14 ans après les attentats du 11 septembre, le successeur d'Oussama Ben Laden, l'égyptien Ayman al-Zawahiri, est sorti de son silence. Dans une cassette audio, dévoilée mercredi, on peut entendre le chef d'Al-Qaïda déverser des diatribes vénéneuses à l'encontre..de Daesh. Si jusqu'ici, al-Zawahiri n'avait pas ouvertement condamné la montée en puissance de l'organisation terroriste dissidente Daesh, née en Irak et prospérant en Syrie, c'est aujourd'hui chose faite.
«Nous avons préféré jusque là répondre le moins possible pour éteindre ce feu de la sédition qui ne nous concernait pas» explique ainsi al-Zawahiri «mais Abu Bakr al-Baghdadi et ses frères ne nous laissent pas le choix, car ils ont exigé que tous les moudjahidine rejettent leurs allégeances [à al-Qaïda] afin qu'ils leur prêtent serment d'allégeance à eux et pour leur prétendu califat». Puis le leader d'Al-Qaïda enchaîne sèchement «tout le monde a été surpris par l'auto-proclamation de Baghdadi comme quatrième calife de l'histoire islamique. Il l'a fait sans consulter les musulmans».
Un tacle sévère qui en dit long sur le fossé existant entre ces deux groupes terroriste rivaux. «Un coin à enfoncer» assurent les experts, pour qui cette faille doit être exploitée dans la lutte contre le terrorisme. Ainsi pour Nicholas Palarino, ex-conseiller anti-terroriste au Congrès et qui enseigne aujourd'hui à l'université de Georgetown, cette «sortie» forcée d'al-Zawahiri affaiblit la puissance d'Al-Qaïda et de Daesh. «Les musulmans modérés doivent exploiter cette faille. Les dirigeants de la Jordanie, du Koweït, de l'Arabie Saoudite ou l'Egypte peuvent argumenter sur la gué-guerre qui se jouent entre ces deux groupes de musulmans dans le monde» et ainsi tenter de juguler le flot de ceux qui partent combattre en Syrie et en Irak a déclaré cet expert à ABC News.
Une stratégie qui échappe pourtant au célèbre général Petraeus. Celui qui a mené son pays dans «une honorable défaite» comme s'amuse le Middle East Eye est donc sorti de sa réserve pour livrer une interview à CNN. Questionné sur le plan à adopter pour vaincre le terrorisme, le général fait une proposition aussi étonnante que dangereuse selon le Middle East Eye: armer des terroristes repentis pour les lancer contre Al-Qaïda et Daesh.
«La question, donc, est de savoir s'il pourrait être possible à un certain point de décoller certains combattants du Front al-Nosra [affiliés à Al-Qaïda] et de les aligner avec l'opposition modérée (soutenue par les Etats-Unis et de la coalition) pour qu'ils luttent contre le Front al-Nosra, Daesh, et [le président syrien Bachar al-] Assad» a expliqué le général Petraeus.
Une proposition qui fait malheureusement fi de toutes les expériences comparables menées par les Etats-Unis dans le passé. Ainsi, en 2007 en Irak une part de la stratégie du général Petraeus pour vaincre Al-Qaïda en Irak (AQI) consistait justement à armer et à soutenir les milices sunnites afin qu'elles cessent de combattre les Américains et qu'elle s retournent leurs armes contre AQI. Une technique qui a fonctionné mais très temporairement...puisque la majorité de ces milices sont ensuite devenues Daesh.
Dans les rangs de l'armée américaine, une «rébellion» est d'ailleurs en train de poindre, grâce notamment aux réseaux sociaux. S'opposant à une possible attaque militaire de leur pays contre la Syrie, des militaires et des haut-gradés se prennent depuis quelques heures en photos sur twitter avec des pancartes annonçant qu'ils refusent de «se battre aux côtés d'Al-Qaïda en Syrie». Tous se retrouvent sous le hashtag #Idid'tJoin