La procédure de destitution visant Donald Trump va-t-elle tourner au fiasco politique pour le camp démocrate ? C'est en tout cas le pari de la Maison Blanche qui, selon Fox News, va envoyer ce 4 octobre une lettre à la présidente de la Chambre des représentants, la démocrate Nancy Pelosi, lui demandant de tenir un vote au Congrès sur la procédure. Une démarche déjà opérée la veille par le chef de file des Républicains Kevin McCarthy, qui avait appelé Nancy Pelosi à mettre fin à l’enquête sur la destitution jusqu’à la mise en place de «règles et procédures équitables», impliquant donc la tenue d'un vote du Congrès.
Or cette option est pour l'heure fermement rejetée par la présidente de la Chambre, qui a fait savoir qu'elle n'avait pas l'intention de laisser les élus du Congrès se prononcer sur la question. «La Constitution, le règlement intérieur et les précédents de la Chambre ne stipulent pas que la Chambre doit voter avant de procéder à une enquête sur la destitution», a ainsi déclaré le porte-parole de Nancy Pelosi, avant qu'elle-même ne réitère cette position.
Mais pourquoi les démocrates refusent-ils un vote qu'ils ont pourtant la certitude de remporter, étant donnée la confortable majorité dont ils jouissent au Congrès ? La tenue d'un tel vote permettrait en fait aux républicains d'avoir accès à tous les documents concernant l'affaire, d'interroger les témoins et d'enquêter eux-mêmes sur les révélations du «lanceur d'alerte». «Les républicains auraient l'opportunité d'obtenir les informations en provenance de toutes les sources, et pourraient les mettre sur la table», explique au média RealClearPolitics une avocate en droit politique, notant qu'avec la procédure pour laquelle ils ont opté, les démocrates étaient les seuls à avoir accès aux informations contenues dans le dossier.
Après le «Russiagate», l'«Ukrainegate» ?
Dès lors, les démocrates auraient-ils des doutes quant à la solidité des accusations formulées ? A l'instar de la soi-disant ingérence russe, qu'ils ont agitée pendant trois ans sans apporter de preuve, les seuls éléments disponibles ne plaident jusqu'à présent pas en leur faveur. Alors qu'ils accusent Donald Trump d'avoir fait pression sur le président ukrainien Volodymyr Zelensky pour enquêter sur le fils de Joe Biden – ancien vice-président de Barack Obama et candidat à la primaire démocrate – la retranscription de l'appel téléphonique entre les deux hommes ne révèle en effet rien d'illégal.
A tel point qu'Adam Schiff, qui préside la puissante commission du renseignement à la Chambre des représentants et supervise l'enquête pour destitution, a sciemment modifié la teneur de l'échange, prêtant à Donald Trump des propos qu'il n'avait pas tenus. «C'est comme cela qu'un chef mafieux parle: ''Qu'avez-vous fait pour nous ? Nous en avons tellement fait pour vous mais cela n'est pas très réciproque. J'ai un service à vous demander"», avait déclaré Adam Schiff devant le Congrès, estimant qu'il s'agissait de «l'essence» de ce que voulait dire le président américain, bien que ce dernier n'ait jamais employé de tels termes.
«Adam Schiff a inventé ce que j'ai dit. Il a pris des mots, et les a inventés. La raison en est que, quand il a vu mon appel avec le président de l'Ukraine, c'était tellement bien qu'il ne pouvait pas en citer un extrait. Parce qu'il n'y avait rien de mal. C'était parfait», a répliqué Donald Trump, se demandant par ailleurs sur Twitter s'il ne s'agissait pas d'un acte de trahison.
Rappelons par ailleurs que la procédure de destitution a été lancée avant même la publication de la retranscription de l'appel, sur la base du témoignage d'un «lanceur d'alerte» – un agent de la CIA selon le New York Times –, qui n'a pas été témoin direct de la conversation, et n'a obtenu des informations sur son contenu que par des tiers. Avant de déposer sa plainte, ce dernier s'est par ailleurs tourné vers Adam Schiff en sa qualité de président de la commission du renseignement afin d'obtenir des conseils. Si Adam Schiff assure qu'il s'agit d'une procédure standard, l'information a alimenté des accusations de tentative de «coup d'Etat» que n'hésite plus à brandir Donald Trump.
Frédéric Aigouy