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«#SofaGate» à Ankara : la Commission européenne froissée, Charles Michel tente de temporiser

Le dernier couac protocolaire en date entre l'UE et la Turquie a pris de l'ampleur sur les réseaux sociaux avec le hashtag «#SofaGate». Bruxelles reproche à Ankara d'avoir réservé un accueil diminué à la présidente de la Commission européenne.

On y est parfois confronté à l'occasion d'événements familiaux comme un mariage : la disposition des invités peut s'avérer source de tensions. En matière diplomatique, ces questions de placement se posent également avec des conséquences parfois plus lourdes comme l'a montré la rencontre entre le président turc Recep Tayyip Erdogan et les dirigeants européens Ursula von der Leyen et Charles Michel, en visite officielle à Ankara le 6 avril. 

La présidente de la Commission européenne a ainsi été confrontée à un moment de solitude en constatant que seuls deux fauteuils étaient disposés dans la grande salle prévue pour la rencontre médiatisée avec le chef d'Etat truc. Manifestant une rapide gêne face à la situation, Ursula von der Leyen s'est finalement installée sur le canapé qui lui avait été attribué, en retrait des deux hommes mais en face du chef de la diplomatie turque, Mevlut Cavusoglu. 

La scène a rapidement provoqué un vent de colère au sein de l'europarlement où les grands groupes politiques ont déploré l'image de désunion donnée à Ankara par les présidents des institutions lors de leur rencontre avec le président turc et leur ont demandé de venir s'expliquer en séance plénière. La vidéo de l'incident a été également très relayée sur les réseaux sociaux avec le hashtag #SofaGate. 

Ainsi que le rapporte l'AFP, Ursula von der Leyen a fait connaître le 7 avril son mécontentement d'avoir été placée en retrait, exigeant d'être traitée comme l'égale du président du Conseil.

Son porte-parole a affirmé que «les présidents des deux institutions ont le même rang protocolaire» mais le Conseil européen, l'organe représentant les Etats membres, a toutefois fait savoir que son président avait la préséance sur la Commission pour le protocole international.

Charles Michel évoque la «volonté manifeste de bien faire» de l'exécutif turc

Au cœur de la polémique en raison de sa passivité lors de l'événement, le président du Conseil européen Charles Michel s'est exprimé le soir même sur les réseaux sociaux dans une publication où il a notamment regretté «le traitement différencié, voire diminué, de la présidente de la Commission européenne», tout en reconnaissant aux équipes de l'exécutif turc «une volonté manifeste de bien faire». «Les quelques images [de la scène] ont donné l'impression que j'aurais été insensible à cette situation. Rien n'est plus éloigné ni de la réalité, ni de mes sentiments profonds», a en outre écrit l'ancien Premier ministre belge. 

Ankara balaie les critiques de l'UE

La Turquie a de son côté fustigé ce 8 avril des «accusations injustes» après l'affront protocolaire ressenti par la présidente de la Commission européenne à Ankara, affirmant que la disposition des fauteuils au cœur de la polémique avait été suggérée par la partie européenne.

«Les demandes de l'UE ont été respectées. Cela veut dire que la disposition des sièges a été réalisée à leur demande. Nos services de protocole se sont rencontrés avant la réunion et leurs demandes [de l'UE] ont été respectées», a déclaré le chef de la diplomatie turque Mevlut Cavusoglu avant d'ajouter : «La Turquie est un Etat profondément enraciné et ce n'est pas la première fois qu'on accueille des dignitaires étrangers.»

Le ministre turc des Affaires étrangères a également condamné les commentaires «offensants» du Premier ministre italien Mario Draghi, qui a qualifié de «dictateur» le président turc à la suite de l'incident.

Début 2021, Recep Tayyip Erdogan avait affirmé devant les ambassadeurs des pays membres de l'Union européenne qu'il souhaitait «ouvrir une nouvelle page dans les relations entre la Turquie et l'UE» après une année 2020 riche en tensions.