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«Racisme généralisé» : Londres s'excuse pour ne pas avoir commémoré la mort des soldats des colonies

Le gouvernement britannique a présenté ses excuses après la publication d'un rapport indiquant que la mort de plus de 150 000 soldats ayant combattu durant la Première Guerre mondiale n'avait pas été commémorée en raison d'un «racisme généralisé».

Le 22 avril, le gouvernement du Royaume-Uni a présenté ses excuses après la publication d'un rapport soulignant que la mort de plus de 150 000 soldats issus des colonies britanniques ayant combattu durant la Première Guerre mondiale n'avait pas été commémorée en raison d'un «racisme généralisé».

Le ministre de la Défense Ben Wallace a déclaré devant les députés vouloir «s'excuser» et «exprimer son profond regret». «Nous ne pouvons pas changer le passé, mais nous pouvons nous racheter et agir», a-t-il ajouté. 

Ce rapport a été commandé par la Commonwealth war graves commission (CWGC), un organisme chargé d'honorer la mémoire des 1,7 million de soldats du Commonwealth morts durant les deux guerres mondiales.

La CWGC a également présenté ses excuses et souligne que la mort de 45 000 à 54 000 soldats – principalement africains et indiens – pendant la Première Guerre mondiale n'a pas été commémorée comme celle de leur camarades blancs en Europe, car elles ont notamment fait l'objet de monuments collectifs plutôt que de sépultures nominatives. Au moins 116 000 autres – et potentiellement jusqu'à 350 000, originaires surtout d'Afrique de l'Est et d'Egypte – «n'ont pas été commémorés par leurs noms ou peut-être pas du tout», selon le document. 

A la base de ces décisions se trouveraient «les préjugés tenaces, les idées préconçues et le racisme généralisé des attitudes impériales contemporaines», souligne-t-il. Il cite notamment le gouverneur de la colonie devenue le Ghana, qui avait affirmé en 1923 que «l'indigène moyen [...] ne comprendrait ou n'apprécierait pas une stèle», plaidant à la place pour un monument commémoratif anonyme. 

Des «excuses sans réserve»

Pour le ministre Ben Wallace, il ne fait «aucun doute que les préjugés» ont joué un rôle envers les combattants décédés des anciennes colonies. Il a assuré que la CWGC œuvrerait à corriger le tir. Disant accepter «les conclusions et les manquements identifiés» dans le rapport, la commission a présenté des «excuses sans réserve», ayant manqué à son principe d'offrir un «traitement égal dans la mort», indépendamment de l'origine, de la religion ou du rang. «Nous reconnaissons les erreurs du passé et sommes profondément désolés, et nous agirons immédiatement pour les corriger», a ajouté sa directrice générale, Claire Horton. 

Ce rapport a été rédigé par un comité spécial mis en place par la CWGC à la suite d'un documentaire critique sur cette question, The Unremembered (que l'on peut traduire par «ceux qui sont tombés dans l'oubli»), présenté par le député travailliste David Lammy. Pour ce dernier, «aucune excuse ne permettra de réparer l'indignité subie par ceux qui ont été oubliés». Il s'est exprimé en ces termes sur Twitter : «Toutefois, ces excuses nous offrent l'occasion, en tant que nation, d'examiner ce chapitre affreux de notre histoire et de rendre hommage comme il se doit à chacun des soldats qui ont sacrifié leur vie pour nous». 

La publication de ce rapport intervient alors que le mouvement Black Lives Matters a entraîné au Royaume-Uni une réflexion sur le rapport du pays à son passé colonial. Fin mars, le gouvernement avait été critiqué après avoir publié un rapport évoquant la faible ampleur du racisme dans la société britannique, en concluant que le Royaume-Uni n'était pas «institutionnellement raciste».