Une correspondante de l'AFP a vu le leader de l'opposition de gauche Zoran Zaev, le visage ensanglanté, dans le chaos qui a suivi l'irruption dans l'hémicycle de sympathisants du parti de droite VMRO-DPMNE de l'ex-Premier ministre Nikola Gruevski.
Les forces de l’ordre ont tiré des grenades anti-émeutes afin de disperser la foule à l’extérieur du bâtiment pour faciliter l’évacuation des parlementaires.
«Dans le but de reprendre le contrôle de la situation à l’intérieur et à l’extérieur du parlement, nous avons donné ordre à la police de prendre toutes les mesures nécessaires», a précisé Agim Nuhiu, ministre de l’Intérieur du gouvernement d’intérim.
Les fantômes de la guerre civile
Les manifestants brandissaient des drapeaux macédoniens et chantaient l'hymne national. Au moins une personne masquée a été vue dans le bâtiment sur des images diffusées par une télévision locale, TV Nova.
«Je condamne les attaques contre les députés à Skopje dans les termes les plus vigoureux. La violence n'a pas sa place dans le parlement», a écrit le Commissaire européen à l'Elargissement Johannes Hahn sur son compte Twitter.
Les sympathisants de droite manifestent quotidiennement à Skopje depuis les élections législatives anticipées de décembre 2016 qui n'ont pas permis de sortir le pays de la crise politique dans laquelle il est plongé depuis deux ans.
Ils refusent la formation d'un gouvernement de coalition entre les sociaux-démocrates de Zoran Zaev et les représentants de la minorité albanaise qui porterait, selon eux, atteinte à l'unité nationale de la Macédoine.
Ils rejettent notamment la demande d'octroi à l'albanais du statut de langue officielle sur l'ensemble du territoire.
L'Union européenne et les Etats-Unis ont appelé en vain le président de droite, Gjorge Ivanov, à revenir sur son refus de laisser le leader des sociaux-démocrates (SDSM), Zoran Zaev, former avec les partis albanais un gouvernement de coalition qui disposerait d'une majorité au Parlement (67 députés sur 120).
Les Albanais représentent 20 à 25% de la population de ce pays de 2,1 millions d'habitants.
C'est la tentative de cette coalition autour de Zoran Zaev de faire élire au poste de président du Parlement, l'Albanais Talat Xhaferi, qui a provoqué la colère des manifestants.
Nikola Gruevski a, pour sa part, lancé un appel au calme.
La Macédoine est depuis deux ans dans une impasse politique, née de la publication d'écoutes illégales révélant des faits de corruption impliquant les plus hautes sphères du pouvoir.
Les sociaux-démocrates accusent le patron de la droite, Nikola Gruevski, alors Premier ministre, d'être l'ordonnateur de ces écoutes illégales de milliers d'opposants, de personnalités religieuses, médiatiques ou de la société civile.
Le petit pays, ex-membre de la Yougoslavie, s'est retrouvé dans une situation de quasi guerre civile en 2001, alors que la minorité albanaise s'était soulevée. L'intervention de la communauté internationale avait évité la catastrophe mais les tensions ethniques demeurent.