C'est un nouvel épisode du Clintongate : le scandale qui avait révélé que l'ex First Lady américaine, alors secrétaire d'état, avait utilisé son adresse personnelle pour échanger des courriels officiels, alors que la pratique était interdite pour des raisons de transparence. Depuis la révélation, les courriels concernés ont été rendus publics par vague. La dernière parution en date défraye la chronique : elle montre la (très) mauvaise opinion qu'Hillary Clinton avait de David Cameron, avant que celui-ci ne soit porté à la tête du gouvernement britannique. Des échanges qui révèlent aussi la préférence de la chef de la diplomatie américaine pour l'ancien Premier ministre britannique Tony Blair.
Dans le détail, les nouveaux courriels rendus publics contiennent un certain nombre d'articles du quotidien britannique The Guardian, qu'Hillary Clinton recevait d'un de ses proches confidents, Sidney Blumenthal. L'un de ces articles explique qu'en octobre 2009, David Cameron avait tenté de saboter le traité de Lisbonne, se mettant à dos le Président français Nicolas Sarkozy, la chancelière allemande Angela Merkel et le Président du gouvernement espagnol Jose-Luis Zapatero. L'ex Première dame avait alors qualifié l'article de «révélateur et farfelu», arguant que de telles révélations pourraient ouvrir la voie de la présidence de l'Union Européenne (UE) à Tony Blair.
Son interlocuteur, Sidney Blumenthal, parle de Cameron avec un ton cinglant. Avant que l'homme ne devienne Premier ministre, Blumenthal écrit : «en terme de politique extérieure, Cameron n'est ni fiable, ni expérimenté. Il est oblique et peu loyal. Son idée de la diplomatie est celle d'une prolongation de sa politique intérieure». L'homme pointe également du doigt un autre article du Guardian qui rapporte des accusations de «castration» de la position du Royaume-Uni en Europe et d'un approche «autiste» de l'UE, de la part de Pierre Lellouche, alors secrétaire d'état chargé des Affaires européennes dans le gouvernement Fillon.
Quelques semaines plus tard, Blumenthal repart à l'attaque. Anticipant l'accès au pouvoir de David Cameron, il écrit : «un gouvernement Cameron sera plus aristocratique et étroit que tous les gouvernements conservateurs de ces dernières années, et qui contrastera drastiquement avec les ambitions du peuple britannique». Il met Clinton en garde : «[si élu] Cameron sera faussement amical [avec l'administration Obama] mais méprisant en privé». Des propos auxquels la secrétaire d'état répond en se disant «désolée de lire» qu'une défaite des socialistes anglais est à prévoir.
Un préférence claire pour Tony Blair
C'est l'autre révélation de ces courriels. Si la secrétaire d'état de l'administration Obama montre son hostilité vis-à-vis de David Cameron, elle fait en revanche preuve d'une volonté farouche de voir les Labours (le parti socialiste britannique) rester au pouvoir et de voir Tony Blair accéder à la Présidence de l'UE. Blumenthal se montre inquiet à l'idée qu'un autre soit choisi à la place du Premier ministre britannique (ce qui sera le cas avec l'élection d'Herman Van Rompuy). Il écrit : «Si Blair ne devient pas président de l'UE, il est probable que le poste soit offert à un nul de seconde zone issu de la bureaucratie bruxelloise. Quelqu'un incapable de réaliser les possibilités de l'UE, et qui maintiendrait les faiblesses de l'Europe en tant qu'idée et réalité politique».
Ces courriels montrent que Clinton avait l'intention de pratiquer un lobbying pour montrer son support à Blair et que le directeur de campagne de ce dernier, Jonathan Powell, souhaitait que la secrétaire d'état affiche un support officiel du Premier ministre.
Dans un échange de courriels, Blumenthal écrit : «j'ai parlé à Jonathan Powell. Il m'a affirmé que le débat échappait [à l'équipe de Tony Blair] et que tout geste [de la part de Clinton] serait grandement apprécié, notamment parler avec des leaders européens ou exprimer en public le besoin pour l'UE d'avoir à sa tête une figure de premier plan à laquelle les leaders pourraient s'identifier».
Ces nouvelles révélations ne correspondent quà une infime partie des dizaines de milliers de pages que la candidate à la primaire démocrate a transmises au Département d'état début 2015.
En réponse à ces nouvelles informations, un porte-parole de Downing Street a affirmé que «la relation spéciale entre les États-Unis et le Royaume-Uni est aussi solide qu'elle a toujours été et le Premier ministre est tout à fait conscient de l'importance d'une alliance avec les États-Unis».