Carles Puigdemont avait retardé d'une heure son allocution devant le Parlement de Catalogne. Le président séparatiste de la région était-il tiraillé entre les partisans d'un départ sans ménagements de la région et ceux qui craignent que le remède, l'indépendance, ne soit finalement pire que le mal, à savoir la tutelle de Madrid ? Toujours est-il que, selon le journal El Pais, le retard avec lequel il a pronocé son discours aurait été le fait de protestations dans le camp des indépendantistes, certains le jugeant trop tiède.
Et en effet, c'est une déclaration en forme de compromis que le dirigeant catalan a déclamée ce 10 octobre. «[Les résultats du référendum] sont un mandat du peuple [catalan] pour que la Catalogne devienne un Etat indépendant, sous la forme d'une république», a-t-il annoncé, évitant de proclamer formellement et unilatéralement l'indépendance. «[Le Parlement catalan] doit suspendre les effets de la déclaration d'indépendance pour entamer le dialogue [avec le gouvernement espagnol]», a-t-il proposé.
L'annonce a provoqué une vague de déception parmi le public qui s'était rassemblé devant un écran géant près du Parlement pour suivre le discours de Carles Puigdemont.
Un porte-parole du gouvernement espagnol, cité par l'AFP, a aussitôt fait savoir qu'une médiation avec Carles Puigdemont, le leader séparatiste, n'était «pas envisageable». «Une déclaration implicite d'indépendance, suivie ensuite d'une suspension explicite [...] n'est pas admissible», a encore asséné le porte-parole.
L'Union européenne, planche de salut pour la Catalogne ?
Dans son allocution, Carles Puigdemont en a en outre appelé à la communauté internationale, l'invitant à «respecter» le choix des Catalans. «Ce n'est pas du tout une affaire intérieure», a-t-il martelé. «La Catalogne, c'est une affaire européenne», a encore ajouté l'homme politique qui est aussi membre du Parti démocrate européen catalan (PDECAT).
De fait, Carles Puigdemont n'a pas réussi, pour l'instant, à obtenir le soutien de l'Union européenne. Le président du Conseil européen Donald Tusk avait demandé ce même 10 octobre au président séparatiste catalan de ne pas annoncer de décision qui rendrait le dialogue «impossible».
La veille, Paris avait fait savoir par la voix du ministre français des Affaires Européennes, Nathalie Loiseau, qu'une déclaration d'indépendance ne serait pas reconnue.
La pression sur le Parlement catalan est encore montée d'un cran lorsque la possibilité d'une arrestation de Carlos Puigdemont a été évoquée par l'agence de presse Bloomberg, citant des sources proches de Madrid, pour le cas où ce dernier proclamerait l'indépendance de la Catalogne de manière unilatérale.
Carles Puigdemont, en déclarant l'indépendance et en appelant à un dialogue que Madrid a déjà refusé, espère-t-il peut-être gagner du temps et donner à cette querelle entre la Catalogne et le gouvernement espagnol une dimension européenne ?