Une quarantaine de migrants se relaient depuis une semaine pour occuper la salle paroissiale d'une église de Grenoble, réclamant des papiers et la poursuite de leur accompagnement social. «On est arrivés au bout de ce que l'on pouvait faire comme actions d'interpellation des pouvoirs publics. Et on craignait le froid pour les jeunes à la rue», a ainsi fait savoir le 27 février à l'AFP Raphaël Beth, du Droit au logement (DAL) Isère, qui les soutient.
L'église aurait été choisie pour le symbole : Saint-Paul Sans Frontières, bâtie dans un quartier de logements sociaux des années 1960, fut la paroisse du père Jean Fréchet durant presque 50 ans (1962-2009). Cet «abbé Pierre grenoblois» y accueillait, nourrissait et aidait les sans-abris et les exclus en général. Cette paroisse est aujourd'hui en vente.
Venant du Mali, de Côte d'Ivoire et de Guinée, les jeunes présents dans l'église sont en formation pour devenir cuisinier, électricien, peintre en bâtiment, etc. «Je veux finir ma 2e année de CAP maçonnerie. J'ai un patron, ce métier me plaît beaucoup. Mais le département m'a mis en dehors du contrat !», raconte à l'AFP Bakary Camara, Malien qui serait âgé de 20 ans et serait passé par plusieurs lycées.
Associations, syndicats et partis qui soutiennent ces migrants (Ligue des droits de l'Homme, Migrants en Isère, RESF, Médecins du monde, la France insoumise, Parti communiste français) mettent en cause département et préfecture dans cette affaire. Le Conseil départemental, via sa vice-présidente chargée de l'enfance, Sandrine Martin-Grand, dément vouloir casser ces «contrats jeunes majeurs» qui permettent de les accompagner en formation jusqu'à leurs 21 ans.
Deux raisons expliquent une fin de contrat : «l'obtention du diplôme, et on les accompagne encore deux mois après», ou «un refus de titre de séjour par la préfecture», explique-t-elle. «Que les associations nous donnent les identités de ces jeunes et on pourra dire pourquoi le contrat s'est arrêté, ou on ré-examinera la situation si elle mérite de l'être».
«En 2015, dernière année avant l'arrivée massive de mineurs étrangers isolés, nous avions 315 contrats dont 105 pour des étrangers. En décembre 2019, nous en avions 667 dont 386 pour des jeunes étrangers, ça a plus que doublé», fait valoir l'élue. Le diocèse de Grenoble, de son côté, a laissé aux jeunes jusqu'au 9 mars – fin des vacances scolaires – pour quitter l'église et retrouver leurs internats. Il juge illégale l'occupation des locaux, «qui n'ont pas vocation à héberger des personnes».