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Une série d'incidents ravive le débat sur l'antisémitisme aux Etats-Unis

Un troisième cimetière a été vandalisé en deux semaines, des alertes à la bombe se multiplient aux Etats-Unis. Le débat mérite la peine d'être relancé : le pays connaît-il une résurgence de l'antisémitisme ?

Depuis le début de l'année, les signes de l'antisémitisme s'accumulent. Plus de cent alertes à la bombe ont été relevées dans une trentaine d'Etats américains, visant des centres ou des établissements scolaires juifs. Le décompte des divers incidents, allant de l'intimidation à l'agression, atteint quelque 200 cas depuis janvier 2017, a recensé une organisation de lutte contre l'antisémitisme.

Les événements se sont même accélérés ces derniers jours, avec la confirmation de la profanation d'un troisième cimetière juif en deux semaines. Cette fois, une dizaine de pierres tombales ont été vandalisées à Rochester, dans l'Etat de New York, après des faits similaires à Philadelphie et à Saint-Louis.

Ces chiffres ne sont pas supérieurs à la moyenne des années précédentes. Mais, expliquent les observateurs, ces faits doivent être analysés à la lumière d'une libération de la parole raciste aux Etats-Unis, dans le sillage d'un discours politique qui donne le ton.

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Hostilité générale 

En ouverture de son premier discours devant le Congrès, le 1er mars, le président américain a dénoncé solennellement cette série d'actes racistes et antisémites, promettant que les Etats-Unis resteraient «unis contre la haine».

Aux Etats-Unis réside le plus grand foyer juif au monde après Israël. «C'est l'environnement de xénophobie et de racisme auquel nous assistons qui constitue un danger pour les juifs d'Amérique», a jugé Kenneth Stern, directeur de la fondation Justus & Karin Rosenberg, qui lutte contre l'antisémitisme.

Ces actes, reprend Mark Potok du Southern Poverty Law Center, qui étudie les groupes et les actes racistes, sont favorisés par internet et les réseaux sociaux, où se déversent les discours les plus radicaux, parfois proches de la «droite radicale américaine».

Sur les faits eux-mêmes, plusieurs enquêtes ont été lancées au niveau des Etats. Une investigation a également été ouverte auparavant par la police fédérale (FBI) et le département des droits civiques du ministère de la Justice, chargé d'enquêter sur les crimes raciaux ou à caractère confessionnel.

Vengeance 

Les récents actes de vandalisme dans les cimetières juifs américains, qui ont ravivé un vif débat en Amérique, sont des événements qui «ne doivent pas faire l'objet de sensationnalisme», tempère Paul Goldenberg de Secure Community Network, un organisme qui collabore avec le gouvernement pour protéger les institutions juives. D'ailleurs, l'enquête sur la profanation du cimetière de Waad Hakolel, à Rochester, doit encore déterminer s'il s'agit d'un simple cas de vandalisme ou bien d'un acte antisémite.

Dans une autre affaire, un homme de 31 ans suspecté d'avoir lancé de nombreuses fausses alertes à la bombe contre des établissements juifs a été interpellé le 3 mars à Saint-Louis dans l'Etat du Missouri.

Mais selon les premier éléments de l'enquête, Juan Thompson, un ancien journaliste de The Intercept licencié pour avoir utilisé des sources fictives et inventé des citations, avait pour principal motif de compromettre une ancienne petite amie. C'est au nom de la jeune femme, qui avait rompu avec lui à l'été 2016, qu'il a lancé ces alertes.

«Les personnes derrière cela cherchent à [...] harceler les Américains et dans ce cas les institutions juives», a poursuivi Paul Goldenberg.

Le procureur new-yorkais Preet Bharara, qui a déféré Juan Thompson devant un tribunal le 3 mars, semble du même avis : à ce stade, il n'a retenu contre lui que le chef d'accusation de cyber-harcèlement.