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Les talibans élisent leur chef sous la neutralité bienveillante du Pakistan

Le Pakistan a autorisé une réunion de talibans à Quetta, une ville à la frontière afghane. Cette réunion avait pour but de résoudre la question du leadership du mouvement après le décès de sa figure de proue, le mollah Omar.

C'est à la grande fureur des autorités afghanes et malgré les avertissements de Washington que cette réunion s'est tenue dans la ville frontalière de Quetta, là même où de nombreux talibans s'étaient repliés en 2001, après avoir été chassés du pouvoir par l'invasion américaine. 

Quelques milliers de talibans y ont pourtant ouvertement tenu une «choura de l'unité», réunion destinée à résoudre la crise de leadership que connaît le mouvement, mais aussi à le consolider alors qu'il est en proie à d'importantes luttes internes depuis la mort du mollah Omar.

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La lutte pour le direction du mouvement a été rendue publique après que le gouvernement afghan a annoncé fin juillet que le mollah Omar était mort depuis avril 2013. Son adjoint, le mollah Akhtar Mansoor, avait alors été désigné dans la foulée comme son successeur. Cependant la famille du mollah Omar s'était fermement opposée à cette nomination, affirmant que le vote qui avait permis l'élection du nouveau chef n'avait pas été représentatif. Le frère et le fils du mollah Omar s'opposaient notamment à ce qu'il dirige le mouvement. Une opposition frontale qui a débouché sur une lutte de pouvoir interne à laquelle cette «choura de l'unité» de Quetta doit mettre un terme par un nouveau vote.

Mais le mollah Akhtar Mansoor est toujours dans la course. Pour preuve, les talibans ont publié sa biographie, indiquant ainsi leur volonté d'asseoir sa popularité auprès des érudits religieux et des partisans du mouvement. 

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Le gouvernement afghan voit, bien évidemment, d'un très mauvais oeil la tenue d'une telle réunion. Cela fait en effet 14 ans que les talibans tentent de renverser le gouvernement de Kaboul. Les forces afghanes font face à des attaques régulières, même si les talibans ont fait, sur le terrain, peu de progrès significatif.

Ashraf Ghani, le président afghan, a ainsi ouvertement accusé le Pakistan d'héberger un mouvement qui fait la guerre à son pays. Son porte-parole adjoint, Zafar Hashemi, a également déclaré que le Pakistan ne parvenait pas à prendre des mesures contre «ces groupes qui se rassemblent publiquement et déclarent la guerre au peuple afghan», référence à peine voilée à la réunion de Quetta.  

Selon certains analystes, le mollah Akhtar Mansoor a précisément été nommé à la tête du mouvement taliban à cause de ses liens avec la toute puissante agence de renseignement pakistanaise ISI (Inter-Services Intelligence du Pakistan).

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Cette réunion de Quetta a nécessité une impressionnante logistique organisationnelle. Des centaines de visiteurs venus de tout l'Afghanistan ont été accueillis par les talibans et logés dans des madrasas, des mosquées et des logements privées. Tout cela sous le regard des forces pakistanaises, étrangement neutres.