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Catalogne : la victoire des indépendantistes déjà contestée à Madrid

Les partis indépendantistes, réunis sous une même bannière, ont réussi hier soir à décrocher la majorité absolue des sièges au Parlement régional de Barcelone, promettant de conduire cette région à la scission. Une victoire rejetée par Madrid.

«Indépendance, indépendance, indépendance !», criait dimanche 27 septembre au soir une foule compacte rassemblée sur la place du Commerce de Barcelone où la coalition «Ensemble pour le oui» organisait sa soirée électorale.

En remportant la majorité absolue des sièges (72 sur 135) au sein du Parlement régional, la coalition estime qu'elle est désormais légitime pour mettre en oeuvre le programme sur lequel elle a fait campagne : conduire cette riche région du Nord-Est de l'Espagne à devenir un nouvel Etat en Europe «en l'absence totale de violence». 

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Lors de ces élections régionales anticipées, le parti de centre-droit CDC (la Convergence Démocratique de Catalogne) d'Artur Mas était associé à des partis de gauche comme ERC (La gauche républicaine de Catalogne) voire d'extrême-gauche avec la CUP (Candidature d'Unité Populaire) ainsi qu'à diverses associations citoyennes, proches du mouvement Podemos. 

Si une marée de drapeaux catalans est immédiatement venue saluer cette victoire des urnes, les électeurs de la coalition «Ensemble pour le oui» ne cachant pas leur désir de quitter au plus vite le giron espagnol, l'analyse de ce scrutin n'est pas du tout la même à Madrid. Loin de là.

«La majorité des Catalans a rejeté l'indépendance et nous allons continuer à garantir la légalité, nous allons continuité à défendre l'unité de l'Espagne» a déclaré le porte-parole du Parti Populaire Pablo Casado, au siège du parti à Madrid.  En effet, arguant que la coalition indépendantiste n'a rassemblé qu'environ 47% des voix, Pablo Casado a ainsi commenté froidement le résultat: «[Artur] Mas a échoué. Évidemment, demain, tout continue comme avant, en Catalogne».

Le président Mas, qui dirige la région depuis 2010, a exposé tout au long de cette campagne son plan permettant de conduire à l'indépendance de la Catalogne «en 18 mois», avec l'établissement d'une administration parallèle capable de reprendre les compétences jusque-là détenues par Madrid et la création d'une Banque Centrale. La Catalogne est l'une des régions les plus peuplées d'Espagne avec 7,5 millions d'habitants, et l'une des plus riches (elle produit à elle seule 1/5 des richesses espagnoles) mais c'est également l'une des régions les plus endettées avec une dette atteignant plus de 37% de son PIB.

L'Europe avait de son côté prévenu les Catalans, que s'ils devenaient indépendants, ils seraient de facto exclus de l'Union, une menace qui n'a visiblement pas douché les électeurs pro-indépendance.

Si Mariano Rajoy, le chef du gouvernement n'a pas souhaité réagir hier soir après l'annonce des résultats, ce dernier s'était exprimé il y a plusieurs semaines déjà pour tancer les velléités catalanes avec cette simple phrase : «Il n'y aura pas d'indépendance de la Catalogne». Plusieurs ministres, plus diserts que leur chef, avaient eux promis en cas de déclaration de sécession de brandir l'article 155 de la Constitution espagnole afin de «suspendre l'autonomie d'une région, si elle viole le droit». Par ailleurs, Madrid pourrait aussi être tentée de jouer le tout pour le tout et de négocier plus d'autonomie avec certaines de ses régions -dont la Catalogne- afin de les garder dans son giron. Mais la rupture n'était-elle pas déjà consommée ?

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