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Le Covidthon de l’UE et de l’OMS recueille 7,4 milliards d’euros, les Etats-Unis font cavalier seul

L’Union européenne, en coopération avec l’Organisation mondiale de la santé a organisé une levée mondiale de fonds pour favoriser la lutte contre le Covid-19. Mais cette opération révèle aussi une rivalité avec les Etats-Unis.

Des promesses de dons représentant 7,4 milliards d'euros ont été formulées lundi 4 mai lors du lancement de la conférence internationale d'appel aux dons organisée par l’Union européenne en collaboration avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et d'autres pays partenaires comme la Norvège ou l’Arabie saoudite.

Sur son site, la Commission européenne précise que cette initiative est «une réponse à l'appel de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et d'un groupe d'acteurs de la santé pour une collaboration mondiale pour le développement accéléré, la production et l'accès mondial équitable aux nouvelles technologies de santé essentielles liées au coronavirus».

L'Union européenne a promis un milliard d'euros, auxquels s’ajoutent 525 millions d’euros promis par l’Allemagne et 500 millions par la France, tandis que la Fondation Bill et Melinda Gates très engagée dans la recherche d’un vaccin a promis 125 millions d’euros. Des organisations comme la Banque mondiale, ou encore des particuliers fortunés sont également invités à apporter leur contribution.

L'objectif visé était de 7,5 milliards d'euros, soit 8 milliards de dollars. Il devrait être atteint sans difficulté, car la conférence d’appels aux dons est ouverte jusqu’à la fin mai, et la Turquie, la principauté de Monaco et la Banque européenne d'investissement (BEI) par exemple, n'ont pas précisé le montant de leurs contributions.

La Chine, d'où est parti le virus, s'est engagée pour 45,6 millions d'euros. L'Afrique du Sud, représentante du continent, a promis 1,1 milliard et l'Amérique latine a fait des promesses sans les chiffrer par la voix du représentant du Mexique.

Des fonds pour les tests, les traitements et les vaccins

Les fonds collectés seront répartis en trois volets : outils de diagnostic, traitements et vaccins. Les fonds seront redistribués via des agences de l’OMS, avec laquelle l’administration du président des Etats-Unis est en délicatesse.

Les Etats-Unis n'ont pas participé à cette initiative. Donald Trump a suspendu mi-avril la contribution américaine au budget de l'OMS en accusant l'agence onusienne d'avoir «failli à ses devoirs essentiels» dans la lutte contre la pandémie, suscitant un concert de désapprobation.

L’OMS a perdu un cinquième de ses ressources, soit environ 900 millions de dollars, avec l’annonce, le 14 avril par les Etats-Unis, de l’arrêt de leur contribution financière à son budget. Le lendemain, la présidente de la Commission européenne a refusé de faire un lien avec cette décision américaine lorsqu’elle a annoncé cette visioconférence des donateurs. 

Dans le discours d’ouverture de cette conférence mondiale de donateurs, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a déclaré : «Nous devons développer un vaccin, le produire et le déployer partout dans le monde. Et nous devons le rendre disponible à des prix abordables.»

Un vaccin disponible et abordable

L’objectif d’un vaccin largement disponible et a un prix contrôlé, souligné dans l’ensemble des communications de l’Union européenne sur la «réponse globale au coronavirus» renvoie implicitement à l’incident diplomatique germano-américain récent autour du laboratoire allemand CureVac.

Le 2 mars, Donald Trump avait reçu à la maison blanche son PDG, l’Américain Daniel Menichella, invité comme une vingtaine d'autres dirigeants à une réunion sur la recherche d’un vaccin pour lutter contre l’épidémie de Covid-19. Neuf jour plus tard, le PDG de CureVac était remercié, et plusieurs ministres allemands accusaient Donald Trump d’avoir voulu faire main basse sur ce laboratoire créé par des chercheurs de l’Université allemande de Tübingen, afin de réserver aux Etats-Unis le contrôle mondial d’un vaccin contre le Covid-19. Ces allégations ont été démenties par le laboratoire. 

Mais CureVac qui recevait déjà des subventions de l’Etat fédéral allemand, a depuis reçu 80 millions d’euros de subventions supplémentaires de la part de l’Union européenne. Le laboratoire est également épaulé financièrement de longue date par plusieurs fondations, dont celle de Bill et Melinda Gates largement associée à la conférence globale de donateurs.

Les Etats-Unis espèrent gagner la guerre du vaccin et sont prêts à mettre toutes leurs forces dans la bataille

Pour beaucoup de commentateurs, la première conséquence du cavalier seul américain pourrait être une accélération des rivalités dans la course au vaccin. Plus de cent projets de recherche sont actuellement menés dans le monde, dont huit sont déjà au stade des essais cliniques aux Etats-Unis, en Chine et en Europe.

«Les Etats-Unis espèrent gagner la guerre du vaccin et sont prêts à mettre toutes leurs forces dans la bataille», souligne Isabelle Marchais dans une note publiée le 4 mai par l'Institut Jacques Delors, un important cercle de réflexion européen. Elle précise que «s’ils perdent la bataille, les Européens pourraient alors se retrouver en situation de faiblesse face aux Américains ou aux Chinois [mais qu’] a contrario, si un vaccin est produit par l’Europe et en Europe on peut imaginer que cette dernière sera prioritaire tout en étant en mesure de planifier une distribution dans les pays tiers.

La pandémie a déjà frappé plus de 3,5 millions de personnes, dont 1,5 million en Europe, et tué près de 250 000 d’entre elles dont 143 000 en Europe, selon des décomptes réalisés par l'AFP «à partir de sources officielles».