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Les islamistes toujours aux portes d'Israël qui jongle avec les alliances

Les islamistes se rapprochant dangereusement de ses terrioires, Israël n'hésite pourtant pas à fournir une aide logistique aux rebelles et même à Al-Nosra, lorsqu'il s'agit de nuire au régime syrien. Les druzes, eux, craignent pour leur survie.

Une situation de plus en plus préoccupante

A 2000 mètres d'altitude, au sommet du mont Hermon où se trouve son bastion de surveillance le plus septentrional, l'armée israélienne a une vue à vol d'oiseau sur la situation en Syrie qui continue de se désintégrer. 

Si les soldats parviennent difficilement à apercevoir Damas, ils voient parfaitement ce qui se passe dans les villages sur le bord du plateau du Golan : Hadr, un village druze pro-régime vient de tomber aux mains des combattants rebelles. Non loin de là, Jubata al-Khachab est tenue par les forces loyalistes. Mais surtout Al-Nosra, la branche syrienne d'Al-Qaïda qui continue sa progression : les positions des islamistes se rapprochent une nouvelle fois dangereusement des territoires israéliens. 

Celà fait déjà plusieurs années qu'Israël subit régulièrement des attaques de groupes armés djihadistes contre leurs postes de contrôle dans le Golan. Les médias locaux font souvent état de stationnement de groupes de militants liés à Al-Qaïda à quelques centaines de mètres seulement de la frontière.

En septembre dernier, plusieurs photos montraient le drapeau noir d'Al-Qaida flottant non loin du poste frontière de Quneitra et l'Etat hébreu avait intercepté un drone en provenance de Syrie alors qu'il survolait le plateau du Golan.

En Aout 2013, des combats avaient déjà éclaté dans la ville de Breiqa, située sur la ligne de trêve de 1974 (fin de la guerre de kippour) entre la Syrie et Israël. Six obus de mortiers en provenance de Syrie avait alors été tirés sur Israël, sans faire ni blessés ni dommages. Israël avait alors riposté en faisant feu sur le poste militaire syrien, d'où les mortiers avaient été tirés. La même année, un tir d'obus avait visé une patrouille israélienne qui roulait le long de la frontière. 

Israël mène des conflits interposés

Officiellement, Israël insiste vouloir rester en dehors du conflit voisin. Pourtant, en octobre dernier, le spécialiste du Moyen-Orient Ehud Yaari, a expliqué que certains groupes rebelles maintenaient «un contact constant avec l'IDF» (Forces de défense israéliennes) qui leur fourniraient même des armes. Un rapport de l'ONU avait également révélé que les troupes israéliennes distribuaient des colis aux syriens armés.

Israël ouvre aussi ses frontières à des djihadistes d’Al-Qaïda et de Al-Nosra qui luttent contre le régime syrien afin de leur apporter une assitance médicale. C'est ce qu'a assuré le Wall Street Journal en mars dernier.

Le journal américain a indiqué que Al-Nosra, qui combat actuellement le régime de Bashar al-Assad et le Hezbollah, «n’a pas causé de torts à Israël» depuis que l’organisation terroriste «a pris le contrôle de la zone frontalière» sur le plateau du Golan.

La preuve de liens de l'armée israélienne avec des groupes anti-Assad, y compris Al-Nosra, n'est jamais officiellement évoquée. Un cas particulièrement intrigant qui avait été soumis à la censure et à un vrai bâillon juridique, faisait état de la tenue d'une réunion secrète entre les agents du renseignement israélien et les rebelles syriens qu'un militant druze du Golan et un soldat de Tsahal druze auraient réussi à filmer.

Bien que l’État hébreu considère Al-Qaïda et ses alliés comme des ennemis, ses principales préoccupations sont actuellement dirigées vers l’Iran et ses soutiens comme le Hezbollah, perçus comme des menaces plus significatives dans l’immédiat. Selon le Wall Street Journal, l’attitude d’Israël aurait provoqué des tensions avec les États-Unis, dont l’armée a ciblé à plusieurs reprises des membres d’Al-Qaïda et d’Al-Nosra en Syrie.

Selon Moshe Yaalon, l'implosion de la Syrie a apporté «de nouveaux défis» à Israël. Si auparavant, l'ennemi direct étaient le président syrien et son entourage, désormais, Israël doit connaître tous les leaders de chaque milice a expliqué le ministre israélien de la Défense.

Après les «printemps arabes», qu'il préfère qualifier d'«hiver islamiste», Israël a toujours maintenu ses propres «lignes rouges», a poursuivi des frappes aériennes répétées contre ​​les transferts d'armes au Hezbollah, allié libanais fidèle à Bachar Al-Assad et a apporté des réponses rapides et fulgurantes aux tirs transfrontaliers. En Janvier, il avait visé une unité du Hezbollah et tué un garde révolutionnaire iranien.

Au milieu, les druzes craignent pour leur survie et en appellent à Israël

La communauté druze de Syrie, environ 5% de la population, a été divisée entre partisans et adversaires de Assad, mais a globalement toujours réussi à rester en dehors de la guerre. Aujourd'hui, elle est une cible pour Al-Nosra et Daesh. Cela alarme les communautés druzes au Liban, sur le Golan occupé par Israël, et en Israël même où, contrairement aux citoyens arabes, la minorité druze doit servir dans les forces armées.

Ainsi, les druzes israéliens ont récemment manifesté devant la Knesset à Jérusalem, exigeant une action pour sauver leurs frères, en vain. Selon le professeur arabe israélien Mordechai Kedar, beaucoups dans le sud de la Syrie attendent un soutien d'Israël aux druzes qui sont de plus en plus menacés par Daesh. Le professeur Kedar évoque parallèlement le sort des yézidis en Irak, persécutés et massacrés par l'Etat islamique. 

En réponse à cet appel de la communauté druze, l'armée israélienne a fait envoyer des messages à Al-Nosra, via le courant dominant de l'Armée syrienne libre (ASL), avertissant le groupe islamiste de ne pas nuire aux druzes de Syrie.