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Des drones tueurs autonomes auraient traqué des rebelles libyens en 2020, selon un rapport de l'ONU

Selon un rapport d'un groupe d'experts du Conseil de sécurité de l'ONU, des robots de fabrication turque auraient attaqué de manière autonome des rebelles libyens en mars 2020, ce qui constituerait une première mondiale.

Un rapport de l'ONU a révélé que des drones autonomes armés d'engins explosifs avaient «traqué» en Libye des combattants rebelles en fuite en 2020. Il s'agirait de la première attaque de machines autonomes contre l'homme de l'histoire. Le document date du 8 mars 2021, mais son contenu n'a été relevé dans les médias que depuis mi-mai.

Selon ce rapport rédigé par le Groupe d’experts sur la Libye du Conseil de sécurité de l'ONU, des rebelles de l'armée nationale libyenne dirigés par le commandant Khalifa Haftar battaient en retraite en mars 2020, à la suite d'un assaut infructueux contre la capitale Tripoli, lorsqu'ils ont été «traqués» par des drones sans pilote ainsi que par des «systèmes d'armes autonomes létales».

Réellement en mode d’autoguidage automatique

«Les convois de logistique et les unités des forces affiliées à Haftar qui battaient en retraite ont été pourchassés et pris à partie à distance par des drones de combat ou des systèmes d’armes létaux autonomes tels que le Kargu-2 de STM et d’autres munitions rôdeuses», explique le rapport.

Ces drones peuvent être programmés pour rechercher et attaquer des cibles, et exécuter ces instructions même si la communication avec le poste de contrôle est interrompue. «Sans qu’il soit besoin d’établir une connexion des données entre l’opérateur et la munition», précise ainsi le document du groupe d'experts, qui insiste sur le fait que les drones «étaient réellement en mode d’autoguidage automatique».

Les rebelles «n’étaient ni entraînés ni prêts à se défendre contre une utilisation efficace de cette nouvelle technologie et se sont retirés dans le désarroi», a expliqué le rapport onusien. Pendant leur retraite, «ils ont été continuellement harcelés» par ces robots tueurs.

Des engins fournis par la Turquie

Ces drones sont des engins de type quadricoptère équipés de caméras et transportant de petits engins explosifs. Laissés libres sur une zone définie pour opérer, ils identifient leurs cibles depuis les airs et plongent pour se faire exploser lors de l'impact. Les engins identifiés en Libye étaient des STM Kargu-2, déployés sur le champ de bataille libyen par les forces turques alliées au gouvernement d'union nationale soutenu par l’ONU et basé à Tripoli.

«L’introduction par la Turquie de technologie militaire avancée dans le conflit a été un élément décisif dans la guerre d’usure souvent clandestine et certainement inégale qui a entraîné la défaite des forces affiliées à Haftar dans l’ouest libyen en 2020», a noté le rapport de l'ONU, qui ajoute que son déploiement viole une résolution de 2011 du Conseil de sécurité des Nations unies interdisant aux Etats membres de s'engager dans «la fourniture, la vente ou le transfert directs ou indirects d'armes» au pays.

Les systèmes actuels basés sur l'apprentissage automatique ne peuvent pas distinguer efficacement un agriculteur d'un soldat

Le passage aux armes autonomes est prédit par les analystes militaires depuis quelques années, alors que les appels à interdire ces dispositifs se multiplient, notamment à travers la «Campaign to Stop Killer Robots», une coalition d'organisations pacifistes, de scientifiques, d'universitaires et de politiciens, qui fait pression sur l'ONU pour qu'une interdiction internationale soit adoptée.

«Les systèmes actuels basés sur l'apprentissage automatique ne peuvent pas distinguer efficacement un agriculteur d'un soldat», a prévenu l'analyste Zachary Kallenborn dans The Bulletin of the Atomic Scientists le 20 mai. «Des agriculteurs peuvent tenir un fusil pour défendre leur terre, tandis que des soldats peuvent utiliser un râteau pour renverser une tourelle de canon... Divers facteurs peuvent empêcher le drone de prendre une décision précise», a-t-il expliqué.