Mercredi 12 avril
La Russie pose son veto à la résolution portée par les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni au Conseil de Sécurité de l'ONU, portant sur l'attaque chimique présumée de Syrie.
Le Conseil de sécurité de l'ONU passe au vote de la résolution occidentale sur la Syrie :
Intervention du représentant de la Syrie :
«Il y a 14 ans, le 9 avril 2003, le jour de l'invasion de l'Irak, j'étais installé à la place de l'ambassadeur italien. J'ai participé à cette séance où Colin Powell, ministre des Affaires étrangères, s'était exprimé. Il avait parlé d'armes de destruction massive en Irak.»
«L'administration américaine a décidé de répéter les mêmes représentations théâtrales sanglantes qu'elle avait mise en scène il y a 14 ans à ce Conseil avec l'Irak, pièce intitulée : "Le mensonge des armes de destruction massive irakiennes"»
«Les Etats-Unis sont passés d'une agression par personnes interposées par les groupes terroristes armés et sous leur contrôle depuis des années, à une confrontation militaire directe contre mon pays»
«Les Etats-Unis dirigent le terrorisme en Syrie avec ses alliés et agents dans la région. Ils ont appuyé toute forme d'appui à des groupes terroristes pour commettre les crimes les plus atroces contre les civils et les infrastructures syriennes. Cela inclut les activités de la prétendue coalition internationale qui s'est récemment illustrée en tuant des civils et en apportant une couverture aérienne au Front al-Nosra et à Daesh».
«Israël a été le premier à avoir l'honneur d'appuyer le terrorisme. [...] Israël a fourni toutes sortes d'appuis à ces groupes y compris des soins médicaux à des terroristes blessés. Israël a lancé des frappes contre des positions de l'armée syrienne. Pire encore, Israël a fourni un appui direct à l'Etat islamique avec des frappes aériennes le 17 mars 2017 contre des positions de l'armée syrienne à Palmyre.»
«L'attaque de Khan Cheikoun a été mise au point pendant des mois dans les arrières-salles de Tel-Aviv, de Riyad, Londres, Paris, Washington... Ces mêmes capitales ces dernières années se sont efforcées de fournir aux éléments terroristes en Syrie, notamment au Front al-Nosra, des agents chimiques toxiques afin qu'ils les utilisent pour pouvoir ensuite accuser le gouvernement syrien, ce qui a notamment été le cas à la Ghouta en août 2013.»
Intervention de la représentante des Etats-Unis :
«Nous ne permettrons pas que l'utilisation d'armes chimiques reste sans réponse, nous n'allons pas détourner le regard.»
«Je m'adresse à mes collègues russes. Vous vous isolez de la communauté internationale chaque fois que l'un des avions d'Assad largue un baril d'explosif sur la population et chaque fois qu'Assad essaie d'affamer sa population lors des sièges.»
«L'heure est venue pour qu'Assad ne fasse plus partie du problème.»
«Il faut que la Russie se mette du côté du monde civilisé par rapport au régime d'Assad.»
«Nous n'appuierons pas un processus qui protégerait Assad alors qu'il essaie de gagner du temps et que ses agissements meurtrissent son peuple.»
Intervention du représentant de la Bolivie :
«Nous considérons que tout acte unilatéral nuit au processus de paix et au détriment de la vie de millions de personnes. Nous reconnaissons les efforts du peuple et du gouvernement syrien pour lutter contre le terrorisme. Nous nous opposons avec énergie à tout acte terroriste quel qu'il soit, ce sont des actes criminels et injustifiables.»
«Nous ne comprenons pas la logique selon laquelle on a déjà condamné une attaque pour laquelle on envisage ensuite une enquête. Je ne comprends pas cette attitude, à moins qu'il s'agisse d'un moyen de pression concernant les pourparlers actuels à Moscou. Je ne comprends pas l'intérêt d'avoir une résolution sur la table qui va faire l'objet d'un véto.»
«Quels sont les bénéficiaires de l'impasse du processus de paix, à part les groupes terroristes ? Le complexe militaro-industriel, ceux qui bénéficient au plan économique de la guerre. Ce sont eux qui bénéficient des principaux gains économiques de cette guerre.»
Intervention du représentant de la Russie :
Au représentant du Royaume-Uni : «Vous faites tout pour saper cette coopération [de l'ONU], pour la faire échouer. Regardez-moi ! Ne détournez pas les yeux, pourquoi détournez-vous les yeux ? Aujourd'hui, vous n'avez rien dit sur le processus politique. Vous n'avez rien écouté de la déclaration de monsieur de Mistura.»
«Que faites-vous avec vos idées anti-régime ? Vous avez perdu toute raison.»
«Toutes les forces syriennes patriotiques doivent avoir la possibilité de participer sur un pied d'égalité aux négociations pour parler des moyens de préserver la Syrie comme un Etat laïque et unitaire dans lequel toutes les communautés historiques pourraient vivre dans la paix et participer au rétablissement de l'Etat comme cela a toujours été le cas.»
«Londres et Paris, faites votre part. Convoquez les groupes d'opposition et demandez-leur de participer au processus d'Astana.»
«De telles provocations comme Khan Cheikhoun apportent de l'eau au moulin des partisans d'une solution militaire. Il faut mener une enquête approfondie. Or, j'ai entendu avec étonnement que les experts français étaient déjà arrivés à la conclusion que c'était Damas qui avait fait cela. Cela m'a vraiment beaucoup étonné parce que personne n'est allé sur les lieux du crime. Comment savez-vous tout ça ?»
«Nous attirons l'attention de la communauté internationale et de l'ONU sur la contamination du territoire syrien par les mines et autres explosifs. Nous appelons à la constitution d'une coalition internationale pour opérer le déminage de la Syrie. Le chantage voulant placer le déminage uniquement à la condition d'un changement de régime est inacceptable. Cela pue l'hypocrisie.»
Intervention du représentant de la France :
«La frappe américaine sur la base aérienne d'al-Chaayrate a répondu à la gravité de l'acte et de la menace. Elle a adressé au régime syrien le message qu'il aurait dû entendre depuis de longues années : le temps de son impunité est terminé.»
«La texte de la résolution condamne l'attaque du 4 avril et réaffirme le soutien des Nations unies à l'enquête sur la mission d'établissement des faits sur les conditions de cette attaque et la nature de la substance utilisée.»
«Une solution politique aboutissant à une transition est plus urgente et nécessaire que jamais. Tant que ce régime se maintiendra au pouvoir par la terreur et la destruction avec la complicité de ceux qui le soutiennennt, il n'y aura jamais de paix et de reconstruction de la Syrie.»
Intervention du représentant du Royaume-Uni :
«Il est clair aujourd'hui qu'il ne peut y avoir de place pour Assad dans l'avenir de la Syrie.»
«Le régime continue, avec le soutien de la Russie dans ce Conseil, à larguer des bombes, à larguer des armes chimiques.»
«La Russie a abusé de son veto pour protéger le régime et son utilisation des armes chimiques.»
Le projet de résolution présenté par la France, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis au Conseil de sécurité de l'ONU et demandant la coopération du régime syrien dans une enquête sur l'attaque chimique présumée, est un texte «inacceptable» en l'état, a estimé la diplomatie russe, dans l'après-midi du 12 avril.
«En l'état, ce projet est pour nous inacceptable et nous n'allons pas voter en sa faveur, bien sûr. Nous allons voter contre si nos partenaires n'écoutent pas nos appels», a déclaré le vice-ministre russe des Affaires étrangères Guennadi Gatilov, cité par l'agence de presse Interfax.