Assassinats, églises attaquées, pression quotidienne : les persécutions des chrétiens ont augmenté en 2018 dans le monde pour la sixième année consécutive, affirme l'ONG Portes ouvertes à l'occasion de la publication de son «index» annuel, le 16 janvier.
Cette organisation protestante suit la situation dans 50 pays où les chrétiens subissent à la fois des violences, allant parfois jusqu'au meurtre, mais aussi une oppression ou une discrimination quotidienne, plus discrète.
Au total, 245 millions de chrétiens — catholiques, orthodoxes, protestants, baptistes, évangéliques, pentecôtistes, chrétiens expatriés, convertis — sont persécutés, soit «un chrétien sur 9», selon l'organisation, alors qu'il y a un an, ce chiffre atteignant 1 sur 12.
Le nombre de chrétiens tués est passé de 3 066 à 4 305 entre novembre 2017 et octobre 2018, soit une hausse de 40%. «L’index révèle une persécution contre les minorités chrétiennes qui s’accroît d’année en année. En 2018 cela continue», écrit Michel Varton, directeur de Portes ouvertes.
«Ce qui est frappant, c'est que l'Afrique est devenue le foyer de la violence contre les chrétiens, avec 4 165 tués». Le Nigeria compte à lui seul 3 731 morts sur son sol [contre 2 000 en 2017], affirme-t-il auprès de l'AFP.
Ce pays fait face à une double menace, celle du groupe djihadiste Boko Haram qui est «de plus en plus violent», et celle des «éleveurs Peuls, qui descendent vers le sud du pays et attaquent systématiquement les villages chrétiens».
Pour autant, c'est la Corée du Nord, qui figure à nouveau, comme les années précédentes, en tête de ce classement annuel, même s'il n'est pas possible de connaître, faute de «données fiables», le nombre de morts dans ce pays. L'ONG relève que «des dizaines de milliers de chrétiens [y] sont enfermés dans des camps de travaux forcés».
Suivent l'Afghanistan, la Somalie, la Libye, le Pakistan, le Soudan, l’Erythrée, le Yemen, l'Iran, l'Inde, la Syrie, des pays classés en «persécution extrême» par l'ONG.
Eglises fermées en Algérie
L'ONG estime que «l’extrémisme islamique», de «l’Afrique au Moyen-Orient en passant par l’Asie», est «dans 38 des 50 pays de l’index, un facteur important de persécution des chrétiens».
Autres chiffres de cet index : en un an, «le nombre d’églises ciblées fermées, attaquées, endommagées, incendiées [...] a presque doublé, passant de 793 à 1 847», tandis que «le nombre de chrétiens détenus passe de 1 905 à 3 150» dans la même période.
Parmi les pays sur lesquels l'ONG entend alerter l'opinion figure l'Algérie, où «depuis novembre 2017, des comités représentant les autorités algériennes visitent les églises de l’EPA [Eglise Protestante d’Algérie] sous prétexte d'inspection sanitaire, amenant la fermeture de plusieurs d’entre elles», décrit-elle .
«On vit toujours dans une situation où peut-être demain [elles] viennent avec un ordre pour fermer l’église», a confié à l'AFP Youssef Ourahmane, pasteur algérien et vice-président de l'EPA, qui dit avoir été visé par plusieurs tentatives d'assassinat en raison de sa religion. «Ils veulent nous étouffer. Nous mettre toujours dans la crainte».
L'ONG pointe également du doigt la Chine, qui «malmène la liberté religieuse» et où la situation s'est fortement «détériorée» : dans ce pays, qui compte 100 millions de chrétiens, «la persécution étatique était jusqu'à l’année dernière encore circonscrite à certaines provinces» mais elle «est désormais en passe de devenir un phénomène national». Au total, le nombre de chrétiens détenus et d'églises ciblées en Chine a été multiplié par 10 en un an.
Portes ouvertes, partenaire d'Open Doors international [qui agit dans 60 pays], prévient par ailleurs que ses chiffres, qui ne concernent que les assassinats «prouvés de manière certaine» sur la foi d'informations recoupées, sont «en dessous de la réalité».