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Sommet européen sous tension : l'Italie bloque l'adoption de conclusions communes

Giuseppe Conte avait prévenu que si le texte final sur lequel doivent s'entendre les dirigeants européens ne satisfaisait pas Rome sur le dossier migratoire, il n'y aurait pas de «conclusions partagées» à la fin de ce sommet européen crucial.

A la veille du terme de la réunion du Conseil européen, les 28 et 29 juin, l'Italie pourrait bien mettre sa menace à exécution. Rome a bloqué l'adoption d'un texte commun, mettant sur la balance son exigence de plus de solidarité dans la gestion de la crise migratoire – solidarité promise par ailleurs par Angela Merkel comme Emmanuel Macron en amont du sommet. 

«[Giuseppe] Conte s'est réservé la possibilité de pouvoir se prononcer sur tout», a déclaré une source italienne citée par l'AFP. Toujours selon l'agence, un porte-parole du Conseil européen expliquait, sans le nommer, qu'un Etat membre avait «réservé sa position sur l'ensemble des conclusions».

Nous attendons des actes

Plusieurs déclarations du Premier ministre italien Giuseppe Conte à son arrivée à Bruxelles ont d'emblée accentué la pression, après plus de deux semaines de bras de fer diplomatique autour de navires transportant des migrants secourus en Méditerranée, auxquels Rome avait refusé l'accostage. «Nous attendons des actes», a ainsi averti le chef du nouveau gouvernement italien, reprochant à ses voisins de laisser l'Italie gérer seule les arrivées. Giuseppe Conte a en outre prévenu que si le texte final sur lequel doivent s'entendre les dirigeants européens ne satisfaisait pas Rome, il n'y aurait «pas de conclusions partagées» à la fin du sommet.

Entre crise migratoire et crises politiques, un sommet sous tension

Tentant de déplacer le problème, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, interrogé sur cette menace, a répondu ce même jour qu'il ne s'inquiétait pas d'un veto, mais «de la situation sur les côtes italiennes». «Nous devons montrer de la solidarité», a-t-il martelé, sans convaincre, apparemment, l'exécutif italien.

Ce sommet sous tension est aussi marqué par la fragilité inédite de la chancelière allemande Angela Merkel, dont l'autorité est mise à mal sur la question migratoire. Son ministre de l'Intérieur, Horst Seehofer, menace de refouler aux frontières les migrants déjà enregistrés ailleurs, de manière unilatérale, faute de mesures européennes contre les déplacements de migrants dans l'UE. «L'Europe a beaucoup de défis mais celui lié à la question migratoire pourrait décider du destin de l'Union européenne», a prévenu Angela Merkel, appelant à des solutions «multilatérales» et non «unilatérales».

Le président français Emmanuel Macron est allé dans le même sens, écartant les «solutions nationales» à la question migratoire. «Je défendrai des solutions européennes de coopération dans l'UE», a-t-il plaidé à son arrivée à Bruxelles.

Face à l'urgence, la réforme du Règlement de Dublin abandonnée

Le sommet devait initialement permettre de débloquer la réforme du régime d'asile européen, enlisée depuis deux ans. Mais cet objectif a été abandonné, les divergences étant trop fortes sur la réforme du Règlement de Dublin, qui confie aux pays de première entrée dans l'UE la responsabilité des demandes d'asile. La Commission propose de déroger à ce principe ponctuellement en période de crise, avec une répartition des demandeurs d'asile dans l'UE depuis leur lieu d'arrivée. Mais des pays comme la Hongrie et la Pologne, soutenus par l'Autriche, s'y opposent frontalement. 

L'Italie demande au contraire un système permanent de répartition, et l'abandon pur et simple du principe de la responsabilité du pays d'arrivée. Et paraît déterminée.

Alexandre Keller

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