Le procureur de Bergame (nord de l'Italie), Maria Cristina Rota, a auditionné le 12 juin Giuseppe Conte à la primature à Rome, dans le cadre d'une enquête sur les retards en mars dernier dans la création de «zones rouges» dans deux communes du nord du pays, alors que l'épidémie explosait. Cette audition a duré près de trois heures, selon le service de presse du gouvernement auprès de l'AFP.
La magistrate et son équipe, arrivées à la primature en début de matinée devant les caméras des journalistes, devaient également entendre les ministres de la Santé, Roberto Speranza, et de l'Intérieur, Luciana Lamorgese.
Les auditions de Giuseppe Conte et Roberto Speranza et de Luciana Lamorgese «se sont déroulées dans un climat détendu de grande coopération institutionnelle», a brièvement déclaré, en fin d'après-midi, Maria Cristina Rota en sortant de la primature. Le parquet de Bergame, épicentre de l'épidémie qui a frappé l'Italie de début février à mai et fait plus de 34 000 morts, mène plusieurs enquêtes distinctes liées à cette tragédie.
L'une d'elles défraye particulièrement la chronique ces derniers jours en Italie. Elle porte sur les retards dans la création d'une «zone rouge» comprenant deux communes de la région de Lombardie, Nembro et Alzano Lombardo, particulièrement touchées par le Covid-19. Le gouvernement central et les dirigeants de la Lombardie se rejettent la responsabilité de ce retard, qui a eu un impact dramatique avec la saturation du système sanitaire, la hausse de la mortalité et la progression du nouveau coronavirus dans cette région.
Le 10 juin au soir, Giuseppe Conte avait assuré qu'il «ferait consciencieusement état» au procureur «de tous les faits à sa connaissance», se disant «pas du tout inquiet». «Toutes les enquêtes sont les bienvenues», a-t-il assuré. Dans le cadre de cette enquête, Silvio Brusaferro, président de l'Institut supérieur de la santé (ISS) italien, qui a conseillé le gouvernement dans la gestion de la crise, a été entendu le 10 juin au soir par les magistrats de Bergame, mais rien n'a filtré sur cette audition.
Le président de la Lombardie, Attilio Fontana, et son responsable régional de la Santé, Giulio Gallera, avaient eux été auditionnés fin mai, affirmant que la décision d'établir la «zone rouge» revenait au gouvernement à Rome. Pour le ministre des Affaires régionales, Francesco Boccia, la région aurait pu d'elle-même instaurer ces mêmes «zones rouges», la loi l'autorisant.
Toute la question porte sur qui, du gouvernement central ou de la Lombardie, aurait dû, entre le 3 et le 9 mars, prendre cette décision. Les premières «zones rouges» ont été établies fin février sur décision du gouvernement italien, et ont concerné une dizaine de municipalités en Lombardie, notamment celle de Codogno, la ville du «patient numéro un».
Début mars, l'épidémie a continué de se propager, avec deux foyers plus importants, dans les deux communes de Nembro et d'Alzano, dans département de Bergame. Le Comité technique et scientifique (CTS), qui conseille le gouvernement de Giuseppe Conte, a alors proposé d'y imposer une «zone rouge», jugeant que la situation «s'aggravait dans toute la Lombardie», tandis que l'ISS préconisait à son tour le lendemain la même mesure dans ces deux communes.
Selon le Corriere, Giuseppe Conte a une nouvelle fois rencontré ces experts le 6 mars, pour finalement choisir de faire du pays entier une «zone rouge», par un décret signé le 7 mars et entré en vigueur le surlendemain.