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Washington esquive les questions sur l’échec du programme de formation des rebelles modérés syriens

Le département d’Etat américain se trouve plutôt gêné face aux questions concernant la volte-face de sa politique syrienne. Ce fiasco n'est-il qu'un incident de parcours ou bien marquera-t-il un changement profond dans la stratégie américaine ?

Les Etats-Unis ont annoncé vendredi que le programme du Pentagone de formation des rebelles syriens touche à sa fin. Désormais Washington se concentrera juste sur l’équipement de ces forces soi-disant «modérées».

«Une pause est mis en place, alors que nous nous concentrons plus sur l’équipement des groupes qui sont aujourd’hui en Syrie dont la compétence contre Daesh a été prouvée», a indiqué le porte-parole du département d’Etat John Kirby en répondant à la question de la correspondante lors du briefing de vendredi.

«Parfois on rencontre des obstacles, des défis auxquels vous ne vous attendiez pas, ou qui étaient simplement imprévisibles», a expliqué Kirby. «Je veux rappeler aussi que cet aspect particulier du programme n’est pas suspendu de façon définitive».

La décision de mettre un terme à la formation est intervenue après que les responsables américains ont admis, malgré un budget de 500 millions de dollars consacré au programme, n’avoir entraîné qu’un petit nombre de combattants. Pire encore, certaines des armes fournies aux rebelles entraînés par les Etats-Unis sont finalement tombées entre les mains des terroristes après avoir été abandonnées par les combattants syriens dès le franchissement de la frontière turque.

Des responsables américains réticents à répondre aux questions

Il y a quelques mois, le secrétaire américain de la Défense Ashton Carter avait déclaré devant le Congrès qu’il était difficile d’identifier les rebelles «de confiance», capables de ne pas se livrer – ainsi que leurs armes – à Daesh.

La correspondante de RT Gayané Tchitchakyan a rappelé cette déclaration de Carter lors du briefing avec le porte-parole du département d’Etat John Kirby en lui demandant pourquoi le programme n’as pas marché.

Le représentant américain a préféré esquiver la question et diriger la journaliste vers le département de la Défense. «Je ne vais pas contredire l’évaluation du secrétaire de la Défense. Mais si vous l’avez déjà entendue, alors cela a probablement répondu à certaines de vos questions», a-t-il indiqué.

En savoir plus : le Pentagone réduit officiellement son programme de formation des rebelles syriens

Laissée sans réponse, Tchitchakyan a expliqué pourquoi ce sujet l’inquiète. «J’ai voulu que le département d’Etat réponde à cette question, car cette question de savoir pourquoi le programme de formation et d’équipement n’a pas fonctionné touche au cœur de la nouvelle politique de l’administration Obama. Qui les Etats-Unis vont-ils équiper ? Si la partie de formation a échoué parce qu’ils n’ont pas réussi à identifier les bonnes personnes, alors pourquoi fournir uniquement de l’équipement fonctionnera mieux ?», s’est-elle demandé.

Le département d’Etat a en effet souligné que de l’équipement militaire allait continuer à être fourni aux rebelles jugés suffisamment fiables par les Etats-Unis. Cependant, il ne peut pas expliquer comment Washington allait évaluer ce «degré de confiance».

«Je ne crois pas que nous pouvons le quantifier», a répondu Kirby à la question du journaliste Matt Lee, de savoir comment ce «degré de confiance» pouvait être mesuré. Le représentant américain a également ajouté que la mesure de confiance sera basé sur l’expérience et la connaissance de leurs activités antérieures.

Les rebelles modérés existent-ils vraiment ?

L’expert du Moyen-Orient Firat Demir estime qu’en réalité les Etats-Unis n’ont pas de compréhension de qui sont ces rebelles modérés.

«En ce qui concerne la politique des Etats-Unis en Syrie, je crois que le problème en soi c’est que Washington n’a aucune vision (vision politique sur les problèmes de la région, NDLR) et l’administration Obama n’a aucune idée sur ce qu’il faut faire», a expliqué l’expert ajoutant que le programme était voué à sa perte avant même d’avoir commencé.

L’expert a également signalé que les Etats-Unis ne savaient en fait pas qui étaient ces soi-disant rebelles modérés, c’est pourquoi ils ont réussi à ne recruter que 50-60 personnes. «Il n’y a pas de rebelles modérés. Il a fallu juste un peu de temps pour que Washington l’admette, sous la pression croissante de l’opinion publique», a-t-il conclu.