre fin immédiatement», a déclaré le chef de la diplomatie européenne, sur Twitter. «Les actions unilatérales et non coordonnées qui mettent en danger la stabilité sont inacceptables», a-t-il rajouté.
Ces affrontements succèdent à des tensions provoquées par la décision de Pristina qui, invoquant une mesure de «réciprocité», avait décidé de bannir les plaques d'immatriculation serbes sur son territoire. Les véhicules immatriculés au Kosovo ne sont en effet pas reconnus par Belgrade. Résultat, il sont contraints de se procurer des plaques serbes temporaires pour entrer en Serbie.
En réaction, des centaines de Serbes du Kosovo avaient bloqué des routes tandis que Belgrade avait déployé des véhicules blindés près de la frontière. Un accord temporaire sur les plaques négocié à Bruxelles par les deux parties, prévoyant le déploiement pendant deux semaines dans la zone frontalière de la KFOR avait permis de débloquer la situation.