Dans une vidéo de 9 minutes diffusée après que le tribunal a condamné Saïf al-Islam à mort, on voit des gardes tourmenter et tabasser son frère Saadi dans la prison de al-Hadba.
Même si l’authenticité de cette vidéo ne peut pas être vérifiée de manière absolue, le procureur général de Tripoli a fait savoir qu’il avait ordonné d’enquêter pour identifier les gardiens que l’on voit sur les images et «prendre des actions légales à leur encontre».
Pour son avocat, il s'agît bien de Saadi Kadhafi
Melinda Taylor, avocate internationale de justice pénale pour Saadi Kadhafi a déclaré à RT que l'homme sur la vidéo «semble en effet bien être Saadi Kadhafi».
«Il a la même apparence, sachant que l'homme que l'on voit sur la vidéo a le crâne rasé, ce qui est le cas de Saadi Kadhafi depuis l'année dernière» explique l'avocate.
Pour Melinda Taylor, le traitement reçu par Kadhafi est «criminel» étant donné que l'homme subit «des sévices physiques, mais est également soumis à une torture psychologique, étant forcé d'écouter les cris d'agonie d'autres prisonniers».
L'avocate assure que cette vidéo constitue «les preuves d'un crime international, de torture et de traitements inhumains».
«Tant que Saadi Kadhafi sera aux mains d'une milice qui se livre à ce type de torture en toute impunité, il n'aura aucune protection efficace», a conclu Taylor dans ses déclarations à RT.
Des actes de tortures
Sur la vidéo, alors qu'il est attaché à une étagère, les gardes frappent violemment l'homme à la plante des pieds, tandis qu'il pousse des cris de douleur. En même temps, il entend les cris des autres prisonniers tabassés à l’extérieur de la pièce.
À un moment au cours de la vidéo, Saadi Kadhafi supplie ses tortionnaires d'arrêter, leur promettant de coopérer. Aucun représentant légal n'est présent durant la scène et il est difficile de savoir si Saadi Kadhafi a pu être représenté par un avocat lors de sa détention .
Ces images peuvent choquer les personnes sensibles.
Human Rights Watch appelle à faire la lumière sur la vidéo
Pour Joe Stork, directeur adjoint de Human Rights Watch au Moyen-Orient et en Afrique du Nord qui s'est exprimé dans un communiqué, la vidéo soulève «de sérieuses préoccupations au sujet des méthodes utilisées pour interroger Saadi Kadhafi et d'autres détenus à la prison d'al-Hadba».
«Il est urgent que les autorités de Tripoli établissent exactement les faits, mettent en place des mesures pour protéger tous les détenus contre les mauvais traitements. Aucunes circonstances exceptionnelles ne justifient la torture ou les mauvais traitements», a déclaré Stork.
«Si le contenu de la séquence vidéo est vérifié, les autorités de Tripoli doivent rapidement identifier les responsables et les poursuivre en justice» explique-t-il.
Itinéraire de Saadi Kadhafi
Après avoir fui la Libye en 2011, Saadi Kadhafi s’est trouvé assigné à résidence à Niamey avant que le Niger ne décide de l’extrader en Libye le 6 mars 2014. Depuis, il est maintenu en détention provisoire.
Il est notamment accusé du meurtre présumé d'un joueur de football alors qu'il était à la tête de la Fédération Libyenne de Football, ainsi que d'autres crimes en rapport avec ses liens avec son père, Mouammar Kadhafi.
Après son extradition vers la Libye, les chaînes de télévision du pays avaient diffusé une série de vidéos montrant Saadi Kadhafi avouer des crimes et présenter des excuses pour toute «déstabilisation qu'il aurait pu causer», notamment envers le système politique de son pays.
L'autre fils de Kadhafi déjà condamné à mort
La vidéo des sévices de la prison de al-Hadba fait suite à la condamnation, la semaine dernière, de 32 anciens fonctionnaires de Mouammar Kadhafi, dont 9 ont été condamnés à mort et 23 à des peines allant de 5 ans de prison à la perpétuité. Parmi les condamnés à mort figure un autre fils de Mouammar Kadhafi, Saif al-Islam Kadhafi.
Selon les association de défense des droits de l’homme, notamment Amnesty International et Human Rights Watch, le procès de Saïf al-Islam Kadhafi a été entaché de graves irrégularités. Ce dernier n’était pas présent lorsque la décision de justice a été rendue, parce qu’il a été capturé par un groupe rebelle dans la ville de Zentan.
Saïf al-Islam a été reconnu coupable de crimes de guerre perpétrés lors de l’insurrection de 2011 qui a conduit à la chute du régime de son père. Après ces bouleversements historiques, la Libye s’est enfoncée dans le chaos car différents groupes rebelles alimentent un conflit armé qui ravage le pays et par lequel chacun d’eux espère parvenir à prendre le contrôle de la totalité du territoire libyen.
Libye : une situation chaotique depuis 2011
Depuis 2011, les institutions libyennes, y compris le pouvoir judiciaire et le système de justice pénale, se sont quasiment totalement effondrées. Les activités de nombreux tribunaux, bureaux de procureurs, et divisions de la police judiciaire ont été suspendues en raison de la détérioration des conditions de sécurité en Libye et des attaques récurrentes ciblant les juges, les avocats, et les procureur. La capacité de la Cour suprême, qui se trouve à Tripoli, de mener des procès impartiaux est également menacée au vue de la détérioration des conditions de sécurité dans la pays.
La ville d'Al-Hadba est sous le contrôle des forces de l'ancien vice-ministre de la défense, alliés avec la coalition des milices libyennes qui soutient l'autorité autoproclamée controlant la capitale, Tripoli, ainsi que de vaste parties de la Libye occidentale. la coalition s'oppose au gouvernement libyen internationalement reconnu et basé dans les villes d'al-Bayda det Tobrouk, à l'Est du pays.