Plus de 8 000 hommes et garçons Bosniens musulmans ont été tués pendant quatre jours en 1995 à Srebrenica, quand des troupes de Serbes bosniens ont pris la ville, alors désignée comme «zone de sécurité» par les soldats de l’ONU. A l’époque, on a accusé les forces néerlandaises de ne pas avoir porté assistance à des milliers des personnes qui demandaient le refuge.
Mais les documents collectés pendant 15 ans par Florence Hartmann ainsi que les témoignages et les preuves qu’elle a rassemblés dans l’enquête présentée dans son livre L’Affaire de Srebrenica : Le sang de la Realpolitik montrent que la France, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne étaient prêts à abandonner la ville aux Serbes encadrés par leur président Slobodan Milošević en échange de la signature d’un accord de paix.
«Les zones de sécurité non-tenables» - c’est de cette façon que le conseiller américain à la Sécurité nationale Anthony Lake a qualifié ces trois villes où les Bosniens musulmans ont été déplacés lors de la guerre en Yougoslavie, et la France ainsi que la Grande-Bretagne l'ont soutenu, en souhaitant «retirer les forces de l’ONU de ces zones».
Mais les choses sont devenues bien pires, car la ville a été prise par les Serbes bosniens qui ont séparé les hommes et les garçons des femmes et les ont froidement tués. Un événement choquant et inattendu pour l’Occident pensez-vous ? Pas du tout. Ces trois pays étaient bien au courant de la «Directive 7» qui ordonnait «la suppression définitive» des musulmans bosniens des zones de sécurité. Ils étaient tout aussi au courant de la volonté de Ratko Mladic et Radovan Karadžic de «se débarrasser complètement» des Bosniens musulmans si leur armée capture Srebrenica.
Alors que les troupes serbes avançaient vers Srebrenica, les troupes occidentales ont négligé de prévenir les habitants de la chute imminente de la ville. Van der Wind, général néerlandais, a même dit que l’ONU a fourni 30 000 litres de carburant aux Serbes pour qu’ils atteignent les champs où allaient être exécutés les civils.
Malgré toute l’information dont les négociateurs occidentaux disposaient, pendant leurs rencontres avec Mladic et Milosevic, la question du massacre n’a même pas été évoquée, alors même que des enregistrements déclassifiés des Etats-Unis montrent que la CIA observait les champs où les exécutions avaient lieu, presque «en direct» depuis des avions satellites.
Le massacre de Srebrenica est considéré comme le «pire massacre commis en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale». Il a été qualifié de génocide par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie et la Cour internationale de justice à plusieurs reprises et le programme officiel de l'Éducation nationale en France le reconnaît comme tel.