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Banques et fonds américains accusés par l’ONG Amazon Watch de financer la déforestation

Deux ONG accusent : six des plus grandes institutions financières des Etats-Unis ont versé 18 milliards de dollars de 2017 à 2020 à des entreprises responsables de déforestation et de violation des droits de l'Homme des peuples de l’Amazonie.

Dans la troisième édition de leur rapport Complicité de destruction, Amazon Watch et l'Association des peuples indigènes du Brésil (Apib) pointent l’action de six grandes institutions financières américaines BlackRock, Citigroup, JPMorgan Chase, Vanguard, Bank of America et Dimensional Fund Advisors. 

Ces groupes financiers ont, selon les auteurs du rapport, investi plus de 18 milliards de dollars (15,2 milliards d'euros) au cours des trois dernières années dans des compagnies d'extraction minière, d'énergie ou d'agro-négoce impliquées dans «une série d'abus» commis dans la plus grande forêt tropicale au monde.

«Des groupes financiers de premier plan [...] utilisent l'argent de leurs clients pour encourager le comportement irresponsable de compagnies impliquées dans la violation des droits des indigènes et la destruction de la forêt amazonienne», commente le directeur des programmes d'Amazon Watch, Christian Poirier.

«Cette complicité financière dans la destruction [de l'Amazonie] contredit les promesses en matière de droits de l'Homme faites par certaines de ces sociétés, expose leurs investisseurs à des risques importants et contribue largement aux crises mondiales croissantes en matière de biodiversité et de climat», poursuit-il.

Les auteurs du rapport ont étudié les investissements de ces firmes dans neuf compagnies brésiliennes et multinationales, notamment les groupes miniers Vale et Anglo American, les compagnies d'agro-négoce Cargill et JBS, et la compagnie d'énergie Eletronorte.

Accaparement de terres et violences contre les indigènes

Amazon Watch et l'Apib accusent ces groupes de s'accaparer des terres illégalement et d’avoir recours à la violence contre les indigènes, et de pratiquer intensivement la déforestation et l'utilisation de pesticides dangereux.

Selon ce rapport, JBS, premier producteur mondial de viande, se fournit dans des exploitations installées sur des réserves des peuples Uru-Eu-Wau-Wau et Kayabi, en Amazonie brésilienne. Le groupe minier Vale est de son côté accusé de contaminer de l'eau et de ne pas respecter ses engagements visant à compenser l'impact de ses activités en territoire indigène.

Ces conflits se sont traduits par une hausse des violences contre les peuples indigènes d'Amazonie, avec une augmentation l'an dernier de 135% des accaparement de terres et le meurtre de sept chefs de tribu. La plupart des compagnies montrées du doigt ont démenti toute irrégularité en Amazonie.

Démenti des investisseurs américains

Vale, Anglo American, Cargill et JBS ont affirmé avoir présenté des éléments qui contredisent le rapport selon l’AFP. Les groupes financiers qui investissent dans ces compagnies ont également rejeté toute irrégularité.

«La déforestation et les droits indigènes sont des questions cruciales [...] Quand les compagnies sont mal gérées ou que les progrès ne sont pas suffisants, nous [en tant qu'investisseurs] votons contre leur direction», a par ailleurs fait savoir un porte-parole de la firme de gestion d'actifs BlackRock, cité par l’AFP.

Dirigé par Jair Bolsonaro – le président brésilien autoproclamé anti-environnemental et anti-indigène – le gouvernement fédéral du pays facilite activement la crise qui se développe d’aujourd’hui

Dans l’introduction de leur rapport, les auteurs mettent directement et nommément en cause le président du Brésil en écrivant : «Dirigé par Jair Bolsonaro – le président brésilien autoproclamé anti-environnemental et anti-indigène – le gouvernement fédéral du pays facilite activement la crise qui se développe d’aujourd’hui.»

Une référence aux nombreux dérapages, parfois ouvertement racistes, du président du Brésil comme ses déclarations lors d’une intervention filmée où  il avait déclaré : « Les [Amér]indiens sont incontestablement en train de changer, ils ressemblent de plus en plus à des êtres humains juste comme nous.»

Le même président a été accusé par l’organisation internationale Human Rights Watch, de «légaliser les crimes contre les peuples indigènes», dans le cadre d’un projet de loi sur l’exploitation des ressources de l’Amazonie.

La question de la déforestation de l’Amazonie s’est invitée dans le débat sur l’accord de libre-échange négocié entre l’Union européenne (UE) et le Mercosur en juillet 2019. Dès août 2019, en marge du sommet du G7 à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques), le président de la République française a exprimé son opposition à l'accord «compte tenu de l’orientation prise par les politiques publiques de ce bloc de pays qui vont clairement à l'encontre des objectifs collectifs de l'Accord de Paris», selon une communication du gouvernement français.

Après la remise en septembre de cette année, d’un rapport sur les Dispositions et effets potentiels de la partie commerciale de l’Accord [UE-Mercosur] en matière de développement durable le gouvernement français a confirmé son opposition «au projet d’accord d’association en l’état».