Après plusieurs polémiques analogues, c'est au tour de la ville d'Ath, en Belgique, d'être pointée du doigt par une organisation qui dénonce un blackface, cette pratique assimilée à du racisme qui consiste, pour une personne de couleur blanche, à se maquiller le visage pour ressembler à une personne noire à l'occasion d'une représentation culturelle.
La cause du grief des militants antiracistes ? Un personnage traditionnel baptisé «Le sauvage», emblématique de la Ducasse d'Ath, un défilé costumé traditionnel de cette ville qui existe depuis le Moyen Âge et qui figure à ce titre depuis 2008 sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité de l'UNESCO. Grimaçant, vêtu de plumes, un anneau dans le nez et parfois enchaîné, le personnage du «Sauvage» a pour mission, parmi d'autres, de «faire rire le public et faire peur aux enfants», selon un de ses anciens interprètes au journal belge La DH.
«[Nous] n'avons rien contre les fêtes et le folklore. Nous souhaitons juste qu'en Belgique, et ailleurs, ces fêtes et ce folklore cessent d'être presque systématiquement accompagnés de pratiques négrophobes», déclare pour sa part l'association Bruxelles Panthères, à l'origine de la polémique, sur sa page Facebook.
L'organisation demande à ce que ce personnage soit retiré ou modifié et a écrit en ce sens à la directrice générale de l’UNESCO Audrey Azoulay pour que l'événement, qui aura lieu du 23 au 25 août, soit retiré «s'il le faut» de la liste du patrimoine culturel immatériel de l'organisation mondiale.
L'association, qui se revendique comme antiraciste et «décoloniale», dénonce au passage «des traditions racialisantes qui essentialisent une part importante de la population belge et européenne». Du côté de l'événement, on décrit le «Sauvage», personnage créé en 1856, comme un témoignage «du goût de l’exotisme du XIXe siècle».
Présent dans de nombreux carnavals européens sous des symboliques diverses, le phénomène du blackface est régulièrement pris pour cible par des organisations antiracistes, «décoloniales» ou communautaires qui l'assimilent à du racisme et au colonialisme.
En 2018, l'association Bruxelles Panthères avait fait annuler la «sortie des nègres», une partie de la Ducasse des Culants à Deux-Acren. Cette séquence, également jugée raciste par l'association, avait, selon les organisateurs pour vocation de «représenter la libération du Congo durant les années 1960». «On voit les Noirs sous dominance belge qui reprennent leur indépendance, sous l’œil éloigné du roi Baudouin», expliquait ainsi Laurent Pevenage à la RTBF, ajoutant que cela avait pour but de montrer «la réalité du comportement des Belges vis-à-vis des Noirs à l’époque, pour les jeunes générations».
En 2016, c'est le «père fouettard», souvent représenté par une personne au visage noirci et aux lèvres épaissies en Belgique à l'occasion de la Saint-Nicolas (6 décembre), qui avait été pointé du doigt par l'association et d'autres organisations. Outre le blackface, certains détracteurs de cette tradition se plaignent du fait que le personnage en noir soit négatif à côté de Saint-Nicolas, qui lui est généralement représenté avec un visage blanc.