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Débarqué de Breitbart, Steve Bannon poursuit sa lente déchéance politique

L'ancien conseiller du président américain paie cher ses révélations sur Donald Trump Jr. publiées dans le brûlot «Fire and Fury». Steve Bannon doit à présent quitter la présidence de Breitbart News, dont il était la figure emblématique.

Quelques jours après avoir été répudié par Donald Trump, Steve Bannon a quitté le 9 janvier la présidence du site conservateur Breitbart, nouvelle rétrogradation pour celui qui fut l'un des artisans de la victoire électorale du 45ème président des Etats-Unis.

Arrivé en 2012 à la tête du site après le décès du fondateur Andrew Breitbart, Steve Bannon, 64 ans, avait largement contribué à en faire la plateforme d'information et d'opinion la plus suivie au sein de la droite dure américaine. 

«Steve reste une part importante de notre histoire, et nous lui serons toujours reconnaissants pour sa contribution et ce qu'il nous a aidés à accomplir», a déclaré le PDG de Breitbart, Larry Solov, dans un communiqué publié sur le site.

C'est un nouveau coup dur pour cet idéologue, qui avait déjà dû quitter la Maison Blanche en août. Il avait indiqué alors vouloir œuvrer, de l'extérieur, à la consolidation d'un mouvement autour de Donald Trump, notamment grâce à Breitbart, qui lui offrait un puissant porte-voix.

Fire and Fury, un dernier clou dans le cercueil politique de Bannon

Mais la situation de Steve Bannon était devenue intenable après la publication, la semaine dernière, du très polémique livre de Michael Wolff Fire and Fury, qui relate la campagne de Donald Trump et sa première année au pouvoir.

Considéré comme une source majeure de l'auteur, Steve Bannon y affirme notamment que le fils du président américain, Donald Trump Jr., a commis une «trahison» en rencontrant un avocat russe qui offrait des informations compromettantes sur Hillary Clinton. Donald Trump a violemment réagi à la publication de cet ouvrage, accusant notamment Bannon d'avoir «perdu la raison». 

L'histoire du «type bien» devenu persona non grata, une descente aux enfers

Le président a également minimisé le rôle joué dans son succès électoral par celui qu'il qualifiait encore de «type bien» au moment de son départ de la Maison Blanche. Nommé directeur général d'une campagne Trump en pleine crise, en août 2016, Steve Bannon a bien joué, de l'avis général, un rôle décisif durant les trois derniers mois qui ont précédé le scrutin.

Mi-août 2017, accusé de défendre une ligne très dure, défavorable aux minorités, Bannon avait dû quitter l'administration Trump après qu'une manifestation d'extrême droite avait dégénéré à Charlottesville (Virginie), causant la mort d'une jeune femme. Tour à tour militaire, banquier d'affaires, producteur de cinéma et de télévision, Steve Bannon reste un personnage atypique, plus intéressé par les arcanes de la politique.

Début janvier, la porte-parole de la Maison Blanche Sarah Huckabee Sanders, interrogée sur les propos les plus caustiques de Bannon dans le livre de Wolff, avait estimé que Breitbart «devrait envisager» de se séparer de lui.

Avant le scandale du livre Fire and Fury, cet ancien officier de marine avait déjà été affaibli, mi-décembre, par la défaite électorale, dans l'Alabama, de Roy Moore, candidat conservateur au Sénat qu'il avait activement soutenu.

Les républicains traditionnels, artisans de la déchéance de Bannon

La déchéance de Steve Bannon sert également les intérêts de nombreux républicains de Washington, à qui l'idéologue s'en est régulièrement pris, souhaitant les remplacer par une nouvelle vague d'élus plus en ligne avec la ligne de Donald Trump.

Selon le New York Times, c'est l'héritière Rebekah Mercer, soutien de longue date de Steve Bannon, qui a poussé Breitbart, dont elle est actionnaire minoritaire, à se séparer de son président exécutif. La milliardaire avait déjà pris ses distances avec lui la semaine dernière, tout en renouvelant son soutien à Breitbart. La situation financière du site, contrôlé par des capitaux privés, est inconnue, selon l'AFP.

Breitbart a largement bénéficié de la campagne présidentielle et de l'émergence de Donald Trump, qui ont porté son trafic mensuel de 30 millions d'utilisateurs en mars 2016 à 81 millions en décembre 2017, selon les données des sites spécialisés Alexa et SimilarWeb. Il dépasse aujourd'hui largement des sites comme Politico ou The Atlantic, références d'un journalisme politique en ligne porté par un mélange d'informations choisies pour alimenter les vues d'un lectorat conservateur et des billets d'opinion marqués à droite.

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