Les médias Outre-atlantique s'inquiètent de la décision du Département de la sécurité intérieure américain («Department of Homeland Security», DHS) de se doter d'un base de données pour surveiller et analyser l'activité des journalistes, blogueurs et influenceurs sur les réseaux sociaux.
C'est un appel d'offre datant du 3 avril sur un site gouvernemental qui a alerté la profession. Sur celui-ci, le DHS explique que la mission consiste à créer une base de données dont le but est de suivre environ 290 000 sources d'information, aussi bien étrangères que nationales.
In fine, le DHS souhaite avoir à sa disposition un tableau de bord interactif qui fournit une surveillance et une analyse en temps réel de la couverture médiatique d'un événement, en termes de contenu, de volume, mais aussi d'opinion, ainsi que de répartition géographique ou encore de langage.
La plateforme, devant être disponible sur une application mobile cryptée, doit ainsi permettre de traduire instantanément des médias de 100 langues différentes – y compris l'arabe, le chinois et le russe – en anglais. Et le service doit inclure les coordonnées et toute autre information qui pourrait être pertinente concernant les influenceurs et journalistes présents dans la base de données, telles que les publications pour lesquelles ils écrivent et un aperçu de l'historique de leur travail.
Analyse des médias ou attaque de la liberté de la presse ?
Cet appel d'offre a conduit le magazine Forbes, dont les craintes ont été largement relayées parmi les médias américains, à se demander si le DHS n'essayait pas de se servir de la supposée «ingérence russe» pour justifier la création de cette base de donnée. Le magazine juge ainsi que cette décision du DHS est à même de «causer des cauchemars de proportions constitutionnelles», particulièrement dans un contexte où «la liberté de la presse est attaquée dans le monde».
Des inquiétudes balayées d'un revers de la main par le porte-parole du DHS Tyler Houlton, qui estime dans un tweet que l'émoi de la presse est digne de «théories du complot». Selon lui, il ne s'agit ni plus ni moins que d'une pratique standard pour surveiller le traitement de l'actualité dans les médias.
Un argument qu'il a réitéré dans un message adressé au site de fact-checking Snopes : «Vous vous ridiculisez avec ces questions et ces folles théories du complot. Tout comme vous surveillez les médias, le DHS fait de même.»
Un argument qui aura au moins convaincu l'analyste militaire John Kirby, qui soutient que c'est une pratique standard des agences fédérales américaines depuis longtemps déjà, dans le but de mieux comprendre le paysage médiatique.
«De ce que je vois, ce n'est rien de plus qu'une tentative d'analyser les médias», a-t-il confié au micro de CNN, estimant que le sujet était brûlant en raison de l'aversion de Donald Trump pour les médias. «En fait, ce serait une erreur de relation publique de ne pas faire quelque chose de ce genre», a-t-il ainsi fait valoir.
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