International

A Chemnitz, une association propose de dénoncer les participants aux manifestations anti-migrants

Dans la ville de Chemnitz, où plusieurs marches anti-migrants ont été organisées, une initiative fait polémique. Le Centre pour la beauté politique invite en effet la population à dénoncer, contre rémunération, les personnes qui y ont participé.

«Dénoncez vos collègues de travail, vos voisins ou vos connaissances, et recevez immédiatement de l’argent en récompense ! Aidez-nous à éloigner de notre économie et de nos services publics ces Allemands qui posent problème !» : c'est le message que l'on peut lire sur le site internet du Centre pour la beauté politique, une association fondée en 2009 et qui se présente «ni comme des artistes, ni comme des caricaturistes, ni comme des activistes, mais comme des humanistes agressifs».

Les photographies de 2 000 manifestants publiées 

Cet appel vise à motiver la population de Chemnitz, ville théâtre de plusieurs manifestations s’opposant à la vague d’accueil de migrants qu'a subi l'Allemagne ainsi que ses conséquences, à dénoncer toute personne qui aurait participé à ces rassemblements. Dans un pays marqué par la mémoire de la Seconde Guerre mondiale, et alors que le système des dénonciations était la norme sous le IIIe Reich, cette proposition fait scandale. Sur le portail de l'association, on peut ainsi voir près de 2 000 photos de participants aux manifestations de fin août-début septembre.

La responsable de la protection des données personnelles du Land de Berlin, région dont dépend le Centre, a soulevé la question de la légalité de l'action présentée par ses initiateurs comme «artistico-politique», bien que les photographies des personnes affichées sur le site soient barrées d’un trait noir au niveau des yeux.

Des manifestants dénoncés se présentent comme des «nouveaux juifs»

Le Forum juif pour la démocratie et contre l’antisémitisme a également dénoncé l'initiative. Cette dernière «discrédite» et «complique» la lutte contre l’extrême droite, estime l'association. Pour le Conseil culturel allemand, cela «ne contribue pas à éclairer, mais ne conduit qu’à diviser encore davantage notre société», expliquant : «L’art est libre, mais il a des responsabilités.» Des militants de groupes d’extrême droite ont eux vilipendé un «appel à la persécution de la race allemande», se comparant à des «nouveaux juifs». 

L’art est libre, mais il a des responsabilités

Devant ces nombreuses réactions médiatiques, le site appelant à la dénonciation a supprimé sa publication, deux jours après sa mise en ligne, le remplaçant par... un pot de miel. Un pied de nez, car des centaines de participants auraient été attirés sur le site et auraient rentré leur noms ou celui d'amis dans le moteur de recherche interne du site afin de vérifier s'ils avaient été «fichés». Ils se seraient ainsi en quelque sorte dénoncés eux-mêmes. «Merci pour ce cadeau de Noël avant l’heure», a commenté le Centre pour la beauté politique. Les manifestations de Chemnitz ont débuté en août 2018 après qu'un Allemand a été tué par arme blanche par un Syrien et un Irakien, tous deux demandeurs d'asile.

Lire aussi : Il n'y a pas eu de chasse aux migrants à Chemnitz selon le chef du renseignement allemand