Israël vient d'appeler quelques centaines de réservistes après une explosion de violence sur l'Esplanade des Mosquées. Cette décision intervient après une série d'affrontements entre Palestiniens et forces de l'ordre israéliennes aux abords du site à Jérusalem. Un Israélien est mort et plusieurs autres ont été blessés au cours de la semaine. Des milliers d'hommes ont été déployés et l'interdiction a été faite aux hommes musulmans âgés de moins de 40 de prier sur le site.
C'est l’intervention de la police pour encadrer l’arrivée massive de juifs, exceptionnellement autorisés à y entrer pour la célébration de Roch Hachana (le Nouvel An juif) qui a provoqué la colère des musulmans. Ils accusent en outre l’Etat hébreu d’ingérence.
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Un lieu trois fois saint et doublement explosif
L'esplanade des Mosquées est un point de tension constant et une question centrale au cœur du conflit israélo-palestinien.
A Jérusalem, selon que l'on soit Juif ou Musulman, ce lieu portera d'ailleurs le nom d'Esplanade des Mosquées (Haram al-Sharif) ou de Mont du Temple. Depuis 1967, date de l'annexion de Jérusalem Est par Israël, le statu quo en vigueur prévoit que les visiteurs non musulmans, juifs ou chrétiens peuvent se rendre sur le lieu, mais ne peuvent pas y organiser de prières.
Une situation que dénonce de plus en plus ouvertement une partie de la droite nationaliste-religieuse israélienne. Ceux-ci organisent de plus en plus ouvertement des visites en groupe sur l’Esplanade, ce qui provoque régulièrement des heurts avec les musulmans.
Pourtant, environ 10 900 juifs ont visité ce qu'ils appellent le mont du Temple en 2014, lieu où se dressaient, selon la Bible, le premier temple juif bâti par le Roi Salomon et le second rebâti après l'exil babylonien. Certes, ce chiffre est peu comparé aux trois millions de musulmans et 200 000 chrétiens qui effectuent chaque année la visite. Sauf que le nombre de visiteurs juifs est en constante augmentation. Ce nombre en croissance constante découle de l'essor du mouvement messianique juif, comme de revendications nationalistes et religieuses sur ce site sacré pour les trois monothéismes.
De plus en plus d'hommes politiques israéliens vont également jusqu'à proclamer la souveraineté d'Israël sur le site, telle l'actuelle ministre de la Culture, Miri Regev, qui a soutenu le droit des juifs à prier sur l'esplanade. Uri Ariel, ministre de l'agriculture et membre du parti nationaliste le Foyer Juif, est également partisan non seulement du droit de prier, mais de la construction d'un troisième temple.
La vache rousse, plus dangereuse que le nucléaire iranien
Le Grand-Rabbinat d'Israël s'est toujours opposé à une présence juive sur la place en raison des règles de pureté inhérentes au judaïsme. En effet, un Juif risquerait de fouler le saint des saints, le coeur de l'ancien temple, dont personne ne connaît la position exacte.
Pourtant, certains rabbins nationalistes ont entrepris de «purifier» le Mont du Temple en utilisant les cendres d'une vache rousse, comme la Bible le prévoit. Cette étape est indispensable afin de pouvoir construire, selon ces rabbins, le troisième temple juif.
L'institut du temple, une organisation messianique juive basée à Jérusalem et qui travaille à la reconstruction du Troisième Temple, a entrepris un élevage de génisses rousses. L'institut prépare également ouvertement la construction de l’édifice, les plans du bâtiment sont même prêts.
Mais reconstruire le temple, signifie détruire les mosquées. Ces préparatifs irritent évidemment les responsables du Waqf, l'organisme musulman parrainé par la Jordanie qui gère l’Esplanade des Mosquées, dont celle d'Al Aqsa. Celle-ci est considérée comme le troisième lieu saint de l'Islam, après la Mecque et Médine.
Le statu quo issu de 1967 est donc très fragile dans ce lieu hautement religieux. Politiquement, on se souviendra que c'est la visite sur place du Premier ministre israélien Ariel Sharon, en septembre 2000, qui avait déclenché la seconde Intifada. En octobre 2014, sa fermeture avait été considérée comme «une déclaration de guerre» par l’Autorité palestinienne.