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Twitter supprime l'hommage de l'équipe de Trump à George Floyd citant une atteinte au droit d'auteur

Le réseau social a supprimé une vidéo publiée par l'équipe de campagne du président américain, dans laquelle il rend hommage à George Floyd, affirmant qu'elle enfreignait les droits d'auteurs. L'équipe de Donald Trump dénonce une «censure».

Longtemps larvé, le conflit entre le réseau social Twitter et le président américain Donald Trump est désormais totalement ouvert, et les escarmouches fréquentes. Dernier épisode, en date le 4 juin, lorsque l'entreprise de San Francisco a décidé de supprimer une vidéo d'hommage à George Floyd publiée par l'équipe de campagne de Donald Trump.

Dans la vidéo d'environ quatre minutes, Donald Trump déplore la «grave tragédie» que représente la mort de George Floyd, accompagnant ses propos d'images de ce dernier et de manifestants pacifiques. Le chef d'Etat met ensuite en garde contre «la violence et l'anarchie» des «groupes radicaux de gauche» en diffusant des images d'émeutes et de pillages. Il décrit également la grande majorité des policiers comme étant des «fonctionnaires dévoués».

«Nous travaillons vers une société plus juste mais cela signifie construire, pas démolir. Joindre les mains, ne pas lancer les poings. Etre solidaire, ne pas céder à l’hostilité», était-il écrit dans le message accompagnant la vidéo, retweeté près de 7 000 fois, notamment par Donald Trump lui-même et son fils.

«Escalade regrettable d'un double standard»

Pour justifier son action, Twitter a affirmé que la vidéo en question enfreignait sa politique en matière de protection des droits d'auteurs. Interrogé par le média américain The Hill, un porte-parole de l'entreprise a confirmé avoir reçu une plainte en provenance d'un détenteur des droits d'au moins une des images utilisées dans la vidéo.

Une explication loin de convaincre l'équipe de campagne du président américain qui juge pour sa part qu'il s'agit d'une nouvelle «censure» à son encontre de la part du réseau social, rappelant que celui-ci avait décidé quelques jours auparavant – de façon très controversée – de signaler un message du président américain. 

«Cet incident est un nouveau rappel que Twitter établit les règles au fur et à mesure. [...] Twitter n'est jamais parvenu à expliquer pourquoi les règles semblent s'appliquer uniquement à la campagne de [Donald] Trump mais pas aux autres. Censurer le message important d'unité du président autour des manifestations en faveur George Floyd est une escalade regrettable de ce double standard», a déclaré Andrew Clark, un porte-parole de l'équipe de campagne de Donald Trump.

Twitter n'exclut pas de suspendre le compte de Donald Trump

En parallèle, le directeur de la stratégie de politique publique de Twitter, Nick Pickles, a expliqué que l'entreprise n'excluait pas de suspendre le compte de Donald Trump si le président américain continuait de publier des messages que le réseau social juge contraire à ses règles. «Chaque fois qu'un tweet d'un utilisateur est publié et nous est signalé, nous l'examinons selon nos règles», a-t-il déclaré lors d'une audition parlementaire au Royaume-Uni. «Si un utilisateur sur Twitter continue d'enfreindre nos règles, alors nous continuerons d'avoir des discussions sur toutes les voies qui s'offrent à nous», a-t-il encore ajouté.

Une menace sérieuse, à la lecture des récents événements. Le 26 mai, Twitter avait en effet décidé de mettre en garde ses utilisateurs quant à la véracité des propos tenus par Donald Trump dans un tweet sur la possibilité de fraude électorale induite par le vote par correspondance. Le réseau social avait alors décidé d'ajouter à la fin de ce tweet un message d'«information», renvoyant vers des éditoriaux de CNN et du Washington Post. Une décision pour le moins controversée, le sujet étant éminemment politique aux Etats-Unis, les démocrates étant en faveur du vote par correspondance, alors que les Républicains, preuves à l'appui, estiment qu'il peut engendrer des fraudes.

Trois jours plus tard, le réseau social était allé encore plus loin, masquant un message du président américain sur les émeutes de Minneapolis qu'il jugeait être une «apologie de la violence». Une interprétation balayée par le chef d'Etat selon qui son message signifiait exactement l'inverse.

Entre temps, le conflit a pris une tournure juridique avec la ratification par Donald Trump d'un décret visant à s'attaquer à la célèbre Section 230 du «Communications Decency Act». Pierre angulaire de l'internet américain, elle offre notamment aux «hébergeurs», telles que Facebook, Twitter ou YouTube, une immunité contre toute poursuite judiciaire liée aux contenus publiés sur leur plateforme par des tiers. Immunité dont ils bénéficient à la condition qu'ils ne se comportent pas en «éditeurs», tels que sont définis par exemple les médias, qui choisissent et éditorialisent le contenu publié sur leur plateforme, et vis-à-vis duquel ils sont légalement résponsables.

La guerre entre Twitter et Donald Trump est donc loin d'être terminée, et si le réseau social poursuit sa logique, elle pourrait déboucher sur une révolution juridique à même de bouleverser le secteur. C'est ce qu'a d'ailleurs bien compris le patron de Facebook Mark Zuckerberg, qui, contre l'avis de ses propres employés, s'est désolidarisé des décisions de Twitter, expliquant qu'il n'était pas question de masquer ou signaler les contenus publiés par Donald Trump sur sa propre plateforme.