International

« Acte de guerre » : la nouvelle édition de Charlie Hebdo suscite la colère des musulmans

Le journal satirique Charlie Hebdo a fait son retour avec un tirage extraordinaire de trois millions d’exemplaires en un jour. Au menu des nouvelles menaces de la part des islamistes radicaux.

L’imam britannique Anjem Choudary, qui est soupçonné de liens avec des combattants islamistes radicaux, a condamné la nouvelle édition en la qualifiant d’ « acte de guerre » et de « provocation flagrante ».

De nombreuses organisations musulmanes importantes ont réagi en disant que la représentation même du prophète est un sacrilège : une organisation islamique égyptienne du nom de Dar al-Ifta a considéré le numéro comme « une provocation injustifiée contre les sentiments d’1,5 milliards de musulmans », rapporte l’AFP.

« Cette édition résultera en une nouveau déferlement de haine entre la société française et le monde oriental. L’activité de ce journal ne va pas dans le sens de la coexistence pacifique et du dialogue culturel tant souhaité par les Musulmans », a déclaré Dar al-Ifta.

L’école Al-Azhar du Caire, qui est le centre le plus connu d’enseignement de l’Islam sunnite, a dit que les dessins « alimentent la haine » et « ne contribuent pas à la coexistence pacifique des peuples ».

Tabnak, un site d’information conservateur en Iran, a écrit que « Charlie Hebdo a de nouveau offensé le prophète ».

Entre-temps, les réactions ne se sont pas fait attentendre sur des sites web d’activistes musulmans qui ont appelé à davantage de protestations contre le journal et publié des menaces anonymes d’islamistes radicaux, a signalé à Associated Press SITE Intelligence Group, un bureau américain d’observation du terrorisme.

Néanmoins, les leaders musulmans français ont appelé les membres de la communauté musulmane à rester calmes.

« Ce qui nous dérange, c’est la représentation du prophète. Il sera difficile de l’accepter pour tout musulman responsable. Mais nous ne devons pas l’interdire. » a dit Abdelbaki Attaf, un administratif de la mosquée de Gennevilliers dans la banlieue de Paris.

Le Conseil français de la religion musulmane et l’Union des Organisations islamiques françaises ont rendu publique une déclaration conjointe appelant les musulmans à « rester calmes et éviter des réactions émotives qui ne sont pas compatibles avec notre dignité… tout en respectant la liberté d’opinion, » rapporte The Local.

Hammad Hammami, chef d’une grande mosquée dans le centre-est de Paris, a dit à The Local que sa congrégation « ne veut pas jeter de l’huile sur le feu » et « trouve ces caricatures acceptables ».

Le juriste de Charlie Hebdo Richard Malka a dit à une radio française que le journal « ne vas pas lâcher pied, sinon ça n’a aucun sens ».

« Une pancarte Je suis Charlie veut dire vous avez le droit de critiquer ma religion, parce que ce n'est pas grave. », a ajouté Malka.

Trois millions d’exemplaires – à comparer avec soixante mille par semaine habituellement – ont déjà été imprimés. Les premiers lots de magazines ont été vendus en un clin d’œil, des milliers de personnes ont dû faire la queue pour s’acheter le numéro.

Charlie Hebdo va imprimer cinq millions d’exemplaires de la dernière édition pour satisfaire la demande au cours de la semaine, ont annoncé les distributeurs.

« C’était incroyable. Quand j’ai ouvert le magasin, il y avait déjà une queue de 60-70 personnes devant. Je n’ai jamais vu une chose pareille. Tous les 450 exemplaires que j’avais ont été vendus en 15 minutes », un marchand de journaux raconte à l’AFP.

Un autre marchand a raconté à The Local : « La queue a commencé à se former dès six heures du matin. En quelques minutes, tout était vendu ».

« Nous espérons recevoir un autre lot demain », a-t-il ajouté.

A la une de la nouvelle édition de Charlie Hebdo – un dessin du prophète Mohamed en larmes avec une pancarte « Je Suis Charlie » dans les mains, sous le titre « Tout est pardonné ».

« J’ai écrit " Tout est pardonné " et j’ai pleuré », a avoué aux journalistes l’auteur du dessin Renald Luzier dans les locaux du quotidien français Libération temporairement occupés par l’hebdomadaire.

« On fait confiance à l’intelligence des gens, à l’intelligence du second degré.» a-t-il dit.

L’éditorial de journal défend le sécularisme et le droit de critiquer la religion et le numéro finit sur une critique du Pape, rapporte Associated Press.

Pour le moment, le gouvernement français n’a pas réagi officiellement à la publication de la nouvelle édition de l’hebdomadaire.