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Daesh se positionne contre Israël

Le groupe État Islamique a revendiqué, vendredi 3 juillet, l'attaque à la roquette perpétrée dans le Sinaï égyptien contre la frontière israélienne. C'est l'ouverture d'un nouveau front pour l'organisation terroriste.

Daesh ne fait pas de distinction. Alors que la position initiale de l’État Islamique (EI) constituait en l'institution d'un califat en Irak et en Syrie, le groupe a désormais de nouvelles ambitions. En Libye, en Égypte, et maintenant en Israël. Le premier acte de ce nouveau conflit : l'attaque à la roquette de la frontière israélo-égyptienne, menée par les djihadistes de Ansat Beït al-maqdess, aussi appelée «Province du Sinaï» et qui représente l'EI dans la région. Un acte symbolique, qui n'a pas fait de victime.

Cette attaque a fait suite à celle perpétrée contre l'armée égyptienne, le 1er juillet. L'EI avait attaqué quatre points de contrôle des forces égyptiennes et miné les alentours d'un commissariat près de Cheikh Zouweid. Des frappes aériennes avaient alors été menées par l'Égypte face aux positions des djihadistes, à l'aide d'avions de chasse F-16 et d'hélicoptères Apache. Ce qui peut être aujourd'hui considéré comme «la guerre au Sinaï», d'après les mots d'un haut responsable militaire, a fait au moins 36 morts, dont une majorité de soldats égyptiens. De leur côté, les djihadistes ont perdu une centaine de combattants.

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Cette série d'attaques révèle les nouvelles ambitions de Daesh, et notamment l'ouverture d'un nouveau front dans le Sinaï. Avant de procéder aux attaques, EI avait mis en ligne une vidéo dans laquelle étaient proférées des menaces à l'encontre de «[l']État des juifs» mais aussi à l'encontre la Palestine.

Des réactions conflictuelles

Les réactions des différents leaders aux attaques perpétrées contre l’Égypte et contre Israël sont révélatrices des clivages et des conflits dans la région. Alors qu'il présentait ses condoléances à l’Égypte, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou avait souligné, dans le même discours, que l'Iran et son programme nucléaire représentaient une menace beaucoup plus importante et effrayante que le Daesh.

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Après l'attaque à la roquette contre la frontière israélienne, les autorités du pays ont pointé du doigt le rôle présumé joué par le Hamas. Cette organisation, qui contrôle la Bande de Gaza (aux portes de l'Israël, tout près du lieu où les attaques ont été menées), auraient été complices d' Ansat Beït al-maqdess. Des accusations réfutées avec véhémence par le Hamas, et qu'aucune preuve n'est venues étayer jusqu'ici. Le Hamas et Daesh ne s'apprécient guère, du reste. Des affrontements entre les deux groupes ont déjà eu lieu, dans le camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk, en Syrie. Début avril, l'EI y avait mené des attaques contre Aknaf Beïf al-Maqdas, une milice locale lié au Hamas, que Daesh considère comme «apostat» (c'est-à-dire des individus qui ont publiquement renoncé à leur religion). Dans la vidéo mise en ligne avant les attaques contre la frontière israélienne, l'EI avait par ailleurs affirmé vouloir appliquer la charia à Gaza.

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Un ennemi commun pour Israël et la Palestine ?

En menaçant Israël et la Palestine, l'EI montre son désintérêt pour le conflit qui secoue les deux nations. Ses nouvelles prises de position contre Israël se sont accompagnées de la promesse d'un démantèlement du Hamas dans la bande de Gaza. Des menaces qui s'adressent également à l'Autorité palestinienne qui contrôle la Cisjordanie. En s'attaquant ainsi aux deux belligérants d'un conflit qui leur est propre, Daesh se pose comme leur ennemi commun.

En tant que tel, l'EI ne représente pas une menace importante pour l'Etat hébreu ou la Palestine, d'après Romain Caillet, chercheur et consultant sur les questions islamistes. Jérusalem, par la voix de son premier ministre Benyamin Netanyahou, a dévoilé le peu qu'il pensait de la menace, face à un Iran devenant une puissance nucléaire. Le Hamas, de son côté, exerce un contrôle encore très serré de l'enclave palestinienne. Malgré l'opération israélienne de l'été 2014 et la destruction de la quasi-totalité des tunnels reliant Gaza à l’Égypte, il est peu vraisemblable de voir le territoire échapper au contrôle du Hamas. Le groupe a par ailleurs une bonne connaissance des groupes djihadistes qui gangrènent la bande de Gaza et a l'habitude de les laisser opérer tant qu'ils ne deviennent pas gênants.

Selon Romain Caillet, «la seule chance de l'EI à Gaza serait qu'une intervention israélienne démantèle le Hamas». Un événement qui n'est pas à l'ordre du jour, au contraire : rapportées par plusieurs médias du Proche-Orient, des négociations sont en cours et pourraient conduire à la mise en place d'un cessez-le-feu durable, en échange de l'ouverture d'un port dans la bande de Gaza.