Comme annoncé la veille par son président Jean-Claude Juncker, la Commission européenne a lancé ce 18 mai la procédure officielle visant à activer la loi dite «de blocage», afin de contrecarrer les effets extraterritoriaux des sanctions américaines pour les entreprises européennes voulant investir en Iran.
La réglementation évoquée est un règlement européen datant de 1996, visant notamment à contourner l'embargo sur Cuba (loi américaine Helms-Burton). Cette loi dite «de blocage» vise à permettre aux entreprises et tribunaux européens de ne pas se soumettre à des réglementations sur des sanctions prises par des pays tiers et édicte qu'aucun jugement décidé par des tribunaux étrangers sur la base de ces réglementations ne saurait s'appliquer dans l'Union européenne (UE).
La Commission, garante de la souveraineté économique européenne ?
Bruxelles espère pouvoir l'adapter d'ici au 6 août 2018, lorsque les premières sanctions nouvellement décidées par les Etats-Unis, conséquence de la sortie de l'accord nucléaire iranien, prendront effet. «Nous devons maintenant agir», avait justifié Jean-Claude Juncker le 17 mai à l'issue d'un sommet européen à Sofia, fort d'un soutien unanime des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne.
Après le retrait des Etats-Unis décidé par Donald Trump de l'accord sur le nucléaire iranien (JCPOA), les dirigeants de l'UE se sont engagés à défendre les intérêts des multinationales européennes, de facto sous le coup de sanctions américaines. «La levée des sanctions liées au nucléaire est une part essentielle du JCPOA. L'Union européenne s'engage pour mitiger l'impact des sanctions américaines sur les entreprises européennes et prend des mesures pour maintenir la croissance du commerce et des relations économiques entre l'UE et l'Iran qui ont débuté quand les sanctions ont été levées», souligne ainsi la Commission.
Pour autant, le rapport de force n'est pas en faveur des Européens. Les grandes banques européennes comme les entreprises ayant une activité commerciale aux Etats-Unis sont tributaires de licences délivrées par Washington, un moyen de pression non négligeable. En 2014 notamment, BNP Paribas, accusée d'avoir violé l'embargo américain, avait dû se soumettre au droit et au Département de la Justice américains et payer une amende record de plus de 9 milliards de dollars pour pouvoir continuer ses opérations sur le sol américain.
Alexandre Keller