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Tunisie : la députée Abir Moussi subit deux agressions d'élus islamistes en plein Parlement

La députée Abir Moussi a été frappée à deux reprises dans l'enceinte du Parlement par des élus islamistes, alors qu'elle s'opposait à un accord financier entre la Tunisie et le Qatar. La deuxième agression a nécessité l'intervention d'un médecin.

La scène est d'une rare violence et elle a suscité la stupéfaction en Tunisie. La députée Abir Moussi, présidente du parti Destourien Libre – et anciennement membre du parti de Ben Ali – , a été frappée au visage en plein milieu de son allocution à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), le Parlement de la Tunisie, dans la matinée du 30 juin. Son agresseur, Sahbi Smara, est un député indépendant proche des religieux de la coalition de la dignité (Al-Karama). L'agression s'est produite en présence de la ministre de la Femme et de la Famille Iman Zahouani Houimel dans l'Hémicycle. 

Selon le Huffpost, les faits se sont déroulés au moment où Abir Moussi exprimait son opposition à un accord financier entre la Tunisie et le Qatar, à travers le Qatar Fund for Development (QFD), une entité gouvernementale de la monarchie.

«Va mourir, espèce de merde !»

Mais les choses ne se sont pas arrêtées là. Le site d'information tunisien Mosaïque FM a rapporté que la session plénière du Parlement a été à nouveau témoin dans l'après-midi d'une autre agression d'Abir Moussi par le député Seifeddine Makhlouf, qui a nécessité l'intervention d'un médecin pour porter secours à la victime. 

Selon le site d'information francophone Kapitalis, ce député du bloc islamiste Al-Karama a «bousculé la présidente du PDL, et l’a violentée, allant jusqu’à lui donner des coups de pieds, avant d’être retenu par son collègue du même bloc, Abdellatif Aloui». «Va mourir, espèce de merde !», aurait lancé Makhlouf, «qui n’en est pas à sa première agression contre Abir Moussi et qui n’a jamais été inquiété, ni même sanctionné par la présidence de l’Assemblée, qui s’est contentée une seule fois de publier un communiqué pour dénoncer les abus de cette coalition islamiste», ajoute Kapitalis.

Le même site rapporte qu'Abir Moussi s’est plainte de douleurs à la suite de cette seconde agression. Le médecin de l’Assemblée aurait diagnostiqué une crise de tachycardie et lui aurait recommandé du repos et de l'isolement pour reprendre son calme et faire baisser le stress.

Le gouvernement tunisien a immédiatement condamné l'agression, le 30 juin. «Suite à l'attaque contre un député à la Chambre des représentants du peuple aujourd'hui, la présidence du gouvernement exprime sa condamnation de ce comportement, qui est considéré comme une attaque contre les femmes et leurs acquis obtenus grâce aux luttes des femmes tunisiennes», dénonce un communiqué gouvernemental. Le gouvernement a affirmé à cet égard son «rejet absolu de toutes les pratiques qui violent le système démocratique et affectent la stabilité de l'Etat et le fonctionnement normal de ses institutions, d'où qu'elles viennent». Le gouvernement appelle à «se tenir à l'écart de telles pratiques, qui s'aggravent de jour en jour, et à recourir à la sobriété et à la prudence lors d'échanges de points de vue divergents».

La Tunisie, en grave crise économique et sanitaire, ajoute à ses difficultés une instabilité politique encore plus criante depuis 2019. Les dernières élections législatives ont laissé un Parlement fragmenté, sans majorité claire, où s’affrontent fréquemment le bloc laïc et le bloc religieux.