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Disparition à Bagdad de trois Français et un Irakien de SOS Chrétiens d'Orient

Quatre membres de l'association française SOS Chrétiens d'Orient sont portés disparus depuis le 20 janvier à Bagdad. Leurs proches sont sans nouvelles et aucune rançon n'a été demandée pour l'heure. Les autorités françaises ont été alertées.

Quatre collaborateurs «expérimentés» de SOS Chrétiens d'Orient, trois Français et un Irakien, sont portés disparus depuis le 20 janvier 2020 à Bagdad, capitale de l'Irak. Aucune demande de rançon ni revendication n'a pour l'instant été reçue, a annoncé l'association le 24 janvier.

Les quatre hommes ont «disparu aux alentours de l'ambassade de France», dans le centre-ville de la capitale, a déclaré à Paris Benjamin Blanchard, le directeur général et cofondateur de l'association SOS Chrétiens d'Orient. L'organisation vient en aide à cette minorité religieuse victime de violentes persécutions dans la région. Les quatre hommes «sont des salariés expérimentés qui travaillent depuis des années avec nous», a-t-il ajouté au cours d'une conférence de presse, soulignant leur «parfaite connaissance des crises» qui secouent la région. SOS Chrétiens d'Orient a tenté vainement de les joindre dans la journée du 21 janvier avant d'alerter les autorités françaises, le 22 janvier au matin. Les identités des quatre hommes n'ont pas été révélées pour des raisons de sécurité.

«Ils étaient là pour renouveler leurs visas et enregistrer l'association auprès des autorités irakiennes», a poursuivi le directeur, précisant que SOS Chrétiens d'Orient n'était formellement enregistré qu'auprès du gouvernement régional autonome du Kurdistan, mais pas encore du gouvernement fédéral de Bagdad. «Ce sont des procédures longues et complexes», a-t-il expliqué. Sollicité par l'AFP, le ministère français des Affaires étrangères n'a fait aucun commentaire, pas plus que l'ambassade de France en Irak. «Les autorités françaises et irakiennes se coordonnent aujourd'hui pour enquêter et retrouver leurs traces», a indiqué Benjamin Blanchard qui précise être «en contact étroit» avec les familles.

Bagdad est en proie à des manifestations depuis plusieurs mois, certaines contre le gouvernement et l'influence de l'Iran, et d'autres, plus récentes, contre la présence de troupes américaines en Irak après la mort du général iranien Qassem Soleimani, tué à Badgad début janvier dans une attaque de drone américain.

«Un rendez-vous qui ne posait pas de problème particulier»

L'ONG se présente comme une association humanitaire aidant les chrétiens d'Orient, victimes de persécutions, en particulier sous l'emprise du califat auto-proclamé de l'organisation Etat islamique. Selon son site internet, elle a effectué sa première mission en Syrie en 2013, puis en Irak en avril 2014, avant d'ouvrir une mission permanente la même année à Bagdad. Elle est présente dans plusieurs points du Kurdistan irakien. Mais «depuis plusieurs jours, avant cet événement, tout le personnel avait été rapatrié à Erbil [capitale de la région autonome du Kurdistan, au nord de l'Irak] à la demande du consulat général de France, suite aux tensions entre les Etats-Unis et l'Iran qui secouent l'Irak», a précisé le cofondateur de l'association. Il a par ailleurs insisté sur la rigueur de ses opérations en matière de sécurité.

Les quatre personnels «devaient se rendre à un rendez-vous qui ne posait pas de problème particulier», a expliqué Benjamin Blanchard, indiquant que les quatre hommes ont quitté en voiture leur hôtel qui «fait partie des établissements qui, régulièrement, reçoivent du personnel international». Outre les démarches administratives, ils devaient «faire un suivi des opérations de l'association, dont l'ouverture de notre nouvelle école à Bagdad», reconstruite par l'association. Celle-ci assure avoir agi «en parfaite coordination avec les autorités consulaires pour l'organisation de cette mission». Dès 2015, l'association avait mis en place un «plan de sûreté» audité par des experts. «Nous avons créé dès cette époque un pôle sécurité mobilisable 24h sur 24 et sept jours sur sept», a ajouté le cofondateur qui relève que les procédures étaient «mises à jour et auditées trois fois par an», et que les personnels suivaient une formation obligatoire en la matière.

Durant les trois années du califat, les minorités religieuses, en particulier les Yazidis et les chrétiens chaldéens et syriaques de la plaine de Ninive – province dont Mossoul est le chef-lieu – ont été persécutées par les djihadistes, entraînant un exode. En Irak, les chrétiens, au nombre de 1,5 million avant 2003, étaient à l'été 2019 «bien en dessous des 150 000», selon l'organisation catholique Aide à l'Église en détresse (AED), une fondation internationale de droit pontifical. En Syrie, ils sont actuellement moins de 500 000 contre 1,5 million en 2011, toujours selon l'AED. En novembre, celle-ci avait toutefois fait savoir que la persécution des chrétiens avait «considérablement diminué» en Syrie et Irak, en raison notamment de «la défaite militaire de l'État islamique».

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