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Migrants : les agences onusiennes, au bord de la banqueroute, craignent pour les réfugiés

Plusieurs responsables d'agences des Nations unies ont dépeint au Guardian leur situation financière catastrophique et les conséquences dramatiques que cela avait sur le sort des réfugiés notamment au Moyen-Orient et en Afrique.

Fermeture d'une centaine de cliniques en Irak, coupes dans les rations journalières de nourriture dans des camps au Liban, en Ouganda ou au Kenya : plusieurs grandes agences de l'ONU avouent être au bord de la banqueroute et s'inquiètent de ne plus pouvoir assurer le minimum vital aux réfugiés ayant fui leur pays. Affamés, mal soignés ces derniers sont ainsi tentés de fuir en Europe ou de rejoindre les rangs des terroristes, qui leur font miroiter une vie meilleure.

«Nos budgets ne suivent pas nos besoins croissants. Notre rentrée d'argent en 2015 sera en baisse de 10% comparée à l'année passée. La communauté humanitaire mondiale n'est pas rompue [ndrlb: les agences onusiennes vivent grâce aux dons volontaires des pays et des donateurs] mais nous sommes financièrement à sec», a avoué le Haut-Commissaire pour les Réfugiés de l'Onu, António Guterres, au Guardian.

Un constat amer pour le chef de l'agence internationale en charge des réfugiés. «Nous ne parvenons pas à répondre aux besoins fondamentaux des populations», lâche le Haut-Commissaire avant de poursuivre : «la situation est irréparable... notamment si vous regardez le nombre d'enfants qui voient leur vie basculer à cause de la malnutrition et le manque de soutien psycho-social».

Outre le HCR, d'autres grandes agences onusiennes peinent également à faire face à cette crise des réfugiés qui secoue la planète. Ainsi, faute d'un budget suffisant, l'Organisation mondiale de la Santé, l'OMS, a été contrainte de fermer au mois d'août 184 centres de santé en Irak dans 10 des 18 districts que compte le pays, pourtant ravagé par la guerre. «Nous ne sommes jamais à 100% financés donc nous devons sans cesse établir des priorités. Mais cela nous brise le coeur de devoir mettre fin à nos services et de laisser 3 millions de personnes sur le carreau. On ne peut plus gérer les traumatismes liés aux éclats d'obus, il y aura aussi toute une génération d'enfants non-vaccinés et désormais on ne surveillera plus des choses comme le choléra», détaille au Guardian le Dr Michelle Gayer, directrice pour la gestion des risques d'urgence à l'OMS. L'agence, qui aurait besoin de 60 millions de dollars pour fonctionner à plein en Irak, n'est parvenue à réunir que 8% de la somme auprès de ses donateurs.

Du côté du Programme alimentaire mondial, les nouvelles ne sont pas meilleures. Le PAM a ainsi été obligé cette année de réduire les rations alimentaires de 1,6 millions de réfugiés syriens, vivant actuellement au Liban. Mais l'agence a dû procéder de même dans les camps de Dadaab et de Kakuma dans le nord du Kenya, ainsi que pour les réfugiés soudanais en Ouganda.

Des conditions de vie de plus en plus difficiles, qui selon la porte-parole du PAM basée au Caire Dina El-Kassaby, «pousseraient les réfugiés à prendre des décisions dangereuses : soit tenter le périlleux voyage vers l'Europe pour vivre mieux, soit retourner en Syrie». Et cette dernière d'avertir que ces «hommes et ces garçons, qui doivent nourrir coûte que coûte leur famille, deviennent alors des cibles de choix pour Daesh qui les recrute».

Dans les colonnes du Guardian, le patron du HCR réclame donc une refonte urgente des systèmes de financement des agences mondiales d'aide. «C'est une situation dramatique (...). Les opérations de maintien de la paix de l'Onu sont, elles, financées par les contributions de tous les pays, je pense que cette urgence majeure que représentent les réfugiés syriens devrait pouvoir bénéficier du même sytème et donc des contributions de tous les Etats membres comme les Casques bleus» conclut António Guterres.

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